Le nombre d’accidents du travail reste préoccupant en Martinique, malgré les campagnes de prévention et la modernisation des dispositifs de sécurité. Les secteurs du BTP, du transport et de la santé figurent parmi les plus exposés. Entre réalité sociale et vigilance institutionnelle, état des lieux d’un enjeu souvent sous-estimé.
Une réalité préoccupante
Selon les derniers chiffres publiés par la Direction de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DEETS), la Martinique a enregistré plus de 21 000 accidents du travail entre 2018 et 2022, dont 18 mortels. Le bâtiment et les travaux publics (BTP) concentrent à eux seuls 12 % des accidents recensés et une proportion importante des cas graves liés aux chutes de hauteur, première cause d’accident grave sur l’île.
Des secteurs sous tension
La majorité des accidents se produisent dans le BTP, les activités portuaires et de transport, ainsi que dans les services hospitaliers et médico-sociaux. Dans le bâtiment, la chute de hauteur reste la principale cause d’accident (près de 17 % des cas). Les agents de manutention, aides-soignants, chauffeurs et artisans figurent parmi les catégories professionnelles les plus vulnérables.
Une sinistralité plus forte qu’en Hexagone
À population active comparable, la Martinique présente un taux d’accidents du travail supérieur à la moyenne nationale. Alors qu’en France hexagonale le taux de fréquence tourne autour de 33 accidents pour 1 000 salariés, il dépasse 40 pour 1 000 en Martinique selon les dernières estimations de la CGSS. Les accidents mortels y sont également proportionnellement plus nombreux : les 18 décès enregistrés entre 2018 et 2022 représentent un taux de 0,8 mort pour 10 000 salariés, contre 0,5 en métropole.
Les obligations et démarches en cas d’accident
En Martinique comme ailleurs, la déclaration d’accident du travail (DAT) doit être effectuée par l’employeur dans un délai de 48 heures à compter du moment où il en a connaissance. Cette déclaration s’effectue via le portail officiel de la CGSS Martinique, qui gère également l’instruction du dossier et la reconnaissance du caractère professionnel de l’accident. En cas d’arrêt temporaire, les indemnités journalières sont versées par la CGSS après vérification des conditions d’ouverture de droits.
Une prévention encore inégale
Malgré les campagnes de sensibilisation, la culture de la prévention reste insuffisamment ancrée dans certaines entreprises. La DEETS Martinique a lancé en 2024 une campagne de contrôle dans les chantiers de BTP et les entreprises de logistique afin d’imposer le document unique d’évaluation des risques (DUER) et la formation systématique du personnel. La CGSS Martinique, via sa Direction des Risques Professionnels (DRP), propose désormais un accompagnement gratuit pour la mise en place de plans de prévention et la gestion des cotisations AT/MP.
Les défis à venir
Trois défis majeurs demeurent : la formation continue des employeurs et salariés à la sécurité au travail, la modernisation des équipements de protection, et la remontée d’informations fiables pour mieux mesurer les risques et réduire la sous-déclaration des accidents.
En chiffres (Martinique – 2024)
| Indicateur | Valeur estimée |
| Accidents du travail recensés (2018-2022) | 21 648 |
| Accidents mortels | 18 |
| Part du BTP dans les accidents | 12 % |
| Salariés exposés à un risque d’accident | 49 % |
| Employés en contact avec des produits dangereux | 31 % |
| Délai de déclaration obligatoire (employeur) | 48 heures |
Vers une culture partagée de la sécurité
La Martinique dispose désormais d’un arsenal réglementaire et institutionnel équivalent à celui de l’Hexagone, mais les efforts de prévention, de contrôle et de sensibilisation doivent encore être renforcés. La priorité des prochaines années sera d’ancrer une véritable culture de la sécurité dans les entreprises et les administrations locales.
— Antilla / Rédaction Outremers360 — Octobre 2025



