À l’occasion du 1er mai, les syndicats et les partis politiques ont défilé dans les rues de Fort-de-France pour défendre les droits des travailleurs. Le SE-UNSA, représentant des enseignants de Martinique, s’est également joint à cette mobilisation pour mettre en avant les défis auxquels font face les professionnels de l’enseignement. Carl Toussaint, secrétaire général du syndicat, nous éclaire sur ce sujet et nous livre ses perspectives.
Ce mercredi 1er mai, les syndicats et partis politiques ont envahi les rues de Fort-de-France, à l’occasion d’une manifestation. Lors de celle-ci, tous n’avaient qu’un objectif en tête : faire valoir les droits des travailleurs martiniquais. Il était impensable pour le SE-UNSA, le syndicat des enseignants de Martinique de ne pas répondre présent lors de ce rendez-vous. Au cours des dernières années, les enseignants ont été contraints de faire face aux défis liés à des problématiques liés à la dégradation du système éducatif martiniquais. Beaucoup d’entre eux sont obligés d’être présent sur plusieurs postes, d’autres non pas les moyens de pouvoir s’occuper convenablement des élèves ayant des besoins particuliers. Le syndicat plaide en faveur d’une prise en charge plus efficace de tous ces défis. Carl Toussaint, secrétaire général du SE-UNSA, nous éclaire sur ce que vivent les enseignants et élèves martiniquais au quotidien.
Pourquoi le syndicat SE-UNSA de Martinique manifeste en ce 1er mai ?
Nous manifestons pour un très grand nombre de raisons. Nous subissons des problématiques telles que les suppressions de postes dans notre académie. Cela a des conséquences sur le travail de plusieurs collègues, qui sont parfois obligés d’enseigner sur deux voire trois établissements.
De plus, il y a énormément d’élèves qui ont ce que l’on appelle des “besoins éducatifs particuliers”. Ces derniers temps, leur nombre n’a fait que croître. Nous ne disposons pas assez de moyens éducatifs afin d’accompagner de les accompagner décemment.
Les enseignants et les élèves de la Martinique et du reste de l’Outre-mer souffrent donc d’un grand désavantage, comparé à ceux de l’Hexagone ?
Effectivement, quand on voit la multitude de problèmes auxquels nous sommes confrontés ici, il est clair que nos conditions de travail ne peuvent pas être comparées à celles de l’hexagone. En France métropolitaine, elles sont certes difficiles, mais sur notre territoire, ça l’est bien plus.
Concernant les élèves, le chlordécone a eu d’énormes répercussions sur eux. Sur les territoires où l’utilisation du pesticide a été fréquente, on observe qu’il y a un grand nombre d’élèves en grande difficulté pédagogique ou encore qui sont handicapés. Malheureusement, il n’y a pas encore assez d’études à ce sujet.
Nous sommes aussi confrontés de plus en plus aux problématiques liés aux déserts médicaux. Ils impactent fortement les conditions d’apprentissage de certains élèves, car nous manquons cruellement de spécialistes tels que des orthophonistes. Je pense qu’il serait alors nécessaire de pousser nos jeunes vers des métiers dont nous avons de plus en plus besoin aujourd’hui.
Récemment, l’Etat a annoncé une réforme sur le concours pour devenir enseignant. Ce dernier sera avancé vers la L3. La création d’écoles normales supérieures du “21ème siècle” ainsi qu’une rémunération des étudiants sont aussi prévues. En Martinique, ces mesures pourront-t-elles être efficaces afin de régler certains problèmes tels que celui de l’attractivité du métier ?
Il est clair que cette réforme n’aura aucun impact sur le nombre d’enseignants en Martinique. Le problème qui se pose aujourd’hui est en grande partie celui de la rémunération de notre métier mais aussi celle des conditions de travail. Quand les gens voient ce que subissent les enseignants ici, ça ne les encourage pas à le devenir aussi.
Jusqu’à présent, tout ce que le gouvernement à trouver pour réhausser l’attractivité salariale de notre métier, c’est la mise en place du “Pacte”. Or, celui-ci ne correspond pas à une revalorisation salariale. Vu l’importance des cotisations retraites qui sont prélevées sur le “Pacte”, cette revalorisation aura alors un impact très faible sur le montant des pensions.
Quelles stratégies les élus locaux devraient-ils alors adopter afin d’améliorer la situation des enseignants ?
Nous aurions aimé que les élus se mobilisent massivement pour s’opposer aux suppressions de poste que nous connaissons depuis une dizaine d’années. Il serait aussi recommandable qu’ils trouvent des solutions afin que les lauréats des concours qui souhaitent rester sur le territoire ne soient pas obligés de partir.
Ils doivent comprendre que la situation devient chaque jour de plus en plus difficile, dans un contexte de réduction des moyens.
Quelles sont les perspectives du SE UNSA afin de continuer à soutenir les enseignants de Martinique ?
Nous continuerons à soutenir les collègues, notamment lors des mobilisations contre les suppressions de postes. Il faut continuer d’œuvrer sur le terrain, mais si nous n’avons pas un soutien politique fort, le résultat de nos efforts deviendra inutile au bout d’un certain temps.
Nous invitons aussi la population à nous soutenir, afin que nous puissions trouver des solutions afin d’avoir enfin dans cette académie des conditions d’enseignements qui soient correctes.
Propos recueillis par Thibaut Charles