En matière pénale, deux principes structurent toute procédure : la présomption d’innocence, qui impose que nul n’est tenu pour coupable avant jugement, et le doute qui profite à l’accusé, qui exige que la condamnation repose sur des faits pleinement établis.
Un procès aux enjeux majeurs pour la Martinique
Serge Letchimy, président du conseil exécutif de la Collectivité territoriale de Martinique (CTM), Didier Laguerre, maire de Fort-de-France, et Yvon Pacquit, premier adjoint, sont jugés devant le tribunal correctionnel de Paris à partir d’aujourd’hui 17 novembre 2025. Le procès porte sur la procédure de départ à la retraite de Serge Letchimy en 2016, jugée irrégulière par la Chambre régionale des comptes et transmise au Parquet national financier. Trois audiences sont prévues : les 17, 19 et 20 novembre. L’affaire est suivie avec attention en Martinique en raison des conséquences politiques possibles pour le PPM.
Les accusations et les charges retenues
Serge Letchimy :
Détournement de fonds publics : perception de plus de 200 000 euros via un dispositif jugé irrégulier est-il affirmé par plusieurs sources non officielles.
Emploi fictif : absence d’activité réelle en mairie.
Incompatibilité parlementaire : cumul d’une rémunération territoriale et du mandat de député, a-t-on pu lire dans le Canard enchaîné…
Les poursuites.
Didier Laguerre :
Complicité de détournement de fonds publics.
Complicité d’emploi fictif.
Mise en œuvre d’un dispositif de retraite jugé illégal.
Yvon Pacquit :
Complicité de détournement de fonds publics.
Complicité d’emploi fictif.
Rôle dans la validation administrative du dispositif.
Les trois prévenus encourent de lourdes peines d’emprisonnement, d’amende et des peines d’inéligibilité susceptibles d’entraîner la perte de leurs mandats politiques.
Les éléments constitutifs du dossier à charge
Les pièces versées au dossier proviennent des services administratifs de la mairie de Fort-de-France, de la Chambre régionale des comptes, des services du Parquet national financier, ainsi que des relevés bancaires et correspondances internes. Elles comprennent notamment :
Rapports de la Chambre régionale des comptes sur la procédure de retraite.
Bulletins de salaire, arrêtés de réintégration et ordres de paiement.
Relevés de virement et pièces comptables.
Procès-verbaux de réunions du conseil municipal.
Courriers et mails internes des services.
Témoignages d’agents municipaux.
Le cadre juridique de la réintégration des fonctionnaires élus
Les prévenus vont très certainement plaider que:
Un fonctionnaire élu député est placé en détachement mais conserve l’intégralité de ses droits à carrière et à retraite. La jurisprudence administrative admet la réintégration temporaire d’un fonctionnaire parlementaire pour liquider ses droits, à condition qu’il n’exerce aucune fonction administrative effective.
Le traitement versé dans cette situation correspond à une position statutaire et non à un salaire lié à une activité. Le dispositif indemnitaire au cœur du dossier existait depuis près de vingt ans et avait été appliqué à des centaines d’agents sans contestation formelle avant les observations de la Chambre régionale des comptes.
Le tribunal correctionnel devra apprécier la réalité des faits, la régularité du dispositif et l’existence éventuelle d’une intention frauduleuse.La décision reposera sur la preuve et les exigences du droit pénal, dans le respect absolu de la présomption d’innocence.
Gérard Dorwling-Carter



