Le Sénat a adopté un amendement visant à inscrire dans le projet de loi de finances (PLF) 2026 la mise à 0 % du taux de TVA sur les produits de première nécessité en Guadeloupe, en Martinique et à La Réunion. Cette décision marque une étape importante dans la lutte contre la vie chère, mais la mesure n’est pas encore définitive : elle doit encore franchir l’ensemble des étapes de la navette budgétaire avant de pouvoir entrer en vigueur.
Contenu de la mesure adoptée
Les sénateurs ont approuvé un amendement défendu par la socialiste Audrey Bélim afin de fixer dans la loi la suppression de la TVA sur une liste de produits considérés comme essentiels. Plutôt que de dépendre d’un simple arrêté ministériel, le texte inscrit la mesure dans le PLF, ce qui la rend plus solide juridiquement et politiquement.
La liste des produits concernés renvoie à celle prévue par le code de commerce dans son article L. 410-5, qui définit le panier des produits de première nécessité. Un mécanisme de contrôle est prévu pour s’assurer que les distributeurs répercutent effectivement cette exonération sur les prix affichés aux consommateurs.
Cette mesure prolonge un dispositif déjà existant : la TVA à 0 % sur certains produits était en vigueur jusqu’à fin 2027 en Guadeloupe et en Martinique. Le vote du Sénat vise à étendre ce régime à La Réunion, tout en inscrivant la mesure dans la loi de finances, ce qui permettrait de lui donner une portée plus pérenne. L’objectif affiché est de répondre aux écarts de prix particulièrement élevés dans les Outre-mer, où certaines denrées alimentaires coûtent jusqu’à 40 % plus cher que dans l’Hexagone.
Contexte politique et réactions du gouvernement
Quelques jours avant le vote sénatorial, la ministre des Outre-mer Naïma Moutchou avait annoncé à La Réunion qu’un arrêté ministériel serait signé avant la fin de l’année pour supprimer la TVA sur les produits essentiels. Pour le gouvernement, le droit en vigueur permet déjà d’agir sans passer par la loi, ce qui explique son opposition à l’amendement.
Le débat est intervenu dans un contexte d’incertitude politique, marqué par le report de l’examen du projet de loi contre la vie chère à l’Assemblée nationale. Ce report, officiellement présenté comme un temps de maturation supplémentaire, a été critiqué par plusieurs élus ultramarins, qui déplorent l’absence de date ou de perspective précise pour la suite du texte. Pour eux, l’amendement adopté est une manière de sécuriser un engagement que le gouvernement semblait vouloir mettre en œuvre uniquement par voie réglementaire.
Portée, contraintes et limites
Sur le plan financier, la suppression de la TVA représente un coût non négligeable pour l’État, ce qui a conduit le rapporteur général du budget et plusieurs membres du gouvernement à exprimer leurs réserves. Dans le même temps, l’exécutif est revenu sur deux autres réformes envisagées dans le PLF 2026 : la modification des exonérations de cotisations patronales (Lodéom) et l’évolution du régime de défiscalisation des investissements productifs. Ces reculs témoignent de la difficulté à mener des réformes sensibles dans un contexte budgétaire contraint.
À ce stade, les dispositions votées par le Sénat ne sont pas encore effectives. Elles doivent être examinées par l’Assemblée nationale, éventuellement retravaillées en commission mixte paritaire, puis confirmées dans la version finale du PLF. Ce n’est qu’en cas d’adoption définitive du texte, et après un éventuel contrôle constitutionnel, que la TVA pourrait être ramenée à 0 % à partir du 1er janvier 2026 dans les trois départements concernés.
La mesure serait alors appliquée aux produits de première nécessité définis par la réglementation, avec la promesse de diminuer rapidement les prix et d’apporter un soulagement concret au pouvoir d’achat des habitants de Guadeloupe, de Martinique et de La Réunion. Sa réussite dépendra toutefois du contrôle de la bonne répercussion de la baisse fiscale sur les prix finaux, dans un contexte de forte concentration commerciale et de tensions persistantes sur les importations.



