la lutte contre la vie chère passe d’abord par l’activité et le travail, non par la fragilisation des outils qui les soutiennent.
Le ministère des Outre-mer soutient-il encore l’emploi et l’activité économique dans nos territoires ?
Pourquoi, alors que le Premier ministre s’était engagé à ne pas alourdir les charges des entreprises, le Gouvernement envisagerait-il des coupes massives dans les dispositifs spécifiques aux Outre-mer ? Et surtout, quelles seraient les conséquences d’un tel choc budgétaire sur l’emploi, la production locale et la cohésion sociale ?
C’est la série de questions soulevées par la Fédération des Entreprises des Outre-mer (FEDOM) et l’ensemble des organisations patronales ultramarines dans un courrier adressé le 8 août 2025 à Manuel Valls, ministre d’État, ministre des Outre-mer.
Une réduction inédite des soutiens à l’emploi et à l’investissement
Selon la FEDOM, le projet de budget 2026 inclurait des économies « hors de proportion avec les efforts demandés en métropole » sur deux piliers essentiels :
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La LODEOM sociale : principale aide à l’emploi dans les territoires ultramarins, qui pourrait être amputée de 150 à 350 millions d’euros par an, entraînant une hausse brutale du coût du travail et, par ricochet, des prix à la consommation.
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Les dispositifs fiscaux d’investissement : une réduction spécifique de 10 % des taux serait envisagée, y compris sur des régimes récents comme le taux majoré pour la reconstruction de la Nouvelle-Calédonie, affaiblissant directement la capacité d’investissement des PME locales.
Un contexte déjà fragilisé
Les chiffres sont parlants :
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Taux de chômage moyen supérieur à 14 % dans les DROM en 2024 (contre 7,4 % au national), avec plus de 30 % chez les jeunes de 15 à 24 ans.
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Progression inquiétante des défaillances d’entreprises depuis début 2025, selon l’IEDOM.
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Surcoûts permanents liés à l’éloignement, à la dépendance logistique et à l’exiguïté des marchés, reconnus par l’article 349 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.
Pour les signataires, ces coupes budgétaires agiraient comme un accélérateur de crise : destruction d’emplois, ralentissement de la production locale et aggravation de la vie chère.
Un sentiment de défiance renforcé
En parallèle, le projet de loi « lutte contre la vie chère » suscite de fortes inquiétudes. La baisse du seuil de revente à perte en Outre-mer, en excluant les frais d’approche, risquerait de favoriser les gros acteurs au détriment des petits distributeurs et de fragiliser encore la production locale. La FEDOM y voit une suradministration qui ignore les réalités économiques du terrain.
L’appel à une autre voie
Les organisations patronales demandent au ministère des Outre-mer :
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De reconsidérer les arbitrages du PLF et du PLFSS 2026.
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D’adopter une méthode de concertation alignée sur les échanges locaux.
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De placer l’emploi au cœur des priorités, avec des engagements programmatiques mesurables et stables.
Elles rappellent que la lutte contre la vie chère passe d’abord par l’activité et le travail, non par la fragilisation des outils qui les soutiennent.
À quelques mois du vote du budget, une question s’impose : la France est-elle prête à assumer les conséquences d’un désengagement massif vis-à-vis de ses territoires ultramarins ? Car derrière les chiffres et les dispositifs, c’est la vitalité économique, la cohésion sociale et même la souveraineté de la « France océanique » qui sont en jeu.
Philippe Pied
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