À quelques jours de l’ouverture du Congrès des maires de France, les élus des territoires ultramarins se sont retrouvés à Paris à l’initiative de l’ACCD’OM afin de confronter leurs expériences et de porter ensemble des revendications communes. À mesure que les politiques publiques gagnent en complexité et que les contraintes budgétaires s’accentuent, ils alertent sur le décalage persistant entre les dispositifs nationaux et les besoins concrets des communes d’Outre-mer.
Le maire de La Plaine-des-Palmistes, à La Réunion, Johnny Payet, résume cette contradiction.
Les communes ultramarines bénéficient, comme celles de l’Hexagone, de financements étatiques et européens. Pourtant, l’accès réel à ces ressources demeure entravé par des conditions d’éligibilité et des normes qui ignorent les réalités locales. L’élu cite son cas : une commune de 7.000 habitants ayant pu investir 55 millions d’euros en cinq ans grâce à l’Europe, mais parfois pour des projets éloignés des priorités essentielles de sa population.
Ce paradoxe, fréquemment observé, nourrit le sentiment d’une bureaucratie centrale qui impose des choix plutôt qu’elle ne soutient les territoires.
Un même constat s’exprime du côté des Antilles. En Guadeloupe, Héric André, maire de Vieux-Fort, déplore un système de décision trop verticalisé, qui oblige les communes à solliciter l’État pour la moindre dérogation.
La question du statut des Outre-mer sert de toile de fond à cette critique récurrente : agir plus vite et plus efficacement supposerait, selon lui, une capacité décisionnelle accrue au niveau local.
L’ACCD’OM pointe également une faiblesse structurelle entravant la conception des politiques publiques : l’insuffisance de données fiables. Qu’il s’agisse de la cartographie de la forêt guyanaise, absente des projets nationaux, ou du manque de données météorologiques dans les collectivités du Pacifique, les lacunes statistiques compliquent l’adaptation au changement climatique et l’anticipation des risques. Dans les Marquises, le maire d’Ua Pou, Joseph Kaiha, souligne l’urgence de mieux documenter les territoires littoraux particulièrement exposés. Météo-France a toutefois annoncé la livraison prochaine de projections climatiques spécifiques à chaque territoire ultramarin.
Si chaque territoire ultramarin vit des réalités distinctes, les élus s’accordent sur l’existence de problématiques communes : pression climatique, vieillissement de la population, éloignement géographique et dépendance accrue aux infrastructures nationales.
Ce sont précisément ces défis qui, selon Laetitia Malet, déléguée générale de l’ACCD’OM, pourraient inspirer les communes hexagonales confrontées désormais à des difficultés que les Outre-mer connaissent depuis longtemps.
L’ouverture du Congrès des maires, le 17 novembre, consacrera une journée entière aux Outre-mer, avec deux thèmes centraux : le changement climatique et la sécurité. Les élus espèrent que cette visibilité donnera une portée politique plus forte à leurs revendications, dans un contexte où l’équité territoriale demeure une exigence de plus en plus pressante.
JPB



