“À force de diagnostiquer l’évidence, on oublie d’agir – et pendant ce temps, nos territoires piétinent.”
Encore un CIOM. Encore une promesse. Encore une stratégie à long terme. Encore un comité, une mission, un chantier de concertation. Et dans six mois, une déclinaison locale. Puis un bilan national. Puis une autre vague de réflexions. Puis une autre loi. Et toujours plus d’annonces, d’objectifs affichés et d’études financées. Il faut avoir le courage de poser la question qui dérange : combien cela va-t-il encore coûter à l’État ou à Nous ? Pas seulement en euros, mais aussi en confiance, en crédibilité, en attentes déçues.
Je pense qu’il est temps (N’est-il pas temps) de s’interroger sérieusement sur cette inflation de comités interministériels, de conférences publiques, de rapports et de feuilles de route. Ne sommes-nous pas encore et toujours en train de payer des diagnostics que tout le monde connaît déjà ? :
- La fracture territoriale ? Évidente.
- La vie chère ? Connue.
- L’inefficacité structurelle de certaines politiques publiques ? Diagnostiquée.
- L’exode des jeunes ? Chiffré.
Et pourtant, nous continuons d’accumuler les « consultations » et les « concertations » comme si nous découvrions à chaque fois la réalité.
Il est vrai que ce CIOM 2025 annonce des mesures : lois, décrets, projets d’investissements. Mais encore faut-il que les territoires les voient se matérialiser. Car l’histoire des Outre-mer est trop souvent celle de promesses tenues… sur le papier.
À quand des actes, des résultats visibles, mesurables, concrets ?
Et puis il y a ce théâtre politique que beaucoup ne veulent plus regarder. Certains de nos élus — prompts à dénoncer à la télévision ou sur les réseaux — sont absents des rendez-vous essentiels, trop occupés à cultiver un populisme de façade, ou à nourrir leur ego plus que leurs territoires. C’est une réalité qu’il faut oser dire.
Alors, la vraie question est là : Que veulent les Martiniquais ?
- Pas ce qu’on leur dit qu’ils veulent.
- Pas ce que décident les commissions parisiennes.
Non. Ce que nous voulons, ici.
- Voulons-nous continuer à entretenir une guerre sans fin contre un passé colonial que l’on ne peut ni oublier ni réécrire, mais qui ne peut plus être le prétexte permanent de l’inaction et du ressentiment ?
- Voulons-nous poursuivre la spirale des blocages, des grèves cycliques, des émeutes ?
- Voulons-nous demeurer dans une logique de revendication permanente sans jamais articuler une vision partagée ?
- Ou voulons-nous, enfin, vivre, pleinement et dignement, dans ce pays qui est – qu’on le veuille ou non – la France ? Avec ses hôpitaux, ses aides sociales, son droit du travail, ses services publics. Perfectibles, mais LÀ.
On ne bâtit pas un pays sur des conférences. On le bâtit sur des actes.
Sur une vérité qu’il faut dire :
-
Le but de l’entreprise n’est pas de nourrir ou de payer pour un peuple, mais de créer de la valeur, des emplois, du sens.
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Et le rôle d’un État n’est pas de promettre indéfiniment, mais d’assumer ses choix et ses responsabilités.
Nous sommes (des citoyens) français (carte d’identité, passeport, Sécu, RMI, impôts, Député.es, Sénatrices, Sénateurs, tribunaux, prisons etc.), (Oui ou Non ?), ou nous ne le sommes pas ?
C’est là la seule question que doivent se poser à la fois l’État et les Martiniquais. Et si la réponse est oui, alors il est urgent que cette continuité territoriale cesse d’être un slogan pour devenir une réalité. Pas dans dix ans.
Maintenant.
Philippe PIED