Après les propos liminaires de la matinée de mercredi, les élus du congrès sont passés au vote de la résolution. C’est après plusieurs heures d’intenses débats que les trois articles de la résolution ont été votés sous des applaudissements nourris tout comme les débats. Des débats autour des contours des résolutions. Chaque mot, chaque virgule ont été analysés et discutés.
Les élus ont annoncé que la Martinique doit devenir un pôle attractif caribéen. Le statu quo n’est plus possible selon eux. Cette résolution est avant tout un projet de société pas uniquement un projet économique. Didier Laguerre en sa qualité de rapporteur a expliqué que la Martinique évolue dans un cadre conçu ailleurs.
« Nos élus exécutent des lois prises ailleurs. Les habilitations sont rares et difficiles à obtenir ce qui conduit à l’inefficacité des politiques publiques. »
Cette résolution ouvre la possibilité d’édicter des lois adéquates au territoire. Notamment en matière de réforme fiscale. La réforme proposée s’appuie sur l’histoire de la revendication martiniquaise. Une vieille revendication datant de 1959 rappelle le maire de Fort-de-France.
Des domaines qui touchent à la vie quotidienne des Martiniquais
Le consensus sur la nécessité d’un pouvoir autonome normatif domicilié localement a donc été adopté à l’unanimité. Il permettra de domicilier des compétences nouvelles dans le domaine de l’agriculture, des finances, de l’assainissement, de gestion de l’eau potable ainsi que du transport soit des domaines qui touchent à la vie quotidienne des Martiniquais. Un véritable consensus a été trouvé entre autonomistes, indépendantistes et d’autres veulent rester dans le cadre actuel de la République française. « Nous ouvrons une négociation avec l’état et une construction collective avec la population martiniquaise.”

Parmi les experts venus pour aiguiller les élus, Ferdinand Mélin-Soucramanien, professeur de droit public à Bordeaux. Pour un congrès initialement prévu sur deux jours, les élus rassemblés en congrès n’auront eu besoin que d’une journée pour faire consensus.
« Le travail avait été très bien préparé par la commission ad hoc. Les discussions se sont concentrées sur des questions essentielles. »
Ferdinand Mélin-Soucramanien explique que chaque territoire situé outremer s’est constitué un statut et des pouvoirs qui lui sont propres : « La Martinique s’engage dans une voie originale mais s’il fallait comparer ce serait avec le système de la Corse. »
Une Nation et un Peuple martiniquais
Après de longues discussions, le congrès a donc voté à l’unanimité la résolution dont l’article premier : « Le congrès appelle de ses vœux la domiciliation d’un pouvoir normatif autonome en Martinique, condition d’une autonomie réelle dans la République permettant d’adapter et d’édicter des normes différentes du droit commun. »

Les notions de Nation et de Peuple martiniquais ont été retenues mais cela ne signifie pas de rupture avec la République française, assure le congrès. La résolution a abouti sur un cadre qui permettra de négocier avec le gouvernement.
La question de l’adhésion de la population a été centrale. Le souvenir de 2010 est encore vivace chez les politiques avec le refus des votants que la Martinique soit régie par l’article 74, soit une autonomie accrue.
« C’est un pas historique. Ma mission est accomplie », c’est ainsi qu’a conclu le président du conseil exécutif, Serge Letchimy. « C’est un combat de quarante ans. Au moins nous avons pris notre responsabilité. On va ouvrir de nouvelles perspectives. Il faut convaincre le peuple. Il faut leur dire de ne pas avoir peur. » En effet, il est prévu après les négociations avec le gouvernement de consulter les Martiniquais.
« Conformément à l’article 72-4 de la Constitution, aucun changement statutaire ne pourra intervenir sans l’accord du peuple martiniquais. Le projet de loi constitutionnelle sera donc soumis à la population dans le cadre d’un référendum »
à l’horizon 2026/2027.
Le prochain objectif est d’être prêt pour la date butoir du 31 décembre afin de formater la démarche juridique et constitutionnelle. « Mais in fine, ce sera le peuple qui tranchera. »
Laurianne Nomel



