LUTTE CONTRE LA PANDÉMIE
68% de la population israélienne et 55% des Anglais auraient développé des anticorps contre le Covid-19. Ces données redonnent de l’espoir dans le cadre de la lutte contre la pandémie mais interrogent sur la notion d’immunité de groupe.
Atlantico : Plus de la moitié de la population anglaise a développé des anticorps anti-Covid selon le Bureau de la statistique nationale. En Israël, 68% de la population serait susceptible d’avoir des anticorps capables de combattre le virus. L’immunité de groupe est-elle en vue ?
Eric Billy : C’est encore trop tôt pour dire que l’immunité collective est proche en Angleterre. Une partie des chercheurs anglais incitent d’ailleurs à être prudents. On peut vraiment parler d’immunité collective quand 70-80% de la population a reçu le protocole vaccinal complet. En Angleterre, on est loin d’avoir vacciné à double dose 70-80% de la population. Le pays est en train d’expérimenter le mélange de vaccins. Ils ont fait le choix d’injecter un maximum de premières doses pour couvrir un maximum de personnes initialement. Il y a ce risque important d’avoir une immunité qui est incomplète.
Et en Israël ?
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Concernant Israël, on est plus proche d’une immunité collective. Le chiffre de 68% est né du calcul suivant : plus de la moitié (5,3 millions) des Israéliens ont été vaccinés et 830 000 personnes ont été testées positives pour le virus dans le passé, ce qui (théoriquement) devrait leur conférer une immunité naturelle mais c’est un peu rapide de dire que l’immunité est systématique quand on a contracté le virus. Avec la vaccination, on peut penser qu’ils vont arriver à 70% de la vaccination. Une nouvelle fois Israël va servir d’exemple. On va voir comment le pays va résister à la circulation d’autres variants en particulier le variant brésilien qui est suivi de près là-bas.
Ce qu’on sait, c’est que la chute des cas d’hospitalisations pour cas graves continue de baisser en Israël. Une grande partie de la population est vaccinée et le vaccin diminue très fortement le risque de transmettre le virus en étant peu ou pas symptomatique. Le temps au cours duquel une personne vaccinée pourrait être porteuse saine du virus est probablement très faible. Cette configuration fait que la diffusion du virus semble être bien contrée pour le moment. Mais ça ne prédit pas ce qui va se passer avec le variant brésilien (P1). Le changement de température ne semble pas être un problème pour le P1 qui a émergé en situation estivale à la différence du variant anglais.
Peut-on dire que la situation dans ces deux pays est encourageante ?
Oui, mais c’est à suivre. Il faut quand même se souvenir que Israël a vacciné essentiellement en vaccin Pfizer (ARNm). La comparaison qu’on tente parfois de construire avec l’Angleterre n’est pas évidente. L’Angleterre a fait des mélanges de vaccins et beaucoup de gens sont vaccinés avec le vaccin AstraZeneca pour lequel on a quand même beaucoup moins de recul. Par ailleurs, beaucoup n’ont reçu qu’une seule dose. Donc on ne sait pas encore à moyen terme quel va être le maintien et la persistance de l’immunité.
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A partir de quel seuil peut-on réellement dire qu’il y a immunité collective ? Ce seuil peut-il varier ?
L’immunité collective dépend de la contagiosité du virus. Par exemple, la rougeole a un R0 (taux de reproduction) très fort, entre 8 et 10. Quand la contagiosité est aussi élevée, on estime que l’immunité collective n’est atteinte que lorsque 90% de la population est protégée.
Il faut comprendre que l’immunité collective ne nous empêchera pas d’avoir des cas isolés. Elle nous empêche d’avoir une épidémie dans une population. Après, tout dépend de l’objectif qu’on veut atteindre.
De plus, avec les variants et le fait que la circulation virale continue d’être très forte dans certains endroits de la planète, il y a toujours le risque de créer des réservoirs de nouveaux variants qui pourraient présenter des échappements immunitaires. Il faudrait donc qu’on atteigne une immunité collective globale sur toute la planète.