Note de l’éditeur : L’ambassadeur Félix Grégoire représente la Dominique dans la mission d’observation en Guyane.
En réponse à une invitation du gouvernement de la République coopérative du Guyana, la Communauté des Caraïbes (CARICOM) a mis en place une mission d’observation électorale de la CARICOM (CEOM) composée de dix (10) membres pour observer les élections générales et régionales du 1er septembre 2025.
Les membres de la Mission étaient des experts électoraux des huit (8) États membres suivants :
Antigua-et-Barbuda, Bahamas, Belize, Dominique, Grenade, Sainte-Lucie, Suriname et Trinité-et-Tobago.
Le CEOM est chargé d’observer les préparatifs et le déroulement des élections.
Son mandat est de fournir une évaluation indépendante, impartiale et honnête de l’ensemble du processus électoral, en tenant compte de tous les facteurs susceptibles d’avoir un impact sur la crédibilité et la transparence globales des élections.
Le chef et le chef adjoint de mission, ainsi que les autres membres de l’équipe, sont arrivés au Guyana entre le 26 et le 28 août 2025. Le CEOM a consulté un large éventail de la société guyanaise. Parmi eux figuraient S.E. Dr Mohamed Irfaan Ali, président et chef du Parti progressiste du peuple/civique (PPP/C) ; des représentants de l’honorable Aubrey Norton, député, chef de l’opposition, d’A Partnership for National Unity (APNU) ; de We Invest in Nationhood (WIN) ; d’Alliance for Change (AFC) ; de l’Assemblée pour la liberté et la prospérité (ALP) et du Mouvement Forward Guyana (FGM).
Par ailleurs, l’équipe a participé à plusieurs réunions politiques afin de mieux comprendre le climat politique sur le terrain. Elle a également échangé avec le président de la Commission électorale du Guyana (GECOM) et le directeur général des élections, le commissaire de police, la Commission pour l’intégrité du Guyana, la Commission des relations ethniques, la Commission des femmes et de l’égalité des genres, la Commission nationale des personnes handicapées, les syndicats, le secteur privé et diverses institutions de la société civile, notamment la Société contre la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle, l’Association du barreau du Guyana, Transparency International Guyana, le Conseil de développement communautaire de Canje et le Conseil consultatif présidentiel de la jeunesse. L’équipe a également rencontré l’équipe technique des Nations Unies, des observateurs locaux et internationaux, ainsi que les ambassadeurs de la CARICOM résidant au Guyana. Ces réunions ont permis au CEOM de se faire une idée générale du climat et du niveau de préparation aux élections.
Période de campagne
D’après les informations issues des diverses consultations des parties prenantes et les reportages des médias, le message de la campagne était principalement axé sur les politiques publiques et le développement national. Cependant, la campagne a également été marquée par des attaques et des accusations personnelles. Cette dynamique reflète probablement l’importance des enjeux électoraux et l’évolution du paysage politique du Guyana, pays en développement. Nous n’avons reçu aucun signalement de violences électorales majeures pendant la campagne.
Déploiement des équipes
Le jour du scrutin, des membres de l’équipe ont été déployés pour observer les élections dans les régions 3, 4, 5, 6 et 10. L’équipe a visité trois cent vingt-quatre (324) bureaux de vote. Elle a également consulté les directeurs de scrutin, les directeurs de scrutin surnuméraires et les différents commandants régionaux de police.
Ouverture du scrutin
L’équipe d’observateurs s’est rendue dans les bureaux de vote avant l’ouverture du scrutin pour observer le déroulement du scrutin. La présence policière a été constatée dans tous les bureaux de vote. Le personnel électoral était présent et le matériel électoral nécessaire a été livré à temps, permettant ainsi l’ouverture des bureaux de vote dès 6 heures du matin. De nombreux électeurs sont arrivés juste avant l’ouverture du scrutin et beaucoup semblaient enthousiastes à l’idée de voter.
Le CEOM a été informé qu’un bureau de vote avait enregistré un retard, ouvrant à 6 h 40, en raison de la livraison tardive du bureau de vote. Cependant, ce retard ne semble pas avoir privé les électeurs de leur droit de vote, puisque tous les électeurs qui se sont présentés ont pu voter. L’équipe a constaté la présence d’au moins trois (3) agents politiques dans la plupart des bureaux de vote. Les avis et instructions requis aux électeurs étaient affichés, et le personnel du jour du scrutin a scrupuleusement suivi les procédures officielles d’ouverture du scrutin. Dans l’ensemble, les bureaux de vote visités ont ouvert à l’heure prévue, et les électeurs ont pu voter dans le calme et l’ordre.
Processus de vote
Dans les bureaux de vote visités, nous avons constaté que la plupart disposaient d’une liste électorale affichée permettant aux électeurs de vérifier leurs noms. Dans certains endroits où cette liste n’était pas affichée, certains électeurs ne savaient pas à quel bureau de vote ils étaient assignés. Le CEOM a constaté que cette situation était gérée efficacement grâce à la disponibilité d’agents d’information, équipés de tablettes ou de téléphones pour orienter les électeurs, et à la possibilité de scanner un code QR pour obtenir des instructions. Le personnel électoral s’est révélé adéquatement formé, courtois et serviable, en particulier envers les électeurs en situation de handicap. Il a guidé les électeurs avec constance et impartialité tout au long du processus. Bien que la participation électorale ait semblé faible pendant une grande partie de la journée, le personnel électoral est resté concentré sur ses tâches, veillant à ce que tous les électeurs admissibles qui se sont présentés puissent voter.
Le CEOM a constaté des incohérences dans l’emplacement des bureaux de vote. Bien que GECOM ait fourni un plan officiel des bureaux de vote, il semble que certains membres du personnel électoral aient pu avoir une interprétation différente des directives. Le CEOM a été informé que ces ajustements avaient été apportés à certains endroits afin d’empêcher la photographie des bulletins de vote, une politique de GECOM, même si les électeurs n’étaient pas autorisés à emporter leur téléphone dans les bureaux de vote. Malgré ces variations, le vote s’est généralement déroulé conformément aux procédures et directives définies par GECOM.
Le CEOM a également constaté que certains bureaux de vote n’étaient pas situés au rez-de-chaussée, ce qui représentait un défi pour les électeurs âgés et handicapés, un point important à prendre en compte pour la planification future.
Clôture du scrutin
La CEOM a observé la clôture du scrutin dans plusieurs bureaux de vote. Arrivée environ 30 minutes avant l’heure de fermeture prévue à 18 heures, l’équipe a constaté que la plupart des bureaux de vote étaient vides. À 18 heures, les présidents de bureau ont déclaré les bureaux de vote fermés. Dans les rares cas où des électeurs étaient encore en ligne, ils ont été autorisés à voter. La CEOM a conclu que la clôture du scrutin s’était déroulée conformément aux directives du GECOM.
Dépouillement des bulletins de vote
À l’issue du scrutin, les urnes ont été ouvertes en présence des représentants des partis politiques et des observateurs. Les bulletins ont ensuite été soigneusement dépouillés, en commençant par les bulletins des élections générales, puis immédiatement par ceux des élections régionales.
Une fois le décompte final approuvé par le personnel et les agents électoraux, les résultats ont été consignés sur le procès-verbal de dépouillement. Tous les partis présents ont signé le document, dont des copies ont été remises aux agents des partis politiques et affichées dans les bureaux de vote, comme requis. Le CEOM est convaincu que le personnel du jour du scrutin a respecté les procédures et directives de dépouillement du scrutin définies par le GECOM.
Tabulation des résultats
Après le dépouillement, les présidents de scrutin étaient chargés de transmettre l’original signé du procès-verbal au directeur de district ou au directeur surnuméraire du scrutin concerné pour dépouillement. Le CEOM note que le processus de dépouillement est toujours en cours. Il félicite le GECOM pour les modifications législatives apportées afin d’améliorer l’intégrité du processus de dépouillement, notamment la possibilité de transmission électronique et l’affichage public des procès-verbaux pour vérification. Ces mesures sont essentielles pour garantir la transparence et la responsabilité.
Observations et recommandations des parties prenantes
Sur la base de consultations, le CEOM a noté les observations et recommandations clés suivantes de la part de diverses parties prenantes :
Liste électorale : La plupart des parties prenantes ont exprimé une préoccupation majeure concernant la liste électorale, perçue comme « pléthorique ». La GECOM a indiqué que, bien que les Guyanais résidant à l’étranger ne soient pas inclus dans le recensement national, la loi n’autorise pas actuellement la Commission à rayer leur nom de la liste électorale, car ils conservent le droit légal de revenir et de voter.
Radiation des personnes décédées : Certains intervenants ont indiqué que des noms de personnes décédées figuraient toujours sur la liste électorale depuis les dernières élections. Le CEOM a été informé qu’outre le Bureau général de l’état civil, le ministère de la Santé et la Police sont désormais tenus de fournir au GECOM des informations sur les personnes décédées afin de faciliter leur radiation rapide de la liste électorale.
Biométrie : L’introduction de la biométrie a été soulignée comme un besoin urgent qui pourrait contribuer à atténuer le risque d’usurpation d’identité et de double vote.
Composition du GECOM : Des inquiétudes ont également été exprimées concernant la composition actuelle du GECOM. De nombreuses parties prenantes ont suggéré que des commissaires indépendants soient également nommés et qu’une limite de temps soit ajoutée à leur mandat.
Communication : Les parties prenantes, y compris les représentants des médias, ont signalé des difficultés persistantes à obtenir des informations en temps opportun de la part du GECOM, ce qui peut entraver leur capacité à fournir des informations précises et rapides au public.
Financement des campagnes : L’absence d’un cadre réglementaire clair pour le financement des campagnes électorales était également préoccupante. Les parties prenantes ont souligné la nécessité d’établir un tel cadre afin de garantir des conditions de concurrence plus équitables.
Impression générale et félicitations
Le CEOM estime que le jour du scrutin, les électeurs ont pu exercer leur droit de vote de manière pacifique et ordonnée, sans incident majeur. L’équipe n’a observé aucun signe d’intimidation, de harcèlement ou de campagne visant à influencer ou à entraver le processus démocratique.
Le personnel du bureau de vote a accompli sa mission avec professionnalisme et mérite d’être félicité. De même, la police a maintenu l’ordre public dans les bureaux de vote avec un professionnalisme exceptionnel dans ses interactions avec les électeurs et les différents acteurs politiques.
Nous tenons à féliciter la Commission électorale du Guyana, le directeur général des élections et l’ensemble du personnel électoral. Malgré les inquiétudes exprimées avant le jour du scrutin concernant une éventuelle pénurie de personnel, tous les bureaux de vote visités disposaient d’un effectif complet de personnel professionnel et courtois. Ils ont géré le processus avec efficacité, même si certains, notamment les présidents de bureaux, travaillaient pour la première fois.
Des félicitations sont également de mise aux partis politiques, à leurs agents, à leurs partisans et à tous les électeurs pour la manière pacifique et ordonnée dont ils se sont comportés le jour du scrutin.
Nous exhortons tous les Guyanais à rester calmes, pacifiques et patients en attendant les résultats officiels des élections générales et régionales. Les autorités compétentes doivent pouvoir exercer leurs fonctions avec rigueur et transparence. Aujourd’hui plus que jamais, les Guyanais doivent faire front commun et faire passer le pays avant tout. N’oubliez pas que la force de la nation réside dans son unité, sa résilience et son engagement envers le processus démocratique. L’intégrité de vos élections est essentielle à l’avenir du Guyana.
Conclusion
Nous sommes d’avis que la volonté du peuple guyanais sera acceptée et respectée.
Cette déclaration provisoire fournit une première évaluation fondée sur les observations de notre équipe. Un rapport final sera soumis au Secrétaire général de la CARICOM dans les prochaines semaines, présentant l’intégralité de nos conclusions et recommandations.
La CARICOM réaffirme son engagement à continuer de soutenir le parcours démocratique du Guyana et sa quête d’un avenir pacifique, unifié et prospère pour tous les Guyanais.
Le CEOM exprime sa sincère gratitude à toutes les personnes et organisations qui ont pris le temps de nous rencontrer. Nous exprimons également notre gratitude au Secrétaire général et au personnel du Secrétariat de la CARICOM pour leur soutien indéfectible à cette Mission.