Frais d’approche, fiscalité, contribution des distributeurs et l’autonomie alimentaire. Après la réunion de la semaine dernière, les acteurs de l’économie locale ont identifié quatre axes de travail qui amèneraient à une baisse des prix de 20%.
Une nouvelle fois, le président du RPPRAC a usé de la politique de la chaise vide. Le collectif qui entend lutter contre la vie chère a quitté la table ronde alors que la réunion venait tout juste de commencer. Tout comme lors de la première réunion le 5 septembre, les deux représentants du RPPRAC souhaitaient diffuser la réunion en live. Tout comme lors de la première réunion, le préfet s’y est opposé. Pourtant le président du RPPRAC, Rodrigue Petitot affirme vouloir participer à ces tables rondes. « Le peuple veut participer au débat par le lien d’un téléphone, par le biais de haut-parleur. J’entends que, traditionnellement, les choses ne se sont jamais passées comme cela. Mais nous ne sommes pas conventionnels. » Rodrigue Petitot dit « le R », assure que le mouvement va se durcir : « Nous sommes prêts à aller là où personne n’a été. »
La table ronde s’est donc déroulée en l’absence des représentants du collectif. Toutefois, une quarantaine d’acteurs de l’économie de l’île étaient bien présents à la préfecture en cette fin de matinée. Il en est ressorti quatre axes de travail pouvant rendre du pouvoir d’achat aux Martiniquais. Le caractère insulaire de l’île auquel on peut ajouter que l’Hexagone est le premier partenaire commercial, rajoute des euros sur la facture finale. Il est donc question de réduire les frais d’approche par la constitution d’un fonds de compensation. Il s’agit aussi de réduire la fiscalité avec notamment une baisse de la TVA sur les produits de grande consommation. Il est également demandé aux distributeurs d’apporter leur contribution à travers un prix export et une charte d’engagement. Enfin, le quatrième axe s’inscrit sur du long terme puisqu’il convient de renforcer l’autonomie alimentaire, particulièrement en structurant davantage la filière agricole. La préfecture vise une baisse de 20% sur 2500 produits de première nécessité.
“Une feuille de route chiffrée et faisable”
« Tout l’enjeu aujourd’hui est de proposer au gouvernement, dans la prise en compte de certaines orientations, une feuille de route chiffrée et faisable », explique le préfet Jean-Christophe Bouvier. Deux experts en fiscalité ont été dépêchés afin qu’ils se penchent sur le dossier de la vie chère. « De sorte que nous puissions proposer au prochain gouvernement une feuille de route. Notre détermination est de parvenir à arbitrer dans tous ces chemins complexes les solutions les plus simples et les plus rapides à mettre en œuvre », rappelle le préfet.
Les parlementaires de la Martinique étaient également autour de la table ronde. « Il ne s’agissait pas de négociations, mais de démonstrations de ce que les uns et les autres comptaient faire. La population a besoin de cette transparence », fait remarquer Jiovanny William. Ce dernier concède que supprimer la vie chère est un vœu pieux, mais que des leviers sont disponibles pour une vie moins chère de manière pérenne. « Il faut un cocktail de mesures parce qu’une seule mesure ne suffira pas pour que les choses avancent », ajoute le député.
Un écart de prix insupportable
S’il s’agit de la deuxième table ronde de ce type, Catherine Conconne la voit comme une énième réunion autour de la vie chère. « Il y a eu beaucoup d’avancées, les chiffres du Bouclier qualité prix ont doublé. Des taxations ont été revues. Un travail de fond se fait depuis longtemps. » Elle ajoute que l’on atteint les limites de l’exercice avec lequel il faudra des interventions qui ne viennent pas du local.
D’une semaine à l’autre, les différents groupes ont travaillé sur les mesures à mettre potentiellement en œuvre. Philippe Jock, président de la Chambre de commerce et d’industrie, se montre satisfait des efforts déployés par chacun. « Ce travail est fait de nature à nous faire avancer. » Il ajoute : « Cet écart de prix sur les produits alimentaires est insupportable. » Selon lui, la solution la plus facile à mettre en œuvre et la plus efficace est la continuité territoriale, « même si s’agissant d’un dispositif d’aide, il faudra certainement le notifier à Bruxelles. »
Baisser considérablement et durablement les prix fait l’unanimité des acteurs assis autour de la table ronde.
Pourtant, la tâche semble complexe. Pourquoi ? La Martinique importe 80% de ce que la population consomme et son partenaire privilégié est la France située à 6800 km. Le marché local est étroit avec ses 360 000 âmes. Les facteurs de surcoûts sont nombreux. Avant d’être acheté, un produit passe par 13 intermédiaires en moyenne contre 5 dans l’Hexagone.
Bien que la date ne soit pas fixée, la préfecture a assuré qu’il y aurait une troisième table ronde.
Laurianne Nomel