Pollution de l’air à Paris, en 2016.

La France a été condamnée par le Conseil d’État à payer une amende de 10 millions d’euros, pour n’avoir pas réussi à abaisser les niveaux de pollution sous les normes sanitaires.

C’est une décision inédite : le Conseil d’État a décidé, ce mercredi 4 août, de sanctionner le gouvernement pour avoir échoué à ramener les niveaux de pollution de l’air en dessous des normes sanitaires. L’État est condamné à payer une astreinte de 10 millions d’euros, justifiée par « la gravité des conséquences en termes de santé publique » et « l’urgence qui en découle ». La pollution de l’air serait à l’origine de 48 000 à 100 000 décès prématurés par an en France. En moyenne, elle coûterait plus de 900 euros par personne chaque année. Jamais une astreinte aussi élevée n’a été infligée à l’État pour exécuter une décision prise par le juge administratif. Cette sanction pourra être renouvelée dans six mois si la décision n’est pas exécutée pleinement.

« C’est le résultat d’une mobilisation sans relâche des associations et citoyen·nes ! » s’est réjouie sur Twitter l’association Les Amis de la Terre. En 2015, c’est elle qui avait saisi la juridiction suprême pour contraindre l’État à appliquer la directive européenne de 2008 sur la qualité de l’air. En 2017, le Conseil d’État avait déjà sommé le gouvernement de ramener les concentrations en dioxyde d’azote (NO2) et en particules PM10 sous les valeurs limites « dans le délai le plus court possible ». Trois ans plus tard, des dépassements étaient toujours observés dans huit agglomérations — Paris, Marseille-Aix, Lyon, Strasbourg, Grenoble, Toulouse, Reims et Fort-de-France — et la haute juridiction a donné à l’État six mois pour agir, sous peine d’une astreinte de 10 millions d’euros par semestre de retard. Le gouvernement n’a pas pleinement exécuté la décision de 2020, des améliorations n’ayant été constatées qu’à Paris et Lyon, pour le NO2, en raison du confinement.

Une « décision qui fera date »

« Si des mesures ont été prises, le Conseil d’État estime aujourd’hui qu’elles ne permettront pas d’améliorer la situation dans le délai le plus court possible, car la mise en œuvre de certaines d’entre elles reste incertaine et leurs effets n’ont pas été évalués », a indiqué le Conseil d’État.

« Décision qui fera date ! a déclaré Julien Bayou, secrétaire national d’Europe Écologie-Les Verts (EELV). La santé des habitant·es n’ayant pas été une raison suffisante pour que le gouvernement agisse enfin contre la pollution… Espérons que l’argument financier le soit. »

Comme l’avait proposé le rapporteur public, le juge administratif a décidé de répartir la somme entre des organisations luttant contre la pollution de l’air. L’Agence de la transition écologique (Ademe) recevra 3,3 millions d’euros, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema) 2,5 millions d’euros, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) 2 millions d’euros et l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris) percevra 1 million d’euros.

Enfin, 1 %, soit 100 000 euros, seront réservés aux Amis de la Terre. La situation est assez cocasse, car la justice administrative enjoint à l’État de renflouer financièrement certaines de ses agences alors qu’il avait lui-même décidé de baisser leur budget.

« La pollution de l’air est un terrible fardeau », avait répété à plusieurs reprises le rapporteur public, au cours de l’audience du lundi 12 juillet. Une décision qui fera office d’électrochoc ?

 

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