La plantation de l’estrée de Saint-Pierre qui a bien failli disparaître est la dernière marche d’un plan national d’action. Le plan a démarré il y a cinq ans. Aujourd’hui, la plante aux fleurs violettes a retrouvé son site historique à Saint-Pierre.
Le flanc d’un morne non loin du centre bourg de Saint-Pierre est devenu le refuge d’une plante qui a bien failli disparaître. L’estrée de Saint-Pierre a un nouveau chez elle.
Comme pour clôturer le mois d’octobre, le conservatoire a inauguré un chantier. Celui qui doit revoir l’estrée de Saint-Pierre dans son milieu naturel. Son nom l’indique, la plante vient de l’ancienne ville capitale, seul endroit connu où la plante a été répertoriée en Martinique. Tout comme la ville, l’estrée de Saint-Pierre en a connu les affres. Après l’éruption de la montagne Pelée en 1902, on la croit disparue jusque dans les années 1970 où les botanistes retrouvent sa trace. Pour assurer la pérennité de l’espèce, des graines sont alors envoyées au conservatoire national botanique. L’objectif étant de s’assurer d’avoir des graines en cas d’extinction naturelle. Or, le temps donnera raison aux précautions des botanistes. Au fur et à mesure des années, l’estrée de Saint-Pierre se raréfie pour être finalement déclarée éteinte à l’état naturel selon les scientifiques du laboratoire.

Un plan d’action dont le conservatoire botanique de Martinique est le pilote porte le projet de la réintroduction l’espèce dans son habitat d’origine à morne d’Orange à Saint-Pierre, tout près du point de vue. Mais il n’a pas suffi de creuser un trou et d’y planter une graine. La réimplantation de l’estrée a demandé une logistique ambitieuse. De nombreuses espèces exotiques envahissantes avaient pris place sur le morne. « On ne pouvait pas replanter l’espèce en l’état parce qu’il y a des espèces qui ne sont pas naturellement présentes en Martinique et qui ont été ramenées par l’Homme. Elles déséquilibrent le milieu puisqu’elles prennent la place de nos espèces martiniquaises », explique Irais Loiseau, chargée de mission animation des plans nationaux d’action au conservatoire botanique de Martinique.

Après avoir débarrassé le chantier des espèces envahissantes, les techniciens du conservatoire botanique ont replanté des espèces indigènes dans l’objectif de créer un écosystème équilibré pour réintroduire l’estrée de Saint-Pierre. 375 arbres ont été plantés. « Ce sont des espèces communes mais qui vont structurer le milieu pour qu’on puisse retrouver les fonctionnalités », précise Irais Loiseau. La plante a été mise en terre par placette et selon différentes modalités afin de comprendre son fonctionnement. « L’idée de base tient davantage à la réintroduction de l’espèce dans son milieu d’origine qu’à en tirer des données scientifiques. »
Aucun prochain chantier de réintroduction de l’estrée de Saint-Pierre n’est prévu. En effet, il s’agissait de ramener l’espèce dans sa station historique.
En revanche, dans une perspective plus expérimentale, l’estrée a été introduite ailleurs, toujours dans le nord Caraïbe, dans la commune du Carbet. « Cela s’est fait sur un site qui a une écologie différente de morne d’Orange avec quelques similitudes pour pouvoir comparer les deux populations. »
Ces opérations de réintroduction n’empêchent pas le conservatoire botanique de garder des graines d’estrée. « Nous avons toujours pour objectif de toujours avoir des stocks des espèces les plus en danger pour avoir de quoi recréer des populations en cas d’extinction. En l’occurrence, cette espèce fait l’objet d’un plan national d’action qui prévoit la constitution de stock ex-situ, en pépinière afin d’avoir des individus à disposition. »
Dans l’escarcelle du conservatoire botanique de Martinique, ne se trouvaient pas que des graines d’estrée de Saint-Pierre. Bien des espèces endémiques strictes sont menacées d’extinction. La liane à barrique a déjà été réintroduite au Carbet. On peut l’apercevoir au bord de route en allant vers Bellefontaine. « Il y a énormément d’espèces rares et menacées dans le territoire sur lesquelles on aimerait faire des projets. »
Laurianne Nomel



