Les dirigeants de la « Chambre de Commerce et d’Industrie de Martinique » (CCIM) ont récemment présenté les conclusions d’une étude intitulée « Maturité digitale et usages du numérique dans les entreprises martiniquaises. » Réalisée par le consortium regroupant les cabinets IDATE et COHDA, cette étude dresse là un état des lieux du « niveau d’intégration et d’appropriation des outils digitaux dans les entreprises martiniquaises », analyse les « évolutions » observées par rapport une précédente étude de 2020, et formule des propositions pour « accompagner la transition numérique des entreprises ». Eléments de présentation.

Plus précisément, cette nouvelle étude était portée par deux grands objectifs. Tout d’abord « évaluer la maturité digitale des entreprises martiniquaises et apprécier leur évolution depuis l’étude de 2020 », c’est-à-dire l’appréciation du « niveau d’avancement des entreprises en matière de maturité numérique (niveaux d’équipements, usages, connaissances) », l’évaluation des besoins et attentes des entrepreneurs, l’évaluation des freins et difficultés rencontrées par eux, ainsi que les « opportunités et difficultés liées aux contextes sanitaires et inflationniste ». Second grand objectif : « émettre des recommandations pour permettre aux pouvoirs publics de mieux accompagner les entreprises dans leur transition numérique », soit plus précisément, des axes d’orientation et de recommandation suite aux résultats de la première phase. Une étude qui, en outre, a porté sur 500 entreprises « représentatives du tissu local » puis a été suivie de 15 entretiens thématiques (avec des acteurs publics et privés de l’accompagnement, des organisations socio-professionnelles, des représentants de la filière numérique etc.).

Parmi les évolutions et opportunités jugées comme positives par rapport à la précédente étude, le smartphone (déjà perçu comme une opportunité en 2020) se « positionne à nouveau comme l’outil phare dans le développement des entreprises. » Quant aux réseaux dits sociaux, ces derniers prennent désormais une « place importante en termes d’opportunités pour les entreprises. » Quant à l’intelligence artificielle, celle-ci se positionne désormais comme une « réelle opportunité » et un « levier de développement ». Tout comme en 2020, poursuit l’étude, l’un des appuis majeurs de la maturité numérique des entreprises pourrait se trouver dans les acteurs de l’écosystème mobilisables.

Carole Foulard
Carole Foulard

Au chapitre des « faiblesses » identifiées par l’étude, citons des « petites entreprises avec des dirigeants éloignés de la culture numérique », des ressources financières et humaines « toujours plus limitées par les difficultés socio-économiques », une réalité numérique « non-identifiée comme levier stratégique face aux difficultés quotidiennes des entreprises, une filière « sans repères clairs » et un « manque de visibilité, d’accessibilité et de coordination des offres et des acteurs de confiance. » Des faiblesses identifiées et alarmantes ? Ayant en outre identifié des « menaces », les responsables de cette étude poursuivent en indiquant alors un « fossé de plus en plus évident entre grandes et petites entreprises, tous secteurs confondus », de « nouveaux usages toujours plus innovants, accroissant l’éloignement », des sujets d’importance comme l’IA (intelligence artificielle) ou la cyber-sécurité « ignorés par les entreprises », ainsi qu’une difficulté à « identifier les besoins en numérique en entreprise ».

Enfin au chapitre attendu des recommandations, trois « axes d’orientations » et « neuf pistes de recommandations » sont indiqués par les responsables de l’étude. Ces trois axes sont les suivants : « élargir l’horizon numérique » (soit « encourager et continuer à aller vers les nouveaux canaux de diffusion essentiels, aller vers la maîtrise des outils numériques etc.), « optimiser et structurer l’offre d’accompagnement » (soit « diagnostiquer et orienter en amont », « présenter des parcours d’accompagnement clairs et structurés », etc.) et enfin, troisième et dernier axe, « tirer parti de l’écosystème local » (soit « mutualiser les ressources à disposition des entreprises », « prendre appui sur le marché de prestataires locaux existant », etc.).  Inévitable interrogation en conclusion : la « maturité digitale » d’une majorité de nos entreprises est-elle encore loin ?

Mike Irasque


A l’issue de cette présentation nous avons interrogé Carole Foulard, vice-présidente de la CCIM.

 « Il n’est pas question que 31% des entreprises n’aient pas accès au digital… »

Carole Foulard

Carole Foulard, vice-présidente de la CCIM
Carole Foulard, vice-présidente de la CCIM

Antilla : Quelle est dans les grandes lignes la « genèse » de cette nouvelle étude ?

Carole Foulard : On a fait une première étude début 2020, époque où le Covid s’invitait ; on avait commencé à mettre en place ‘’la boutique connectée’’, donc des solutions pour les entreprises, pour leur faciliter le quotidien. Certes on a dû interrompre cette belle aventure à ce moment-là, mais on s’est rendus compte que le Covid avait permis à beaucoup d’entreprises de prendre ce virage du numérique pour sortir la tête hors de l’eau. Après quatre ans, il fallait qu’on ait un état des lieux pour savoir où on en était. Et on remarque qu’il y a une progression même si elle n’est pas suffisante. Ce que la Chambre de Commerce et d’Industrie veut faire c’est de permettre à ces entreprises de revenir vers elle. A un moment on a été obligés de chercher des solutions pour sortir la tête de l’eau, et après on nous a un peu ‘’oubliés’’ : non, il faut revenir vers nous. Avec l’Etat, avec la CTM, avec les EPCI et les acteurs du numérique – c’est-à-dire l’écosystème – on essaie de mettre en place des choses pour finir ce travail. Car il n’est pas question que 31% des entreprises n’aient pas accès au digital.

Quels sont les motifs d’encouragement ou de satisfaction depuis cette première étude de 2020 ?

Cela a avancé très positivement suite au Covid car il fallait trouver des solutions : télétravail, click and collect, sites de vente en ligne, etc. Mais on peut faire davantage.

Cette avancée s’est-elle maintenue depuis la période du Covid ?

Oui mais ça ne s’est pas suffisamment développé. Or c’est ce que nous voulons :  continuer à développer le digital dans les entreprises.

Comment faire concrètement pour augmenter ce pourcentage d’entreprises non « digitalisées » que vous évoquiez ?

L’entreprise c’est l’ADN de la CCIM, donc il s’agit de faire de la proximité auprès de ces entreprises, soit au niveau de la formation, soit au niveau des aides financières. Et il faut une continuité : il faut un suivi pour savoir comment les entreprises utilisent les solutions qui leur sont proposés.

Que propose la CCIM aux entreprises, dans les grandes lignes, afin qu’elles prennent ce « virage numérique » ?

Il faut se rapprocher de tous les acteurs, se mettre ensemble, aller vers ces entreprises ou leur proposer de venir vers nous, pour leur permettre un développement aux niveaux du digital et du numérique.

Des secteurs d’activités demeurent-ils éloignés de cette évolution digitale ?

C’est ce que l’étude n’a pas vraiment permis de montrer mais je pense qu’il y a des choses à faire, au niveau du BTP par exemple. Il faudrait donc sectoriser les entreprises, de façon à les étudier au cas par cas.

Et c’est un travail qui sera fait ?

Oui ce sera fait, c’est obligé.

Savez-vous s’il y a des catégories socio-professionnelles plus réfractaires ou « technophobes » que d’autres au sein de certaines entreprises ?

Non, pas vraiment. De un à cinq salarié.e.s, c’est un peu compliqué. Mais au-delà de cinq salarié.e.s on peut dédier quelqu’un à ça.

Propos recueillis par Mike Irasque

Partager.

Comments are closed.

Exit mobile version