Emmanuel Macron expose les quatre piliers de la réforme de l’hôpital.

Face aux soignants de La Pitié-Salpêtrière ce vendredi matin, le chef de l’Etat a reconnu des efforts jusqu’à présent insuffisants pour réformer l’hôpital. Pour retrouver l’efficacité perdue, il a promis de revaloriser les soignants et de remettre la logique sanitaire au premier plan.
Emmanuel Macron avait annoncé fin mars à Mulhouse un plan massif pour l’hôpital . Il en a posé les premiers jalons en cette fin de semaine. Jeudi, le chef de l’Etat a discuté en visioconférence avec plusieurs grands médecins hospitaliers et une cadre de santé. Et vendredi, il a visité l’hôpital parisien de La Pitié -Salpêtrière. Il était accompagné du ministre de la Santé Olivier Véran, qui n’a pas caché son désir de réformer vite, affirmant en privé qu’il faut «battre le fer quand il est chaud».
Face aux soignants de La Pitié-Salpêtrière, Emmanuel Macron a reconnu avoir insuffisamment investi dans la réforme de l’hôpital. «On croyait qu’on était vraiment en train de changer les choses, que tout était réglé par les plans en cours», a-t-il raconté, rappelant l’augmentation des crédits, la fin de la baisse des tarifs hospitaliers. «C’est très cruel pour moi, a-t-il lâché, c’était une super stratégie, mais à faire dix ans plus tôt !». Une humilité de bon ton. Avant qu’il ne fasse cette déclaration, son hôte, le directeur de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, Martin Hirsch, venait d’évoquer la surdité du gouvernement face aux cris des hospitaliers. «Il y a un an, on me demandait à quel rythme je supprimais 6.000 emplois à l’Assistance publique », a-t-il rappelé. De même, la grève d’un an des urgences, qu’il interprétait comme «un signe avant-coureur» de crise, avait été taxée de «problème spécifique».
Une concertation la semaine prochaine
Emmanuel Macron a ensuite exposé les quatre piliers de sa stratégie de réforme.

D’abord, l’attractivité. «On va revaloriser les personnels médicaux et paramédicaux», en ouvrant une concertation «dès la semaine prochaine», a-t-il annoncé. Cette augmentation salariale s’ajouterait à la prime exceptionnelle dont le décret d’application a été publié ce vendredi. Il y aura également des passerelles professionnelles pour permettre aux carrières de progresser et des mesures contre la «précarité des débuts de carrière», qui n’est «pas tolérable», a-t-il ajouté.

Deuxième pilier, l’investissement. «On a fait un bougé qui ne parle à personne», a reconnu le Président. Le plan de sauvegarde annoncé en novembre n’a pas convaincu. La reprise de 10 milliards d’euros de dette hospitalière pour redonner de l’air aux établissements est aujourd’hui questionnée. «Est-ce le bon vecteur? On va le reprendre pour voir. Il faut revisiter le plan hôpital», explique-t-on dans l’entourage du chef de l’Etat.
Des tandems médecins-gestionnaires
Troisième pilier, «le pacte qu’on doit réussir, souplesse et innovation», pour retrouver l’efficacité perdue à l’hôpital et le sens de ce que l’on y accomplit. «Les catégories s’opposent quand l’une doit gérer la contrainte et la rareté des moyens», a diagnostiqué Emmanuel Macron, en promettant de revenir sur la gouvernance instaurée en 2009. La réforme Bachelot a donné tous les leviers de décision aux directeurs, reléguant la commission médicale d’établissement à un rôle consultatif. Le chef de l’Etat a promis des «tandems», et «un système beaucoup plus déconcentré».
Lors de la visioconférence avec les hospitaliers, jeudi, les participants sont tombés d’accord sur le fait que l’efficacité retrouvée de l’hôpital durant la crise tenait en grande partie au retour de la collégialité, avec une seule boussole, le soin et non le budget.
A terme, les soignants devront assumer plus de responsabilités. «On a fait un mauvais deal il y a une quinzaine d’années», a déclaré le chef de l’Etat, en référence aux 35 heures à l’hôpital : la stabilité pour quelque uns, un temps de travail «prétendument protecteur»… et la «paupérisation» au bout du compte.
Partir des besoins des territoires
Enfin, quatrième pilier, l’approche par territoires. Pour la première fois pendant la crise du coronavirus, la chaîne du soin a été fluide entre les établissements publics et privés, les soins de ville et l’hôpital. Jeudi, les participants à la visioconférence ont tous dit qu’il fallait capitaliser sur cette avancée en développant de véritable «projets territoriaux de santé». Une idée déjà caressée par le gouvernement avec sa stratégie Ma Santé 2022. Toutefois la «responsabilité populationnelle» instaurée pour les soignants de ville s’est arrêtée aux portes de l’hôpital.
Comment faire pour que tous les soignants continuent à travailler ensemble, sur chaque territoire ? «Il faut partir d’une logique sanitaire et non plus d’une logique budgétaire», a exposé Emmanuel Macron vendredi. Le sujet n’est pas de savoir de combien de lits on a besoin, a-t-il poursuivi, mais d’évaluer «le temps de soin dont le patient va avoir besoin à l’hôpital et hors de l’hôpital».
Cette approche territoriale peut aller loin, jusqu’à repenser la construction de l’objectif de dépenses d’assurance maladie (Ondam), une enveloppe budgétaire nationale, alors que les besoins sont territoriaux. Votés au Parlement, ces crédits redescendent vers les établissements qui consomment le plus de soins et le plus de soins bien rémunérés, ce qui a tendance à fausser la mesure des besoins réels de la population.
La baisse de la part de tarification à l’activité a été enclenchée, pour parvenir à 50% des recettes hospitalières en 2022. Mais à la demande des soignants, cette réforme va être accélérée, a expliqué Emmanuel Macron jeudi. De même, des «coups d’accélérateurs»ont été promis sur la télémédecine, qui s’est révélée très efficace avec plus d’un million de consultations par semaine pendant le confinement, et sur les formations d’infirmières en pratique avancée, qui se sont ouvertes au compte-goutte, alors que les besoins sont immenses

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