La Martinique traverse une crise, où se combinent chômage élevé, pauvreté persistante, déclin démographique et dépendance accrue aux transferts extérieurs. Les données ci-dessous le prouvent.
Emploi et économie
Le chômage reste structurellement élevé : entre 12 et 12,8 % en 2024-2025, soit presque le double de la moyenne hexagonale, et 31 % chez les jeunes. Près de la moitié des demandeurs d’emploi sont inscrits depuis plus d’un an. Le PIB par habitant plafonne autour de 19 000 € (contre plus de 34 000 € en France), tandis que le taux de couverture des importations par les exportations reste inférieur à 10 %, révélant une économie très dépendante de l’extérieur. Le tissu économique est dominé par le tertiaire (près de 80 % de l’activité), avec une base industrielle quasi inexistante.
Démographie et société
La population s’élève à 355 500 habitants en 2025 mais recule de 0,7 % par an. L’âge médian atteint 47 ans et 31,5 % des Martiniquais ont déjà plus de 60 ans, faisant de l’île l’une des régions les plus vieillies de France. L’indice de fécondité, à 1,85 enfant par femme, reste insuffisant pour assurer le renouvellement des générations. Chaque année, environ 4 000 habitants quittent l’île, le plus souvent des jeunes diplômés qui ne reviennent pas après leurs études en France hexagonale.
Éducation et jeunesse
Le décrochage scolaire touche environ 12 % des jeunes de 16 à 25 ans. Seuls 38 % des élèves entrant en 6ᵉ obtiennent un diplôme de l’enseignement supérieur, contre près de 50 % dans l’Hexagone. Plus de la moitié des étudiants formés en dehors du territoire choisissent de ne pas revenir, accentuant la fuite des compétences.
Précarité et dépendance sociale
Près de 27 % des habitants vivent sous le seuil de pauvreté (contre 14 % en moyenne nationale). La situation est encore plus critique dans les familles monoparentales, qui représentent 42,4 % des foyers et dont 39 % vivent sous le seuil de pauvreté. La dépendance aux prestations sociales est massive : 57 % de la population perçoit au moins une aide de la CAF.
Santé et conditions de vie
Si l’espérance de vie est comparable à celle de l’Hexagone (78 ans pour les hommes, 84 pour les femmes), la prévalence des maladies chroniques est très élevée (diabète, hypertension, obésité). Le scandale du chlordécone touche encore près de 90 % de la population, avec des impacts reconnus sur la santé (cancers, maladies neurodégénératives). Le déficit de médecins spécialistes et le vieillissement du corps médical aggravent les difficultés d’accès aux soins.
Logement et urbanisme
Environ 28 % du parc résidentiel est constitué de logements sociaux, mais plus de 10 000 demandes restent en attente. Par ailleurs, plusieurs milliers de logements sont exposés à des risques naturels (inondations, glissements, submersion).
Sécurité et criminalité
Le taux d’homicide avoisine 7 pour 100 000 habitants en 2024 (contre 1,2 en France hexagonale), soit près de 20 homicides par an. Le territoire reste un point de passage majeur du trafic de stupéfiants entre l’Amérique du Sud et l’Europe, ce qui alimente directement la violence locale.
Une double fracture
Ces indicateurs mettent en lumière une double fracture :
– Économique et sociale : chômage massif, pauvreté persistante, dépendance aux transferts publics.
– Démographique et structurelle : population en déclin, vieillissement rapide, exode des jeunes diplômés.
La Martinique se trouve ainsi fragilisée, prisonnière d’un modèle où l’initiative locale peine à émerger face au poids des dépendances extérieures.
Jean-Paul Blois



