“Je me suis sentie exclue, comme je l’ai été toute ma vie”
Clara Diry a été couronnée Miss Bourgogne 2024 lors d’une cérémonie mémorable à Chevigny-Saint-Sauveur, en Côte-d’Or. Cependant, cette belle fête a été assombrie par un incident en coulisses.
Alors que l’ensemble des équipes se mobilisait pour rendre cette journée inoubliable pour toutes les candidates, trois d’entre elles — Issandre Roger, Naomi Saxemard et Candice Zeramdini — ont été confrontées à des difficultés de coiffure, devant s’occuper elles-mêmes de leurs cheveux texturés.
‘’Chaque année, c’est la même histoire’’
Dès son arrivée sur le site de l’élection, Issandre Roger, résignée, confiait : “Chaque année, c’est la même histoire, il y a un problème avec les cheveux afro. Je ne m’attendais pas à ce qu’un concours régional ait des coiffeurs capables de gérer nos types de cheveux. Cela m’a causé un stress énorme et je me suis sentie vraiment exclue. J’avais amené mes produits en raison de ce pressentiment, mais j’espérais tout de même qu’en 2024, des mesures auraient été prises.”
Après le maquillage, la candidate de 23 ans s’est rendue auprès de sa coiffeuse, qui s’est révélée incapable de s’occuper de ses cheveux. Dépitée, Issandre raconte : “La coiffeuse m’a dit : ‘Je ne sais pas comment coiffer tes cheveux, mais on a le matériel nécessaire.’ Je lui ai demandé un sèche-cheveux pour m’en sortir. Elle ne savait pas quoi faire, n’avait pas de solution prévue. C’est inacceptable.”
” Tout s’est effondré”
Pour Issandre, cette soirée était censée être un moment magique, mais rapidement, tout s’est effondré. “Nous avons pris du retard, ce qui a accru mon stress. À un moment donné, j’ai craqué. Comme lors des départementales à Miss Côte-d’Or, j’ai pleuré. En voyant toutes les autres candidates bénéficier de soins dignes de princesses pendant que je me débrouillais seule, cela m’a profondément affectée.”
Elle se souvient : “Je me suis dit ‘encore une fois’. J’ai ressenti une exclusion totale, un sentiment que j’ai connu toute ma vie.” Cette situation ne fait que raviver des blessures anciennes et met en lumière une problématique d’inclusion. Issandre, née à Chenôve et ayant grandi à Sennecey-lès-Dijon, a souvent été confrontée à des stéréotypes liés à sa couleur de peau : “J’ai été harcelée à ce sujet et j’ai toujours eu du mal à m’accepter. L’absence de structures adaptées pour nous, c’est un véritable coup de poignard à la légitimité que j’aspirais à avoir.”
‘’Apprendre à survivre »
L’expérience d’Issandre ne se limite pas à cet événement. Elle souligne que prendre soin de ses cheveux crépus est un véritable parcours du combattant au quotidien. “Les produits de beauté pour les personnes de couleur sont souvent plus chers. Pour les cheveux texturés, cela peut aller jusqu’à dix euros de plus.”
“Nous avons appris à survivre. C’est comme ça que j’ai toujours fonctionné : en cherchant des solutions et en m’adaptant”, déclare-t-elle. Cette expérience à Miss Bourgogne est devenue trop habituelle pour elle. Plutôt que de créer une scène, elle a choisi de sécher ses larmes et de se taire. “Je ne voulais pas faire de scandale”, confie-t-elle. “Après tant de discriminations, nous sommes épuisés de faire entendre notre voix, car nos souffrances sont souvent minimisées.”
Malgré ces difficultés, un coiffeur d’une ancienne Miss Bourgogne a eu la gentillesse de lui donner quelques conseils et de faire des retouches à son afro.
Le comité face à des préoccupations
Yves Roger, vice-président du comité Miss Bourgogne, a exprimé sa surprise, affirmant qu’il n’était pas au courant des problèmes de coiffure rencontrés par les candidates. De son côté, Naomi Bailly, Miss Bourgogne 2016 et déléguée régionale, a pris ce sujet au sérieux : “Je n’étais pas informée de cette situation. Je vais en discuter avec les candidates pour être plus attentif aux besoins spécifiques lors des prochaines éditions.”
Suite à la publication d’un article sur le site de France 3 Bourgogne, le comité a précisé que deux candidates, Naomi et Candice, se sont opposées à l’association de leurs noms à cette affaire, Candice affirmant qu’elle avait choisi de se coiffer elle-même.
Cet incident rappelle une situation similaire survenue en 2021, lorsque Ambre Andrieu, Miss Aquitaine, avait dénoncé le manque de coiffeuses pour cheveux crépus lors de l’élection Miss France, ce qui avait provoqué une polémique importante.




