« Il y aura une augmentation de la performance sur le territoire car moins d’enfouissements et d’incinérations »

À partir du 1er janvier 2026, le casse-tête pour le tri des emballages sera moins contraint. Pot de yaourt, barquette en plastique, pot de crème fraîche, barquette de jambon et autres : direction le bac jaune. Philippe Moccand, directeur schéma industriel et Outre-mer Citeo, en dit plus sur les enjeux du tri dans le territoire.
Comment peut-on comparer le geste de tri en Martinique et dans l’Hexagone ?
En Hexagone, on trie à peu près entre 50 et 55 kg par an et par habitant. La Martinique a des performances de deux à trois fois inférieures à l’Hexagone. Cela s’explique par plusieurs phénomènes. Le geste de tri est peut-être moins systématique qu’outre atlantique. La collecte s’est mise en place beaucoup plus tardivement également que sur le territoire hexagonal. Elle date de 1992 alors que sur l’outre-mer, les premières collectes sélectives ont lieu à la Réunion en 2003. Il y a des infrastructures de tri qui sont à améliorer. C’est ce que nous essayons de faire avec l’intercommunalité pour améliorer le dispositif de collecte. Un autre élément important est de travailler sur la communication pour qu’auprès du Martiniquais, le geste de tri devienne systématique.
Il y aura un élargissement du tri en 2026. Pouvez-vous en dire plus ?
À partir du 1er janvier 2026, 100% du territoire français, outremer compris, aura un geste de tri qui sera plus simple. On se dit souvent que ce n’est pas simple de trier. On ne sait pas toujours où mettre tel ou tel emballage. La question ne se posera plus. L’ensemble des Martiniquais pourront mettre dans leur boîte jaune de tri tous les emballages et papiers. Il y aura une augmentation de la performance sur le territoire car moins d’enfouissements et d’incinération.
Les chiffres du tri progressent-ils dans le territoire ?
Si le constat était que les performances stagnent, ce serait problématique pour Citeo et toute son implication. Le geste de tri progresse. Nous sommes à 25kg d’emballage sur 2024. Cela correspond à une progression de 6%. Pour donner un ordre d’idée, au national, on progresse d’1%. Les outremers progressent plus vite. C’est bien mais il y a encore beaucoup à faire pour rattraper le retard. C’est en bonne voie.
Ne pas trier coûte-t-il au contribuable ?
Au-delà du coût, c’est surtout l’impact sur l’environnement. Par exemple, une bouteille en plastique, si elle est mise dans le bac jaune, elle redevient une bouteille en plastique. En revanche, si cette bouteille en plastique est jetée dans le bac gris avec les ordures ménagères, elle finit en enfouissement ou en incinération. Le contribuable paie une taxe sur les déchets qui correspond au coût du service. Si vous mettez dans le bac jaune, on verse des soutiens aux collectivités locales pour récompenser l’effort de tri et le recyclage.
Avez-vous des projets de réemploi en Martinique ?
Nous accompagnons sur plusieurs niveaux pour à la fois développer une stratégie pour limiter l’impact sur l’environnement des emballages. On essaie de travailler avec les industriels pour réduire la mise en marché d’emballage. Il y a de plus en plus d’emballages éco conçus, on observe également la réutilisation des emballages. Nous avons un projet sur le réemploi en Martinique. Les emballages seront lavés pour être reconditionnés. Dans les territoires ultramarins, c’est très important, étant des petits territoires insulaires et tournés vers la mer, l’impact est visible. Le réemploi peut être gratifié ou consigné. La consigne avait un peu disparu dans les territoires ultramarins mais elle revient. On le fait aussi dans l’Hexagone. On a lancé un énorme programme qui s’appelle reUse sur quatre régions. L’objectif est de déployer ce programme sur l’ensemble de la France. Dans ce cadre, en Martinique, nous accompagnons un porteur de projet, Nou ka viré, avec la CTM et l’Ademe pour faire émerger cette boucle locale.
En 2024, vous avez installé 289 bornes dans le territoire. En ressentez-vous les effets ?
Nous voulons collecter davantage d’emballages donc nous accompagnons des collectivités locales à mettre en place en finançant pour densifier le réseau et faire en sorte que chaque habitant de la Martinique puisse trouver un endroit pour trier y compris sur l’espace public. Du fait de l’insularité, il n’y a pas d’unité de recyclage en propre dans le territoire. Tous les emballages sont conditionnés et mis en balle sur le centre de tri de Martinique recyclage. Ensuite, nous expédions le tout par bateau vers l’Hexagone.
Comment allez-vous communiquer sur les nouvelles consignes de tri ?
Les collectivités transmettent les informations de tri qui indiquent les consignes par courrier et différents supports. Nous, on viendra, vers mars/avril pour faire de la communication télé radio affichage. Une campagne en langue créole sera dédiée aux Martiniquais pour sensibiliser au plus proche de la population associée au geste de tri.
Travaillez-vous avec les industriels ?
Nous agissons sur les citoyens et tout ce qu’on appelle ménager. Nous n’agissons pas encore sur les entreprises. Nous avons créé une filiale qui s’appelle Citeo pro à destination des professionnels mais il y va avoir un éco-organisme comme Citeo qui va se créer pour gérer les emballages des professionnels, pour inciter davantage à trier, à recycler. Cela devrait voir le jour à l’horizon 2026.
Propos recueillis par Laurianne Nomel



