Nous n’allons pas vers une Troisième Guerre mondiale parce que l’Ukraine ne fait pas partie de l’Otan, la règle du “un pour tous, tous pour un” ne s’applique pas. 

Joe Biden a annoncé qu’il n’enverrait pas de troupes militaires en Ukraine et les pays alliés de l’Otan ne vont pas non plus intervenir. 

Par contre il pourra avoir une aide militaire, mais pas de troupes étrangères officielles en Ukraine. 

L’Europe piégée

Depuis la guerre d’Ukraine de 2014, la Russie aurait du  subir des sanctions. L’Europe ne les a pas imposées et a même accru sa dépendance, les exportations russes de pétrole, de gaz et de charbon qui constituent une source d’énergie principale  pour les consommateurs et les entreprises européennes. 

Pourtant l’annexion de la Crimée avait montré que la Russie n’était pas un allié fiable 

La dépendance à la Russie sur le plan énergétique ne se limite pas seulement au gaz naturel, mais aussi au pétrole (25 % du pétrole importé par l’Union européenne vient de la Russie) et au charbon. 

Le gaz naturel est une dépendance complexe à remplacer à terme, pourtant d’autres sources de pétrole ou de charbon existent sur le marché et sont transportables. 

L’électricité est aussi une dépendance européenne à la Russie.

 À la chute de l’URSS, les pays d’Europe centrale faisaient partie du réseau électrique soviétique. Mais aujourd’hui les systèmes de ces pays ont basculé vers le système européen.

 Les pays baltes, eux, ne l’ont pas encore fait, mais sont en train de le faire.

 L’Ukraine était sur lr point de réaliser cette opération durant l’attaque militaire russe du 24 février. 

De nombreux pays d’Europe centrale utilisent la  technologie nucléaire  de la Russie

En tant que fournisseur fiable de gaz, les Russes ont toujours assuré leurs livraisons même pendant les crises que pouvait traverser le pays et très pondérés lors  renégociations des contrats de prix gaziers depuis 2011. Beaucoup de contrats ont été faits sur le long terme. 

 Ce qui explique l’augmentation de la dépendance du gaz russe en Europe est que les événements comme la guerre en Crimée ou dans le Dombass n’ont pas atteint  l’image de la Russie pour le monde des d’affaires. 

La difficulté la plus importante est de savoir avec quoi on remplace le gaz. 

L’énergie renouvelable est intermittente et les solutions de stockage ne répondent pas au défi et le marché de l’hydrogène n’est pas encore né. 

Qui sortira gagnant de l’affaire?

Si les   finances englouties  dans la corruption, dans les opérations militaires et dans la propagande avaient été consacrées aux infrastructures, aux hôpitaux et aux écoles, le peuple russe s’en porterait mieux.

 La partie « invasion » de l’opération est la plus simple, mais ensuite tenir un pays conquis va générer des investissements importants :construire des infrastructures,

 mettre en place des dirigeants capables  et légitimes etc. 

L’Ukraine est en retard,  donc il faut faire un effort important de  développement du pays.

Dans un contexte où si les sanctions sont fortes elles pourraient atteindre aussi l’économie russe, notamment cette rente gazière et pétrolière.

 Pour l’Occident, l’impact économique sera plus limité. Les  exportations agricoles de l’Europe peuvent retrouver d’autres débouchés. 

Les principes  de sécurité, la liberté, les règles fondamentales du droit international et les valeurs de l’Europe doivent l’emporter sur les inconvénients économiques qui pourront toujours être compensés.

La Russie a certainement de quoi pouvoir résister aux sanctions. Toutefois, les banques russes coupées du système Swift, certains acteurs économiques russes recevant  des sanctions financières, cela peut devenir génant.  

Sur le plan diplomatique certains territoires en Russie, sont bien plus chinois que russes. La Russie voudrait-elle d’un système de relations internationales  où les Chinois pourraient s’emparer de son territoire ?

L’envahissement a affirmé le caractère indispensable de l’OTAN. Poutine l’a en quelque sorte ressuscitée de sa mort cérébrale dont parlait Emmanuel Macron !

Aujourd’hui, la Russie est devenue la première menace mondiale, un État qui commet des crimes de guerre sans aucune pudeur. 

L’Europe  sera-t-elle à la hauteur?

Vladimir Poutine après   la Tchétchénie et à partir de 2008,  le non-respect de l’engagement d’Obama dans  l’affaire syrienne, a compris que les Etats-Unis n’interviendront  plus dans la plupart des dossiers internationaux. 

Il a mis en place  une stratégie de retour au territoire impérial russe, avec l’invasion de divers territoires de l’ancienne URSS. 

D’autant plus que la défense européenne est confiée à l’OTAN, donc aux Etats-Unis, qui  ont signifié nettement  qu’ils n’interviendront pas sur le territoire ukrainien. 

 Vladimir Poutine eu le champ libre  pour annexer les deux “républiques populaires” de Donetsk et Lougansk et remettre en question les accords de Minsk (signés le 5 septembre 2014 par les représentants de l’Ukraine, de la Russie, de la République populaire de Donetsk (DNR) et de la République populaire de Lougansk (LNR) pour mettre fin à la guerre en Ukraine orientale.  Il a été signé sous les auspices de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). L’accord a mis en œuvre un cessez-le-feu immédiat. Cependant, l’accord a échoué dans son objectif de faire cesser tous les combats dans l’est de l’Ukraine)

L’Union européenne, aujourd’hui, doit se penser à l’organisation de sa politique étrangère et à sa sécurité. 

Le traité de Lisbonne lui permet de développer une politique étrangère européenne de défense mais avant, il est indispensable de passer à la majorité qualifiée sans quoi un seul Etat peut bloquer toute décision. 

Il faut créer une force critique en matière de politique étrangère et de sécurité qui puisse se faire respecter.

Les européens sont  la première puissance commerciale, la première puissance industrielle en bien à forte densité technologique au monde, la première puissance normative également. 

  Les débats publics nationaux sont concentrés sur la souveraineté et le repli national. Ce qui sert les  projets de  la Russie et de la Chine: une neutralisation de l’Europe et la création d’un nouvel axe fort Russie-Chine. 

 Des sanctions économiques sont nécessaires mais pas suffisantes. 

L’UE doit compléter le traité de Lisbonne par l’institution de la majorité qualifiée  pour passer à une politique étrangère, de sécurité et de défense commune, avec l’OTAN et mettre en place un processus de transition sans tarder. 

L’Europe va payer cher le prix de sa faiblesse. 

La Russie est une civilisation impérialiste, depuis le XVIème siècle, et Poutine souhaite  renouer avec cette puissance impériale. Kiev est le berceau de la religion, de la culture et de l’Histoire russes, commencées au IXème siècle avec la fondation de la Kievan’ Rus. 

Garder l’Ukraine dans le giron russe est indispensable pour la majorité des Russes ardemment patriotes pour lesquels l’Ukraine n’est pas un Etat, et les droits de l’Homme n’ont rien à voir dans l’affaire.  

la Russie a mal supporté deux révolutions contre deux régimes pro-russes en 2004 et en 2014. L’Ukraine s’est alors tournée vers l’Occident, l’UE, l’OTAN et les États-Unis, sans succès. 

Face au tiraillement ukrainien,  l’Europe ne s’est pas montrée à la hauteur. 

Les pays occidentaux ont pensé que la Russie et les nouvelles républiques issues de la dissolution de l’URSS étaient  sur le chemin, certes très chaotique, d’une démocratie libérale, selon la vision de la fin de l’Histoire de Fukuyama, en vogue à l’époque. 

L’erreur est d’avoir laissé se débrouiller seule la Russie d’Eltsine et même de Poutine à ses débuts, alors qu’il aurait fallu soutenir massivement cette évolution libérale inespérée de la Russie. Aucun soutien significatif n’est venu d’Europe alors que l’on préparait activement l’entrée des pays d’Europe centrale, puis orientale, dans l’OTAN et dans l’UE. 

Cette erreur  géopolitique a humilié les Russes et décrédibilisé les forces libérales et pro-occidentales. 

Au-delà de cette vacuité stratégique, l’Europe n’a pas les moyens de se faire respecter d’une Russie qui ne comprend que le rapport de forces. L’armée allemande est inexistante comme l’a déploré le chef de son armée de terre. L’armée française est rationnée et déjà au maximum de ses capacités de projection en se battant contre quelques milliers de Touaregs en sandales. L’Allemagne s’est rendue dépendante du gaz russe avec sa folle politique anti-nucléaire, malheureusement suivie par François Hollande et Emmanuel Macron. Poutine peut plonger l’Europe dans l’hiver russe s’il le décide.

 Quand la Russie a commencé à montrer ses muscles et ses ambitions de restauration impériale, en Moldavie, en Tchétchénie, en Georgie, puis en Ukraine, là encore l’Europe n’a rien fait ou presque. Les sanctions reviennent à se tirer une balle dans le pied. Que les Européens ne veuillent pas mourir pour l’Ukraine, ou pour quoi que ce soit d’autre d’ailleurs, est une évidence qui n’a pas échappé à Poutine. Mais pourquoi ne pas avoir donné aux Ukrainiens les moyens de se défendre ? Pourquoi vendre des armes à tous les régimes autocratiques du monde, mais pas à une démocratie européenne ? Cette coupable pusillanimité permet aujourd’hui à la Russie d’envahir l’Ukraine, risque qu’elle n’aurait peut-être pas couru si elle avait su qu’elle y rencontrerait une forte résistance. La Russie ne comprend que la force et l’Europe ne lui oppose que sa faiblesse. Un véritable encouragement à agir pour Poutine. Qui veut la paix prépare la guerre. Et pour l’avoir oublié, nous avons aujourd’hui la guerre et le déshonneur. 

En finir avec les illusions

Il faut éventer nos illusions pacifistes qui ont conduit la totalité des experts et des responsables politiques à penser que la Russie n’envahirait pas l’Ukraine. 

 Face à cette nouvelle réalité, il faut écouter ceux qui nous avertissent depuis longtemps que l’Histoire est tragique, les postures morales ne servent à rien car l’Occident n’a plus ni la volonté ni les moyens d’imposer son modèle démocratique et libéral, qu’il peine à respecter et à défendre sur son propre sol. Seule la « real politik », lucide, voire cynique, et les rapports de force nous permettront de défendre nos intérêts et la paix dans un monde redevenu dangereux. Il est urgent de s’en donner les moyens militaires, technologiques et industriels (autonomie stratégique, résilience, guerre de l’information, cyber sécurité, etc…), avec l’unité stratégique, l’agilité et l’indépendance qui assurent la vraie puissance. Et cesser de se payer de mots avec la chimère d’une défense européenne qui n’aura jamais aucune capacité de décision et d’action réelles, et donc aucune capacité d’influence et de dissuasion. 

Pour commencer, puisque nous n’avons pas la volonté de nous opposer à la détermination russe de recréer son espace historique, il nous faudra tôt ou tard renouer le dialogue avec la Russie, quand Poutine ne sera plus là, et trouver un terrain d’entente réaliste, pour éviter le pire. Je pleure pour mes amis ukrainiens, et je me sens coupable, car le drame qu’ils vivent est le prix qu’ils paient pour nos illusions et notre faiblesse. Nous aurions pu les aider, ainsi que les Russes, mais depuis quelques décennies nous avons à peine la force de nous soutenir nous-mêmes. Il est trop tard pour les Ukrainiens, mais espérons que leur sacrifice sera salutaire pour les européens et pour les Français. Une nouvelle ère s’ouvre, il nous appartient de décider si nous voulons la vivre en demeurant forts et libres, ou si nous voulons continuer de nous assoupir encore quelques temps dans nos rêves de confort à crédit. Un réveil rude peut parfois sonner le début d’une aube nouvelle. 

l’Europe va-t-elle enfin accepter de  sortir de « sa fin de l’histoire » ?

A trop privilégier les discours -totalement faux – sur la défense de ses soit disant valeurs, l’Europe s’est enfermée dans une bulle d’irréalisme quant aux rapports de force géopolitiques du 21eme siècle, oubliant ses intérêts. 

Quand  l’URSS est tombée,  en Europe bouleversant les régimes des pays de l’Est,

 Francis Fukuyama a alors théorisé « la fin de l’histoire » simplifiée à l’idée que la démocratie libérale et l’économie de marché vont prédominer  et que la guerre devient improbable. Une  fin entendue comme hégémonie occidentale,  enfermant l’Union européenne dans une bulle d’irréalisme. 

l’Histoire avec un grand « H » a continué son bonhomme de chemin et, de surcroît, devenant de plus en plus tragique du point de vue géopolitique. 

 L’ Europe a négligé la puissance militaire totalement aveugle quant à la transition post-communiste de l’URSS, en faisant fi du  sentiment de déclassement du plus grand pays du monde et en misant  sur la « démocratie et l’économie de marché » pour tout régler. 

La susceptibilité russe (surtout par rapport à sa zone considérée comme inviolable), l’agressivité qui en découle et le ressentiment envers l’Occident cet  comme adversaire hostile: l’Europe n’en a rien perçu, commettant des bévues telles que

l’élargissement de l’OTAN jusqu’aux frontières mêmes de la Russie en 2008 en y admettant  l’Ukraine et la Géorgie, faisant qur cinq mois plus tard, Moscou envahissait la Géorgie.

La reconnaissance du Kosovo par les pays occidentaux a également été perçue par la Russie comme une violation unilatérale de la stabilité des frontières et l’exemple du « deux poids, deux mesures » occidental. 

Finalement, l’accord d’association entre l’UE et l’Ukraine, qui sur le papier n’avait pas l’air déterminant,déclencha les révoltes de Maïdan (la révolution ukrainienne de 2014, également dénommée révolution de Maïdan, révolution de Février, ou révolution de la Dignité, a eu lieu entre le 18 et le 23 février 2014 à la suite de l’Euromaïdan.)

Gérard Dorwling-Carter. 

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