Le 31 juillet 2024, une Convention Judiciaire d’Intérêt Public (CJIPE) conclue entre le parquet de Fort-de-France et le SMTVD a été validée par le tribunal judiciaire. Faisant suite aux infractions constatées par le passé sur les différents sites du SMTVD, cet accord repose sur l’engagement de la structure à adopter de meilleures pratiques en matière de gestion des déchets. Belfort Birota, le président du SMTVD, revient sur les défis rencontrés et les mesures mises en place pour redresser la situation.
Comment avez-vous trouvé le SMTVD à votre arrivée ? Pouvez-vous expliquer quelles ont été les principales défaillances rencontrées par le SMTVD qui ont conduit à la persistance des problèmes liés à la gestion des déchets ?
Lorsque nous avons pris nos fonctions, nous avons hérité d’une situation extrêmement difficile. Le SMTVD était confronté à des défis financiers et administratifs majeurs. Nous avons découvert un déficit très important ainsi qu’une dette fournisseur considérable. Dès le départ, nous avons dû prendre des mesures urgentes pour stabiliser la situation financière. Nous nous sommes appuyés sur les dotations et sur les petites recettes générées en interne pour commencer à redresser la structure.
Le problème majeur résidait dans le sous-financement initial de la structure dès sa création en 2014. Ce manque de financement adéquat a persisté et s’est aggravé au fil des ans, alors que nos missions devenaient de plus en plus importantes. Nous avons dû traiter et valoriser les déchets dans des conditions financières précaires. De plus, la situation s’est compliquée en 2017 lorsque l’ancienne gouvernance a présenté un budget en équilibre basé sur des emprunts de 49 millions d’euros sans vérifier la confiance des banques. Cela a conduit à un manque de liquidités pour exécuter le budget, entraînant des commandes non payées et une perte de confiance des fournisseurs.
Quelles ont été vos premières actions lors de votre arrivée à la tête du SMTVD ?
Depuis notre arrivée, nous avons pris un engagement fort pour redresser la situation. Dès le départ, nous avons dû prendre des mesures urgentes pour stabiliser la situation financière. Nous nous sommes appuyés sur les dotations et sur les petites recettes générées en interne pour commencer à redresser la structure.
Nous avons travaillé et signé un contrat d’objectifs et de performance avec l’État et la Collectivité Territoriale de Martinique pour rétablir l’équilibre financier du SMTVD.
Voici les principaux éléments de ce contrat :
- Définition des Actions Prioritaires et Programmation Pluriannuelle d’Investissements. Les investissements facilités par l’appui des financeurs (État, Europe et CTM) sont essentiels pour améliorer nos outils et l’efficacité de nos processus de traitement des déchets, ainsi que pour développer de nouvelles méthodes de valorisation.
- Mise à Disposition d’Assistants Techniques : des experts sont mis à notre disposition pour nous accompagner sur les aspects organisationnels, la gestion de projets et la montée en compétences de notre personnel.
Nous avons également travaillé à harmoniser la gestion des déchets en Martinique en collaborant étroitement avec les autres acteurs locaux. Notre objectif est de stabiliser complètement la structure d’ici 2027, et nous avançons progressivement vers cette direction, en améliorant la gestion et en renforçant la confiance de nos partenaires financiers.
Quelles leçons tirez-vous de cette situation et comment cela influencera-t-il la stratégie future du SMTVD ?
En examinant la situation actuelle du SMTVD, plusieurs leçons clés se dégagent. Premièrement, la gestion financière et administrative doit être rigoureuse dès le départ pour éviter l’accumulation de dettes et de déficits. Nous avons appris que le sous-financement et la gestion inappropriée des ressources peuvent gravement compromettre le fonctionnement d’une organisation. Cette expérience nous pousse à renforcer nos pratiques de gestion financière et à garantir une transparence totale dans la gestion des fonds.
Pour l’avenir, nous allons concentrer nos efforts sur l’amélioration de la structure financière en mettant en place des mécanismes de contrôle plus stricts. Nous allons également travailler sur une réforme organisationnelle pour optimiser nos opérations et améliorer la performance de notre personnel. Ces mesures visent à assurer une meilleure conformité réglementaire et à renforcer notre capacité à gérer efficacement les déchets, tout en garantissant la durabilité financière du SMTVD.
Quels changements organisationnels ou de gouvernance, envisagez-vous pour améliorer la gestion des déchets et assurer une meilleure conformité réglementaire ?
“Pour améliorer la gestion des déchets et assurer une meilleure conformité réglementaire, nous envisageons plusieurs changements importants. Nous avons constaté que des changements dans les pratiques de gestion du personnel sont nécessaires, notamment en favorisant une culture de performance et de responsabilité.”
Nous prévoyons également de renégocier les contrats et de résoudre les problèmes liés aux baux défavorables, comme celui que nous avons hérité, qui pèse lourdement sur notre budget. En outre, nous travaillerons sur l’optimisation de nos processus internes et renforcerons notre coopération avec les partenaires financiers et les collectivités locales pour garantir une gestion intégrée et cohérente des déchets. Enfin, nous continuerons à militer pour une révision des politiques de fiscalité sur les déchets, afin de faciliter notre transition vers des pratiques plus durables.
Concernant les mesures prévues pour indemniser les victimes des dommages causés par les infractions identifiées par le parquet de Fort-de-France, qu’est-ce que vous prévoyez ?
Tout d’abord, en signant la Convention judiciaire d’intérêt public en matière environnementale, nous avons accepté de verser une amende de 150 000 euros au Trésor public. Cette amende, bien que significative, représente un compromis pour éviter un procès plus long et coûteux.
En plus de cette amende, nous avons pris des engagements spécifiques pour indemniser les riverains affectés par les incendies récurrents sur les sites de stockage des déchets. Ces personnes, vivant dans des zones densément peuplées, ont subi des nuisances importantes, et certaines ont même été contraintes de vendre leurs maisons. Nous avons donc convenu avec le procureur de verser des indemnités aux victimes, en fonction des justificatifs fournis. Par ailleurs, “nous avons créé un fonds pour réparer les dommages causés aux tiers, afin de garantir que chaque personne touchée reçoive une compensation équitable. Enfin, nous continuons à travailler avec les autorités environnementales pour améliorer nos pratiques et prévenir de futurs problèmes.”
Comment comptez-vous travailler avec la DEAL Martinique et l’Office français de la biodiversité pour assurer la mise en conformité et améliorer la gestion des déchets ?
Nous avons d’abord introduit des mesures innovantes, telles que l’acquisition d’engins spécialisés pour le compactage des déchets, afin de répondre aux exigences techniques imposées par ces organismes. Nous avons également renforcé notre équipe technique avec un expert de l’AFD (Agence française de développement) qui travaille en étroite collaboration avec la DEAL et l’OFB pour assurer le suivi quotidien des opérations.
En parallèle, nous avons mis en place une assistance administrative dédiée, chargée des marchés et de la recherche de financements, afin de garantir que toutes les démarches nécessaires soient correctement suivies. Ces mesures visent à créer un environnement de travail harmonieux et efficace, facilitant ainsi la mise en œuvre des réformes nécessaires. Les relations avec la DEAL et l’OFB sont excellentes, ce qui permet de progresser rapidement dans nos efforts pour redresser la situation et assurer une gestion des déchets conforme aux normes environnementales.
Propos recueillis par Thibaut Charles