Avec la profondeur et la mémoire qui le caractérisent, Henri Pied nous propose, dans cette chronique « An ti Pawol initil », une réflexion sur « notre » Caraïbe. À partir d’un simple tableau comparatif des salaires, il déroule le fil d’une histoire collective faite de combats, de sacrifices et de victoires.
Ce texte ci-dessous est à la fois un rappel nécessaire et un hommage à celles et ceux qui, hier, ont ouvert la voie aux avancées sociales dont nous bénéficions aujourd’hui.
Voici son texte
Philippe Pied
Ce matin, sur le site >> d’Antilla un tableau des salaires minimum dans quelques pays de « notre » région.
J’ai essayé de les replacer dans la grille ci-dessous…`
Au moment où l’actualité veut se focaliser sur la cherté de la vie, je trouve très utile de l’examiner et de l’estimer.
MAIS ce que, personnellement, je dois ajouter, c’est que…
… toutes les différences qu’on y trouve, en « faveur » de LA Martinique, sont étroitement dépendantes des corps à corps sans concession engagés par « nos ancêtres ».
—-
>> des esclaves au bal de 1802 à Césaire/Gratiant/Lamon/Duféal/ Saé H/Agasta, à Guy Cabort-Masson/à Sony Rupaire, à Daniel Blérald, à C-A Bissette, à Me Manville/
>> et aux leaders de cette grève (pour les 40 p 100) véritable grève fondatrice de bien de nos niveaux de vie actuels et dont tout le monde d’aujourd’hui s’en fout y compris du nom et de la personnalité de son leader (!!!)-,
>>aux engagés volontaires « pour défendre LA France en 1940/45» (au péril de leur vie) et pour ceux qui y sont morts – – et dont le sacrifice s’inscrit AU CREDIT DE NOTRE PEUPLE dans le grand livre de nos relations avec « la métropole…
>>et sans oublier aussi ceux qui, a Fort-de-France – en cette fin de guerre 39/45 qui ont chassé de notre pays le gouverneur représentant LA France Vichyste – libérant La MArtinque du Vichisme – et dont d’ailleurs, on l’oublie si souvent, que ces « révoltés » avaient à leur tête « un béké »…
>> et en premier lieu les autres (car il faut compter les choix stratégiques faits par nos mères, et ceux de nos pères qui ont su s’y associer) pour nous faire appréhender les armes du savoir…au bout desquels on trouve un Césaire, un Fanon, un Glissant (et j’en passe…)
Car ce sont leurs énergies, et leur silencieuse MAIS inflexible détermination, qui a placé leurs enfants « au bout du petit chemin » qui s’appelle conscience, identité, et responsabilité…
(à suivre…)
Commentaires de Philippe Pied
Les luttes historiques évoquées
Grève des fonctionnaires de 1953 — les fameux “40 %”
En 1953, une grève des fonctionnaires martiniquais a permis d’obtenir une augmentation salariale de 40 % par rapport à leurs homologues métropolitains, pour compenser le surcoût lié à l’insularité. Toutefois, cette avancée n’a pas concerné la population laborieuse hors fonction publique, qui restait dans une situation socio-économique difficile.
Les émeutes de décembre 1959 — “les Trois Glorieuses”
Le 20 décembre 1959, un incident banal (un accident entre un automobiliste métropolitain et un motocycliste martiniquais) a déclenché trois jours d’émeutes à Fort‑de‑France (les “Trois Glorieuses”). La répression policière fit plusieurs morts – Christian Marajo (15 ans), Julien Betzi (19 ans) et Edmond‑Eloï Véronique dit “Rosile” (20 ans) — un traumatisme durable pour la société martiniquaise. Cet épisode a mis en lumière le malaise social persistant et la fragilité des équilibres post-départementalisation.
Fusillade du Lamentin — mars 1961
En mars 1961, une grève ouvrière dans les plantations de l’île a abouti à une répression violente lors d’un rassemblement à Lamentin. La gendarmerie a ouvert le feu, tuant trois personnes : Suzanne Marie-Calixte, Alexandre Laurencine et Édouard Valide. Georges Gratiant, maire communiste du Lamentin, prononça alors un discours mémorable connu sous le nom des « trois tombes ».