Le 25 septembre, le Congrès des élus de Martinique se réunira pour examiner la possibilité d’un référendum sur l’acquisition d’un pouvoir normatif autonome. Derrière ces mots techniques se joue un enjeu fondamental : notre capacité à adapter la loi aux réalités martiniquaises, sans dépendre exclusivement de décisions prises à des milliers de kilomètres. Ce qui n’est que bon sens
Pourtant, à l’approche de ce rendez-vous, un danger devenu habituel guette : celui de transformer un débat de fond en une énième bataille politicienne, où les postures et la zizanie remplacent l’argumentation et l’écoute. Si tel serait le cas, nous passerions, une fois de plus, à côté de l’essentiel : décider ensemble, lucidement, du modèle institutionnel qui servira le mieux notre avenir.
Au-delà des clivages, la pédagogie
Le pouvoir normatif autonome ne signifie pas l’indépendance, ni nécessairement l’antichambre de celle-ci. Il permettrait, par exemple, d’adapter le code du travail aux spécificités de notre économie, de renforcer la lutte contre la vie chère, ou encore de concevoir des politiques agricoles alignées sur notre climat et nos cultures. En faveur de nos petits agriculteurs. Ces mesures n’ont rien de théorique : elles touchent directement au pouvoir d’achat, à l’emploi, à la qualité de vie.
Pour convaincre, il faut expliquer simplement et répondre aux peurs légitimes : aucune réforme ne doit fragiliser nos droits sociaux, ni réduire les aides de l’État.
Au contraire, il s’agit de gagner en efficacité et en réactivité, tout en sécurisant nos relations avec Paris et Bruxelles. Il faut aussi démontrer la plus grande efficacité dans la gestion du quotidien, dans les secteurs contrôlés localement.
Le consensus économique: gage de crédibilité
La réussite de cette démarche ne peut reposer uniquement sur un vote du Congrès des élus. Elle doit être accompagnée d’un consensus clair du monde économique : organisations patronales, chambres consulaires, syndicats de salariés et entrepreneurs doivent s’exprimer ensemble pour montrer que cette évolution est une opportunité et non une menace. Que les enjeux sont suffisamment importants pour mettre un temps de raison les guerres permanentes de tranchées qui ponctuent la vie de ce pays.
Car il ne suffit pas que les élus s’accordent entre eux. Ils doivent démontrer que le tissu économique, pilier de l’emploi et de l’investissement, est prêt à soutenir et à mettre en œuvre les adaptations rendues possibles par l’autonomie normative.
Faire de la politique autrement
Il est temps que nos représentants donnent l’exemple en sortant des rivalités personnelles et des logiques de clan. L’histoire retiendra moins les noms des signataires que la qualité du consensus obtenu. Si nous voulons que les Martiniquais votent en connaissance de cause, il faut leur présenter un projet clair, partagé et crédible — pas une bataille de slogans.
Le Congrès des élus et, peut-être demain, un référendum, ne sont pas des fins en soi. Ce sont des étapes vers une gouvernance qui assume ses responsabilités, rend des comptes et agit au plus près des besoins du pays. Pour cela, la seule voie est celle de l’unité dans la diversité, de la pédagogie et du dialogue avec tous les acteurs de la société. Sommes-nous mûrs pour cela?
Gérard Dorwling-Carter.