Signé par les ministres des Affaires étrangères Olivier Nduhungirehe pour le Rwanda et Thérèse Kayikwamba Wagner pour la RDC, en présence du secrétaire d’État américain Marco Rubio, cet accord fait suite à un protocole d’entente signé à la mi-juin. Bien que ses termes détaillés restent confidentiels, le document exigerait notamment le désengagement, le désarmement et l’intégration sous conditions des groupes armés actifs dans la région, selon la BBC.
Une paix fragile mais présentée comme “historique”
Les précédentes tentatives de paix ont échoué, souvent rapidement. Pourtant, les autorités américaines et congolaises n’ont pas hésité à présenter ce nouvel accord comme un tournant. « Aujourd’hui, la violence et la destruction prennent fin, et toute la région ouvre un nouveau chapitre d’espoir et de possibilités », a déclaré le président américain Donald Trump, qui voit dans cette médiation une réussite diplomatique personnelle.
Le magazine Foreign Policy rappelle que le conflit a pour origine les conséquences du génocide de 1994 au Rwanda. L’afflux de miliciens hutu dans l’est congolais après le génocide a entraîné une spirale de violences, donnant lieu aux deux guerres du Congo et à une instabilité chronique, souvent exploitée par des acteurs extérieurs pour des intérêts économiques.
L’ombre du M23 et des groupes armés
La rébellion du M23, soutenue militairement par Kigali selon Kinshasa, a ravivé les tensions ces dernières années. Ce groupe armé s’est emparé de plusieurs grandes villes de l’est congolais, notamment Goma et Bukavu, entraînant d’importants déplacements de population. Le Rwanda, de son côté, affirme que sa présence militaire dans la région vise à contrer les FDLR, milice hutu accusée de préparer des attaques depuis le Congo, ce que la RDC conteste.
Le Qatar en médiateur discret, les États-Unis en investisseurs stratégiques
Selon Al-Jazeera, le Qatar a joué un rôle clé dans la facilitation des discussions, tandis que l’administration Trump a lié sa médiation à des contreparties économiques. Le retrait progressif des troupes rwandaises du territoire congolais devrait s’accompagner, selon les termes de l’accord, d’une coopération renforcée en matière de sécurité et de commerce. Le Financial Times révèle que Washington a obtenu des garanties sur l’accès à certaines ressources minières stratégiques, ouvrant la voie à des investissements massifs dans les mines et les infrastructures congolaises.
Des espoirs de paix… et de reconstruction
Pour la population congolaise, durement touchée par les violences, l’accord suscite autant d’espoir que de prudence. « Sur le terrain, les attentes sont immenses », rapporte Beto.cd, qui rappelle que des centaines de milliers de personnes ont été déplacées au cours de l’année 2025. Le gouvernement de Kinshasa a annoncé son intention de rediriger une partie de son budget militaire vers les services publics essentiels, notamment la santé, l’éducation et les infrastructures.
Mais la méfiance persiste. Les précédents accords, souvent sapés par des enjeux économiques souterrains, n’ont pas résisté à l’épreuve du temps. L’absence d’institutions régionales robustes pour assurer le suivi des engagements reste une faiblesse structurelle majeure.
Une diplomatie américaine aux intérêts bien compris
Cet accord illustre le style de diplomatie prôné par Donald Trump : direct, transactionnel et lié à des intérêts économiques. Le président américain, qui a réitéré son souhait de recevoir le prix Nobel de la paix, espère faire de cette initiative un levier d’influence dans la région des Grands Lacs – riche en cobalt, lithium et autres minerais essentiels à l’industrie technologique mondiale.
Reste à savoir si cette paix signée à Washington sera durable, ou si elle rejoindra la longue liste des accords avortés de l’histoire tourmentée de l’Afrique centrale.



