À l’approche du Congrès des élu.e.s, il est facile de s’enfermer dans des affrontements stériles. Mais ce n’est pas l’essentiel.
L’essentiel, c’est que la Martinique ne crée toujours pas assez de richesse pour transformer durablement son avenir. Sans valeur produite en amont, il ne peut y avoir d’emplois solides, d’investissements massifs, ni de véritable progrès social.
Notre économie reste trop fragile. Le secteur privé ne joue pas encore pleinement son rôle de moteur, nous importons plus de 80 % de ce que nous consommons, la conquête de marchés tiers n’est pas un réflexe collectif, la population vieillit et une grande partie des actifs relève du secteur public.
Résultat : des prix élevés, peu d’économies d’échelle, un chômage persistant et près de 30 % de la population vivant sous le seuil de pauvreté.
Voilà ce qui devrait guider nos débats. Ni la nostalgie d’hier, ni la polémique d’aujourd’hui ne permettront de relever ces défis. Ce dont nous avons besoin, c’est de la capacité d’agir vite et de façon adaptée.
C’est tout le sens du pouvoir normatif. Il ne s’agit pas de rompre avec la République, mais de renforcer son efficacité en permettant à la Martinique d’ajuster les lois et règlements à ses réalités, à son environnement géographique et à ses priorités économiques et sociales. Aujourd’hui, l’article 73 de la Constitution nous enferme dans une mécanique d’habilitations longues, fragiles et temporaires, alors même que les crises économiques, climatiques, énergétiques, logistiques, sociales s’accélèrent.
Le vrai débat n’oppose pas « statu quo » et « autonomie ». Le vrai débat, c’est entre l’impuissance institutionnelle et l’audace pragmatique. Autrement dit, entre un système figé et une autonomie d’action dans la République, qui donnerait enfin à la Martinique la capacité d’assumer ses responsabilités et de répondre à ses défis.
Cette audace n’est ni rupture, ni repli. Elle est responsabilité. Elle est la capacité d’assumer pleinement nos compétences dans les domaines essentiels : fiscalité incitative et développement économique, agriculture et autonomie alimentaire, foncier et aménagement du territoire, transports, logistique et coopération régionale, énergie et transition écologique… Elle est le courage de bâtir une politique de développement pensée pour et depuis la Martinique, et non pas héritée de logiques anciennes.
Parce que le progrès ne viendra pas de ceux qui se contentent de leur zone de confort, ni de ceux qui prônent la rupture à tout prix. Il viendra d’un leadership transformationnel, capable de mobiliser, d’inspirer et de dépasser les clivages pour bâtir une vision partagée. C’est cette audace collective pour innover, expérimenter, oser qui permettra enfin à la Martinique de convertir son poids géopolitique en prospérité économique et en justice sociale, au sein d’une République française forte de sa diversité.



