À la veille du congrès convoqué par les élus de Martinique, une exigence s’impose : ne pas réduire ce rendez-vous à une discussion institutionnelle entre responsables politiques. Le choix d’un avenir collectif engage bien plus large : les forces sociales, syndicales et économiques doivent être présentes. Sinon, le congrès ne serait qu’un huis clos sans ancrage dans la réalité des Martiniquais.
La politique n’est qu’une partie du jeu
La Collectivité Territoriale de Martinique, son Assemblée et son Conseil exécutif incarnent le cœur du pouvoir politique. Le Conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation, tout comme l’Association des maires, représentent d’autres formes de légitimité. Mais ces institutions ne peuvent prétendre suffire. Le territoire a appris, au fil de ses crises, que la légitimité politique s’épuise vite si elle n’est pas relayée par des forces sociales et citoyennes.
Les syndicats comme baromètre social
Les grandes centrales syndicales martiniquaises – CGTM, CDMT, CSTM, UGTM, USAM – ne sont pas seulement des contre-pouvoirs. Elles sont la mémoire des luttes sociales et le baromètre des fractures qui traversent la population. Leur absence viderait de sa substance tout projet de réforme, car aucune évolution institutionnelle ne peut se concevoir sans l’exigence de justice sociale et sans garanties concrètes pour l’emploi et les protections collectives.
Le poids décisif du monde économique
Il serait tout aussi illusoire d’ignorer les forces économiques. Les assemblées consulaires – Chambre de commerce et d’industrie, Chambre de métiers et de l’artisanat, Chambre d’agriculture – structurent les filières productives. Mais ce sont aussi les grands groupes privés qui façonnent la réalité quotidienne de l’île. GBH, Despointes, Parfait, pour ne citer que ceux-là, autant de noms qui concentrent l’essentiel de l’emploi privé et de la distribution. Leur capacité d’investissement, leur poids sur les prix et leur rôle dans la formation des compétences font d’eux des acteurs incontournables du destin collectif.
Construire un consensus réel
Le Congrès ne doit pas être une affaire des seuls élus. Le congrès des élus ne doit pas devenir une scène d’apparat. S’il ne s’accompagne pas d’un dialogue élargi avec les syndicats, les chambres consulaires, les grands groupes économiques et les forces citoyennes, il restera comme les précédents, lettre morte. L’avenir institutionnel de la Martinique exige un consensus large, à la mesure des défis : chômage massif, vie chère, dépendance économique. Faute de quoi, la réforme sera perçue une fois de plus comme une affaire d’appareils, déconnectée du vécu des Martiniquais.