Source: Décision-Santé-Stratégie.

Audition Assemblée nationale/Gestion de la crise sanitaire

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PUBLIÉ LE 02/12/2021
Le président du Conseil scientifique était auditionné par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale sur la situation de la pandémie. Verbatim.
De gauche à droite : Simon Cauchemez, Jean-François Delfraissy

De gauche à droite : Simon Cauchemez, Jean-François Delfraissy
Crédit photo : capture écran vidéo Assemblée nationale

Ce virus est difficile. Il pose à chaque fois de nouvelles questions complexes. La cinquième vague a débuté dans les pays européens et de l’Est où le niveau de vaccination était plus faible que celui obtenu en France qui est moins touchée et plus tard que ces pays. Les pays du sud comme l’Espagne, le Portugal et l’Italie sont aussi moins impactés par la pandémie. La vaccination n’est pas le seul motif, il y a aussi les gestes de prévention (barrières) qui ont joué pour le meilleur sort de la France. La question centrale est la suivante : Est-ce que le haut niveau de vaccination aura une répercussion sur le niveau d’hospitalisation ?” Concernant les formes graves, l’efficacité du vaccin a été démontrée et s’amenuise avec le temps. En témoigne le nombre de cas de formes graves et de décès en forte baisse dans les Ehpad. Concernant l’action du vaccin sur la transmission, alors que les premières études montraient un niveau de réduction de 70 %, ce taux n’est que de 30 % au bout de six à sept mois. En cas de rappel (troisième dose), la réponse immunologique est boostée de manière très importante et multipliée par sept ou dix, aussi bien pour éviter les formes graves que les contaminations. Pour combien de temps cette protection est efficace ? On ne le sait pas encore. Pourquoi la troisième dose est-elle effectuée après cinq mois ? Parce que les études ont montré une diminution de la protection après ce délai chez les personnes âgées notamment. Les publics prioritaires à la troisième dose sont les plus de 50 ans et les personnes immunodéprimées.

Encore peu de connaissances sur le nouveau variant

Quant au variant Omicron, il a 30 mutations dans la protéine Spike. Nous n’en savons pas encore grand-chose. Il n’aurait pas d’impact particulier chez les personnes âgées, selon nos confrères sud-africains. Il provoquerait des atteintes plus fortes chez les enfants, mais attention, ce signal n’est pas confirmé. Est-il plus élevé que le delta ? Nous ne le savons pas encore. Que sait-on de l’impact des vaccins sur Omicron ? Les études observées montrent qu’il y aurait une perte d’efficacité des anticorps monoclonaux, en tout cas pour certains d’entre eux.

Antiviraux à action directe

Concernant les antiviraux à action directe, ils représentent une nouveauté dans l’arsenal dans la lutte contre la Covid. Ils devront être administrés de façon très précoce. Citons d’abord celui de Merck (molnupiravir) qui sera disponible avant la fin de la semaine en France. Il permet de réduire de façon extrêmement efficace le passage aux formes graves. Avec cette avancée thérapeutique, on pourrait avoir une stratégie Test and Treat, soit tester et de traiter immédiatement. Le mode d’administration est de 4 comprimés par jour pendant 5 jours. Le deuxième antiviral est un inhibiteur de protéase de Pfizer qui sera disponible à partir de janvier 2022 et qui réduirait de 70 à 80 % l’évolution vers une forme sévère. Il faudra savoir anticiper pour les commandes. Nouvelle question : ces antiviraux resteront-ils efficaces contre le nouveau variant ? Réponse : probablement oui, leur cible étant différente de la spike, ces deux médicaments seront aussi efficaces contre Omicron.

Omicron, baisse de la sensibilité au vaccin inconnue pour l’instant

Enfin, sur la sensibilisation du nouveau variant aux vaccins, nous sommes inquiets. Pourquoi ? Les mutations correspondent à des cibles de la production des anticorps induits par les vaccins. À l’inverse, la réponse immunitaire induite par les vaccins porte sur la réponse des lymphocytes B qui produisent des anticorps, mais aussi sur une réponse des lymphocytes T qui induit une réponse cellulaire plus difficile à mesurer. Et les cibles de la réponse cellulaire sont différentes de la réponse anticorps. Nous sommes d’avis que la réponse cellulaire sera en partie efficace contre Omicron. Bref, nous nous attendons raisonnablement à une diminution de la sensibilité et de la protection des vaccins sur ce variant. Mais nous ne savons pas à quel niveau cette baisse va se situer ? Nous le saurons dans les prochaines semaines.

Maintenir les gestes barrières

L’arrivée de ce variant se fera inéluctablement, mais va prendre plusieurs semaines avant son installation en France et en Europe. Nous avons connu la même chose avec le variant bêta (sud africain) en Lorraine mais qui avait été mis sous cloche par le variant alpha (anglais). En conséquence, il faut se donner dans ce délai les moyens dont le rappel vaccinal. Ce qui est déterminant, ce sont les mesures de protection. Une bonne gestion sur ce domaine peut avoir un impact important (15 %) sur le système des lits hospitaliers.

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