La préfecture, l’Office français de l’immigration et de l’intégration et l’Adie se sont associés pour rendre hommage aux entrepreneurs primo arrivants sur le territoire. Au-delà, de la distinction d’un jury, ce sont des parcours de vie dans lesquels résonnent résilience et persévérance.
Ils sont six ce vendredi matin dans les locaux de la préfecture. Déjà présélectionnés, ils attendent chacun son tour de passer devant un jury. Pendant une dizaine de minutes, ils racontent leur parcours. Fadi, Andreina, Fraudy, Naomie, Natoya et Jacques. Tous ont des trajectoires de vies hors du commun. Ils sont tous entrepreneurs. Tous sont des primo arrivants sur le territoire français.
À l’issue de la délibération du jury, l’un des six prétendants saura s’il remportera le prix coup de cœur, lequel se verra remettre un chèque de 1500 euros. Les cinq autres n’auront pas perdu leur temps puisqu’ils repartiront avec une bonification de 500 euros. En attendant, tous les six sont assis dans la salle attenante à la salle d’examen.

Une épreuve anodine au regard de leur parcours. Avant de choisir la Martinique, ils ont fui la guerre en Syrie, la violence des gangs en Haïti, les violences conjugales à Sainte-Lucie. En arrivant en Martinique, sans ressource et sans emploi, ils décident de créer le leur. En partant de zéro ou en faisant fructifier leur connaissance. C’est le cas de Jacques Kemson, diplômé en maçonnerie en Haïti devenu entrepreneur dans le bâtiment. Ou celui d’Andreina Ramirez. Venue du Venezuela avec ses diplômes en esthétique, c’est dans ce domaine qu’elle persévère en arrivant en Martinique où elle exerce maintenant en tant qu’esthéticienne. Mais si depuis sept ans, Andreina Ramirez est en Martinique, c’est par amour. La Venezuelienne est installée aux Terres Sainville et s’est mariée en 2019 avec un Martiniquais.
Des parcours inspirants
Fadi Mallouhi, lui, a fui la guerre civile en Syrie. En 2015, il rejoint sa famille déjà installée en Martinique. Il doit tout recommencer de zéro. Après un parcours semé d’embûches, il gère aujourd’hui deux snacks spécialisés dans la restauration orientale.
Afin de se préparer à l’entretien oral, les candidats qui ne sont pas tous francophones, ont pu bénéficier du concours de l’Adie. Marthe-Hélène Vinsobre est bénévole. Elle a accompagné les six candidats. La bénévole a été marquée par leur abnégation.
« Les mots que j’en ai retenus c’est persévérance, la ténacité et la volonté d’avancer. Ce sont des parcours inspirants. Ils se battent au quotidien pour faire avancer leur marmite. »

Finalement, c’est sans conteste que le prix coup de cœur a été remis à Natoya Paul. C’est entre larmes et sourire que la mère de deux enfants a retracé son parcours devant le jury. Quitter sa Sainte-Lucie natale pour se mettre à l’abri des coups de son conjoint. Seule, prendre soin de ses deux enfants. Enchaîner les petits boulots dans la restauration. Aujourd’hui, Natoya Paul est aux commandes de son propre restaurant.
« J’ai pensé à toutes les personnes qui sont dans une situation irrégulière, des mamans solos en difficultés », raconte-t-elle.
Ce concours s’est déroulé sous l’égide de la préfecture et de l’Adie. Il vient en clôture de la semaine de l’intégration. Cette matinée de vendredi, visait à récompenser les porteurs de projets primo arrivants qui ont créé leur propre emploi. « L’idée, c’est de valoriser ces parcours qui sont exemplaires et qui permettent de créer de la richesse en Martinique », explique Jérôme Trinelle, directeur régional de l’Adie. L’organisme accompagne 1300 personnes par an en Martinique. « Ce sont des personnes qui n’ont pas accès à un crédit bancaire mais qui veulent créer leur propre emploi. 10% de notre public est composé de primo arrivants. » Trois critères ont été déterminants dans le choix des récipiendaires : la capacité d’adaptation, la débrouillardise et la motivation.
« Le but des politiques d’intégration est d’avoir une population qui s’intègre dans le territoire national et qui produit de la valeur ».
Ce jury coup de cœur durant la semaine de l’intégration était une première en Martinique. L’Adie espère pérenniser cette mise à l’honneur des entrepreneurs primo arrivants.
Laurianne Nomel