Jeudi 16 octobre 2025, le gouvernement de Sébastien Lecornu a affronté deux motions de censure successives à l’Assemblée nationale : l’une déposée par La France insoumise (LFI), l’autre par le Rassemblement national (RN). Si aucune des deux n’a entraîné la chute de l’exécutif, la journée a confirmé la fragilité politique d’un gouvernement privé de majorité absolue et cerné par une opposition plurielle.
Une première motion rejetée de justesse
La motion déposée par La France insoumise, soutenue par l’ensemble du groupe NUPES, a été rejetée de peu, avec 271 voix pour sur les 289 nécessaires à l’adoption d’une censure (sur 577 députés). Le texte a rassemblé un front inhabituel mêlant députés LFI, écologistes, communistes, du RN, de l’UDR, ainsi que plusieurs frondeurs socialistes, LR et indépendants. Selon le décompte final, sept élus socialistes, au moins un député Les Républicains et deux non-inscrits ont défié les consignes de leurs groupes en votant pour la censure.
« Il n’aura manqué que dix-huit voix pour mettre fin à ce gouvernement des inégalités », a réagi Mathilde Panot (LFI), dénonçant « les politiques cruelles annoncées dans le budget » et appelant à « ne pas se résigner ».
Le RN échoue à fédérer au-delà de son camp
Quelques heures plus tard, la seconde motion, portée par le Rassemblement national, a été rejetée sans suspense, avec seulement 144 voix pour. La gauche, soucieuse de ne pas s’associer à une initiative d’extrême droite, avait d’emblée annoncé qu’elle ne la soutiendrait pas. Seuls les députés RN et quelques non-inscrits y ont apporté leurs suffrages.
Une majorité relative sous tension
Ces deux votes successifs soulignent la fragilité structurelle du gouvernement Lecornu, déjà éprouvé par des négociations budgétaires tendues et une opinion publique morose. Le Premier ministre dispose d’une majorité relative reposant sur un fragile équilibre entre Renaissance, Horizons et le Modem, contraignant l’exécutif à rechercher des appuis au cas par cas.
« Le rejet de ces motions ne doit pas masquer l’ampleur de la contestation politique et sociale », confie un député Renaissance, reconnaissant que « chaque vote devient une épreuve ».
Des consignes contrastées et un climat d’incertitude
Au Parti socialiste, Olivier Faure avait demandé à ses troupes de ne pas voter la censure, privilégiant la stabilité institutionnelle à une coalition opportuniste. Du côté de Les Républicains, la direction a invité les députés à s’abstenir ou à voter contre, par crainte d’une dissolution de l’Assemblée nationale qui rebattrait les cartes.
Malgré sa victoire arithmétique, Sébastien Lecornu sort affaibli de cette séquence parlementaire, tant la défiance traverse l’hémicycle. Le gouvernement reste en place, mais son assise politique apparaît de plus en plus érodée, dans un climat où chaque texte budgétaire pourrait devenir une nouvelle épreuve de vérité.
Jean-Paul BLOIS