Plénière CTM du lundi 21 décembre 2020 – Retrait dossier 64 sur le fi-
nancement des travaux à Séguineau : La politique de la terre brûlée

Tentative de bloquer le rétablissement de la canalisation  d’adduction d’eau potable de la Capot au Lorrain.
Ils ont osé. On se demandait si la coalition des défenseurs du propriétaire du terrain de Séguineau allaient oser em- pêcher le vote d’un plan de financement de travaux pour rétablir la canalisation de 80 mm proposée dans un rapport n°64 du conseil exécutif porté par Daniel Marie-Sainte.

Pourquoi un retrait et pas un vote négatif ?
En fait, ils n’ont pas voté contre après discussion. Ils ont voté en début de séance son retrait de l’ordre du jour. Pourquoi ? A notre avis à la fois pour que les élus n’aient pas une connais- sance précise de ce dossier qui présente beaucoup d’aspects techniques. En effet le tracé proposé diffère de celui où s’est produite la casse car le glissement de terrain continue sur cette parcelle et nécessiterait l’implantation de pieux entrainant un coût de 1,7 millions d’euros. La solution envisagée utilise une autre parcelle du terrain au-dessus de la première et le coût des travaux serait de 1 286 892,50 € HT.
D’autre part il ne fallait pas que le grand public connaisse au travers du débat les éléments d’une proposition permettant de régler au moindre coût la question de l’augmentation du débit de la fourniture d’eau, en particulier pour le centre et le sud du territoire.
Monplaisir : Un procès stalinien pathologique
Le premier à ouvrir le feu pour demander le retrait de ce dos- sier fut l’homme d’affaires Yan Monplaisir, leader de Ba Péyi-a An Chans, qui a lu un véritable réquisitoire contre le bilan de la mandature de la CTM sur le thème “ce n’est pas une question de
personne mais une question de méthode”. Un long argumentaire électoral accusant le président du conseil exécutif de “dictature par délégation”. Tout y passe. Citons par exemple :
– un président emmuré avec des “conseillers de l’ombre”, comme
si lui-même ou le président de l’Assemblée n’ont n’a pas de conseillers de l’ombre, discrets par nature ; sans parler des lobbyistes de son entourage.
– une gestion pratiquant un “régime autoritaire stalinien” et une “obsession pour le remboursement de la dette placé au-dessus des besoins immédiats du territoire” “comme le faisait le régime de Ceaucescu”. Là, l’obsession anti-communiste de classe et vis-
cérale reprend le dessus ; on sait où mène l’endettement ex- cessif : l’incapacité d’emprunter, l’augmentation des impôts, taxes et redevances, et, in fine, la mise sous tutelle de facto, comme à Fort-de-France.
– une gestion du personnel soi-disant “passéiste”, ce qui ignore le considérable défi d’une fusion de plus de 4 200 agents mal préparée et de deux institutions ayant des cultures administra- tives différentes ;
– un investissement pour le territoire qui serait caractérisé par “le manque d’ambition et de vision” (comme le répètent Hajjar
et Letchimy) ; ici la cécité devient pathologique au point de re- procher le temps mis à la réhabilitation de l’ex-maternité Victor Fouche transformée en bâtiment administratif pour les services techniques et qui vient d’être inaugurée. Demandons-lui si 467 millions de commande publique et plus de 663 millions d’euros de fonds européens en faveur du développement du territoire en 5 ans depuis 2016, ce n’est rien ;
– l’insuffisance de l’aide aux entreprises ; bien entendu ce bras- seur d’affaires feint d’ignorer que la CTM a consacré sur 2016/2020 à l’économie et à l’emploi 112 millions d’euros, 52,2 millions d’euros à l’agriculture-pêche, 68,8 millions d’euros au tourisme qui lui est si cher, etc ; etc, etc… ;
Monplaisir reprend la rengaine que le conseil exécutif aurait choisi la “bêtise” de dépenser 5 millions d’euros pour Ségui-
neau sur 18 mois, alors qu’il est proposé au dossier 64 qu’il de- mande de retirer une solution à 1,286 million sur 5 mois impliquant une servitude d’utilité publique évitant de subir le chantage de son protégé Bernard Bally. Pour lui, si la transac- tion avec Bally avait été payée, le problème aurait été réglé de- puis longtemps. Il taxe ceux qui refusent ce chantage de “judas”. Un vrai procès stalinien pour le coup.
Des “difficultés juridiques” au “dévoiement
de la démocratie”
Le président de l’Assemblée a présenté une argumentation qui se voulait fondée sur les “difficultés juridiques” occasionnées par le dossier et non sur le fond. La solution présentée serait une annulation implicite de la fameuse “délibération Lordinot” du 11 juin 2020 accordant 225 000 euros à Bernard Bally pour son terrain. Suit un cours de droit administratif sur les 3 moda- lités d’une annulation d’une délibération. Le plan de finance- ment énoncé ne s’appuierait pas sur un vrai projet de travaux de réparation. Pourtant la description des travaux était dans le rapport (cf. en encadré). Les documents annexés au rapport sont qualifiés “d’embrouillamini”. Or il s’agit de plans des tra- vaux. Il conclut, tout en soutenant encore ne pas entrer dans le fond du débat, que le dossier 64 est “une voie de dévoiement, un détournement de procédure et un détournement de démocratie”. Il accuse ceux qui veulent maintenir le dossier 64 de mépriser “l’Etat de droit” et avertit que si l’Assemblée adoptait les deux
délibérations proposées il les signerait en les assortissant des plus expresses réserves.
La démocratie par l’abus de procédure.
Il termine en affirmant que la dénonciation de “l’anticommu- nisme primaire” de Yan Monplaisir est une “invective”. Ainsi tra- vestir le fonctionnement actuel de la CTM en “régime autoritaire stalinien” et le comparer au “régime de Ceaucescu”, le dictateur
roumain, comme l’a craché Monplaisir ne seraient pas de l’an- ticommunisme de bas étage puisé dans l’arsenal de la pire réaction ? Et pourquoi pas comparer à Trujillo, Pinochet ou Ba- tista ? Quant à “l’Etat de droit”, en régime capitaliste et colo- nial, il recouvre souvent l’injustice, l’exploitation et la domination. Quid par exemple du code du travail grandement vidé de son sens par Hollande-Macron en y introduisant la flexi- bilité de l’emploi ? Ou de la libre circulation des marchandises, des capitaux et des hommes de l’Union européenne reprise par la France qui livre notre pays pieds et poings liés au capitalisme français et européen et à la prédation des Multinationales ?
Jean-Philippe Nilor : Indemniser tout le monde
par démagogie
Quant à Jean-Philippe Nilor, il a lui aussi affirmé qu’il considé- rait l’application de la délibération Lordinot comme intangible. Il a laborieusement tenté de démontrer que la solution présentée au rapport 64 enrichirait encore plus Bernard Bally. Il a déclaré que le Préfet en prenant un arrêté de servitude d’utilité publique se comportait en “gouverneur colonial”. Il a prétendu que faire passer la canalisation sous la rivière mettrait en danger la nappe phréatique et l’environnement. Il semble ignorer que toutes les options de travaux impliquaient de passer sous la ri- vière et que la Deal, chargée de la police de l’eau, avait donné son aval au projet du dossier 64. Il a été jusqu’à accuser Alfred Marie-Jeanne de “corruption” dans ses négociations avec Ber- nard Bally. Pratiquant la fuite en avant, le député du Sud a de- mandé que tous les propriétaires, gros et petits, soient indemnisés et que la CTM achète le terrain de Séguineau pour le distribuer aux petits agriculteurs. Surenchère démagogique, signe que la “maladie infantile du communisme” sévit encore. Finalement, après une demande de suspension de séance pour morigéner ses ouailles, il s’est prononcé pour le retrait du dossier 64.
Lordinot : Poursuite des recours
Quant à Lordinot, il a également longuement tenu le crachoir sur l’Etat de droit, le viol de la démocratie et a annoncé un nou- veau recours pour “excès de pouvoir” en cas de prise de l’arrêté de servitude ainsi qu’un référé suspensif. Autrement dit, la stra- tégie de la terre brûlée continuera. A relever qu’il s’en est pris à Johnny Hajjar, secrétaire général du PPM, qui avait annoncé qu’il voterait contre le retrait et l’a accusé de ne pas respecter “l’état de droit”. Il a même attaqué la mauvaise gestion finan- cière de Fort-de-France. Les masques tombent.
La vérité commande de dire que le rapport dont le simple exa- men a été refusé comportait la description précise des travaux et les plans de situation sur 4 annexes. La discussion aurait permis de donner des précisions.
Le plan de financement était détaillé :
– UE / FEDER-Mesure 6.2 613 847,72 € : 47,70% ;
– ETAT / FEI 257 378,50 € : 20,00% ;
– ODE 128 689,25 € : 10,00% ;
– CTM / Autofinancement 286 977,03 € 22,30% ;
TOTAL= 1 286 892,50 € : 100,00%
Le rapport 64 a été retiré par 25 voix pour, 18 voix contre et 5 abstentions. Ce n’est pas un triomphe pour ceux qui ont choisi la soumission au chantage de Séguineau. La CTM devrait donc puiser dans ses fonds propres pour financer les travaux au dé- triment d’autres actions. Donc ils ont osé.
Dans une lettre au commissaire enquêteur chargé par le Pré- fet d’instruire la décision d’instaurer une servitude d’utilité pu- blique, l’ancien Directeur général des services techniques du conseil général, Ingénieur général des Ponts et Chaussées, Christian de Joannis de Verclos, écrit notamment à propos du projet présenté par le PCE de la CTM : “Le tracé projeté permet
de s’affranchir significativement des zones de glissements affec- tant les terrains de la rive gauche de la rivière du Lorrain : il as- sure donc une sécurité raisonnable à la canalisation dont l’importance est majeure pour la Martinique. Il reste le seul réaliste, toutes les autres variantes imaginables se heurtant à des contraintes topographiques, géotechniques ou d’environnement (bâti notamment) insurmontables (…). Plus qu’un optimum, ce tracé s’avère en réalité le seul réaliste (…). En conclusion, je réi- tère mon avis extrêmement favorable à l’instauration de la servi- tude objet de la présente enquête, en l’assortissant de deux recommandations : déclarer l’urgence de la réalisation des travaux et réexaminer la licéité du versement antérieur d’une indemnité af- férente à l’ancien tracé”.
Sans commentaires.
Michel Branchi


Extraits du rapport 64 sur les travaux de Séguineau

(…) 1.2 – Description des travaux
Cette opération consiste à placer la canalisation (Ø 800 mm, 434 mètres de long) en dehors du grand glissement de 2012 (sauf extrémité EST sur une dizaine de mètres) selon le tracé suivant :
§ dans la parcelle D 1379 (Propriété de Monsieur Bernard Bally – Commune du Lorrain) sur une longueur de 245 mè- tres avec raccordement amont sur la canalisation existante juste en amont des raccordements des 4 canalisations pro- visoires existantes.
Ce tracé recoupe légèrement l’extrémité Est du glissement de 2012, où des faibles amplitudes de déplacement (< 5 centimètres) ont été observées sur la période 2009/2020. La canalisation sera équipée de deux raccords (de type GEOFLEX de Pont à Mousson – illustrations ci-dessous) à 2 rotules en fonte ductile (un en amont du glissement, l’au- tre en aval), coulissant, flexible et extensible, spécialement adaptés pour la protection des canalisations en cas d’évé- nements d’origine sismique ou géotechnique. Ce type de raccord, conçu selon la norme spécifique ISO 16134 « Conception de canalisations en fonte ductile résistant aux tremblements de terre et aux affaissements », permet des déflexions altimétriques (h) jusqu’à 60 cm, des déviations angulaires (θ) jusqu’à 30° et des possibilités d’extension / contraction (Lo) jusqu’à 40 cm.
– le long de la Route Nationale 1, dans l’emprise apparte- nant à la Collectivité Territoriale de Martinique) sur une lon- gueur de 98 mètres.
– dans le Domaine Public Fluvial (traversée de la Rivière du Lorrain) sur une longueur de 47 mètres.
– dans la parcelle OC 0200 (Propriété de Monsieur André Mangatal – Commune de Marigot) sur une longueur de 65 mètres avec raccordement aval sur la canalisation existante juste en aval des raccordements des 4 canalisations provisoires existantes. Monsieur André Mangatal a notifié à la Collectivité en date du 25 septembre 2020 son accord d’autorisation d’entreprendre des travaux.


 

 

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