Le nouveau Premier ministre, Sébastien Lecornu, a livré ses premières intentions dans une interview accordée à la presse régionale, dont France-Antilles et France-Guyane. Il y aborde le 49-3, la décentralisation, les retraites et surtout la question cruciale de la vie chère dans les Outre-mer.
Sébastien Lecornu veut incarner un Premier ministre de dialogue. Mais derrière les mots policés, l’ombre portée de la méthode Macron demeure : esquiver, temporiser, renvoyer à plus tard. Ses premières déclarations, accordées à la presse régionale, ne rassurent guère.
49-3 : le déni d’un aveu
« Je ne souhaite pas utiliser le 49-3, mais je ne peux pas dire jamais. » Cette pirouette résume tout : dénoncer la brutalité institutionnelle tout en gardant la matraque prête à l’emploi: Lecornu s’installe dans la continuité du macronisme, tout en feignant l’ouverture.
Décentralisation : la même chanson.
Un « acte de décentralisation de rupture » ? On connaît cette musique. Depuis quarante ans, chaque gouvernement promet la fin du millefeuille administratif. En réalité, c’est surtout l’État qui garde jalousement ses prérogatives, tandis que les collectivités étouffent sous la dépendance budgétaire. Pour les Outre-mer, où la question institutionnelle est cruciale, rien. Pas un mot sur la possibilité d’autonomie renforcée, ni sur les scénarios institutionnels débattus depuis des années. Lecornu parle de liberté locale, mais laisse les DOM dans le brouillard.
Retraites : l’immobilisme érigé en doctrine
Le statu quo est total : pas de suspension de la réforme Borne, pas de respiration sociale. Le Premier ministre se contente de renvoyer le débat à la présidentielle de 2027. Les syndicats apprécieront.
Vie chère Outre-mer : paroles faciles, réalités dures
C’est sur la vie chère que Lecornu croit marquer des points. Il salue le projet de loi Valls, qu’il dit « rêver d’avoir porté ». Mais les Outre-mer n’ont que faire des rêves des ministres : ils attendent des actes. La population paie ses produits 30 à 40 % plus cher qu’en métropole, le taux de pauvreté dépasse 30 %, et l’inflation alimentaire atteint des sommets. Face à cette urgence, le Premier ministre se contente d’un soutien rhétorique à un texte qu’il n’a même pas présenté. Et dont beaucoup ont monté les insuffisances.
Un Premier ministre déjà en sursis
Derrière la posture de dialogue, un constat très simple : Sébastien Lecornu n’avance aucune mesure nouvelle, aucun cap clair, aucune rupture véritable. Aux Outre-mer, on a déjà entendu trop de belles paroles pour y croire encore. Si le Premier ministre ne transforme pas rapidement ses promesses en décisions tangibles, son crédit s’évaporera aussi vite que celui de ses prédécesseurs. Mais on sait que pieds et poings liés par le contexte économique, politique et social, il ne peut rien faire.
Gérard Dorwling-Carter