Le président de la République avait promis de reconnaître une vérité incontestable sur le drame du 17 octobre 1961. Si des historiens appelaient le président de la République à reconnaître un «crime d’Etat», il n’est pas allé jusque-là.

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Emmanuel Macron a rendu hommage ce samedi aux victimes algériennes de la répression sanglante du 17 octobre 1961. AFP/Pool/RAFAEL YAGHOBZADEH

Par Ludwig Gallet et 

Anne Collin pour Le Parisien

 

L’instant se veut solennel. Et silencieux. Aucun bruit ou presque ne trahit l’arrivée d’Emmanuel Macron vers 16 heures ce samedi après-midi à Colombes (Hauts-de-Seine) au pied du pont de Bezons, éclairé par le soleil. Un lieu des plus symboliques et historiques puisque c’est notamment ici que furent repêchés plusieurs corps jetés dans la Seine, il y a soixante ans. Dans un contexte de très fortes tensions entre Paris et Alger, le président a dénoncé samedi les crimes commis lors de la répression sanglante d’une manifestation d’Algériens le 17 octobre 1961. Des crimes « inexcusables pour la République », perpétrés « sous l’autorité de Maurice Papon », alors préfet de police.

C’est la première fois qu’un président de la République participe à une cérémonie en mémoire des victimes algériennes de la répression sanglante qui a eu lieu à Paris il y a 60 ans. Le chef de l’État n’a pas pris la parole lors de son déplacement car l’instant, aussi, se veut intimiste. Seule une quarantaine d’invités sont présents. Parmi eux, des élus locaux, des représentants associatifs mais aussi cinq enfants et petits enfants de victimes de cette nuit du 16 octobre 1961.

Une large gerbe de fleurs bleu-blanc-rouge officielle du souvenir, ornée d’un ruban où l’on peut lire « Le président de la République » est déposée le long du fleuve. Le président reste de longues minutes debout, les mains jointes, en recueillement devant cette dernière.

« Les mots sont forts, mais insuffisants »

L’Élysée a opté pour un communiqué publié dans la foulée. « La répression fut brutale, violente, sanglante, peut-on lire. Près de 12 000 Algériens furent arrêtés et transférés dans des centres de tri au Stade de Coubertin, au Palais des sports et dans d’autres lieux. Outre de nombreux blessés, plusieurs dizaines furent tués, leurs corps jetés dans la Seine. De nombreuses familles n’ont jamais retrouvé la dépouille de leurs proches, disparus cette nuit-là. »

Ce récit, sans le moindre doute, dit la vérité. Mais dit-il toute la vérité ? « Les mots sont forts, mais ils sont insuffisants, tranche l’historien Gilles Manceron. On parle de crime, mais le préfet de police est le seul désigné. On ne parle pas de crime d’État, alors que les responsabilités sont à chercher jusqu’au plus haut sommet de l’État. L’ordre a été donné de réprimer les manifestants. » Après la cérémonie à Colombes, l’acteur et réalisateur franco algérien Lyès Salem, était plus nuancé : « C’est important d’être là. On a ressenti une certaine émotion. Je trouve que ce geste est une reconnaissance assez claire ».

« On est très déçus car c’est très très en deçà de ce que l’on demande. C’est une occasion ratée, déplore de son côté Mehdi Lallaoui, également présent samedi à Colombes. Pour le président de l’association « Au nom de la mémoire », les « assassins ne sont pas nommés ». « Seulement Papon. On peut donc assassiner les gens sans qu’il n’y ait de poursuites, ni que les responsables soient nommés comme la police parisienne, Roger Frey (ancien ministre de l’Intérieur), Michel Debré le premier ministre de l’époque ou encore le président de la République d’alors : le général De Gaulle », souligne-t-il évoquant la création d’une fondation pour la fraternité franco-algérienne parmi les réparations possibles.

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Emmanuel Macron

@EmmanuelMacron

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Officiel du gouvernement – France

La France regarde toute son Histoire avec lucidité et reconnaît les responsabilités clairement établies. Les crimes commis la nuit du 17 octobre 1961, sous l’autorité de Maurice Papon, sont inexcusables pour la République. Aux victimes, nous rendons aujourd’hui hommage.

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12:06 PM · 16 oct. 2021

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Le sujet est sensible pour la majorité. L’hommage n’a pas été rendu aux endroits qui ont le plus marqué la répression, au niveau du pont Saint-Michel notamment. Aussi, il s’est tenu la veille de la date anniversaire du drame. Pour désensibiliser l’événement ? « Des commémorations sont traditionnellement organisées, que ce soit à Paris ou en banlieue, le 17 octobre, matin, après-midi, et le Président de la République ne souhaitait pas se substituer à ces différentes commémorations », justifie l’entourage du président de la République.

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