Retour sur le récent discours du ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, dans l’hémicycle de l’Assemblée de Martinique, à l’Hôtel de la CTM. Focus plus précisément sur la séquence « évolution institutionnelle » de cette communication.

Evoquant sa co-représentation avec Marie Guévenoux, la ministre déléguée chargée des Outre-mer de la République, Gérald Darmanin de lancer : « Notre seule ligne de conduite collective est que les institutions par elles-mêmes ne sont pas un but en soi. Les institutions, les projets de changement statutaire, institutionnel, constitutionnel, doivent servir un projet pour un territoire, pour un pays, et non pas le contraire. » Des propos plutôt similaires à ceux du président du Conseil exécutif de la CTM, Serge Letchimy, ce dernier associant régulièrement, notamment dans les médias, la notion de « projet de développement » à ses volontés réformistes. Le ministre poursuivit : « Indivisible ne signifie pas uniformeL’idéal républicain est assez fort pour accueillir des adaptations, des spécificités, des identités, des particularités. (…) L’unité de la France après tant de siècles de centralisation – dont chacun aujourd’hui perçoit parfois les limites, et de temps en temps les impasses – supportera j’en suis sûr cette répartition ; j’allais dire ce partage nouveau des pouvoirs. »« Adaptations », « spécificités », « partage des pouvoirs »dans le cadre de la République : des mots et autres contenus idéologiques qui auront peut-être réjoui Serge Letchimy. Puis Gérald Darmanin d’affirmer : « Oui (…) nous souhaitons des réformes institutionnelles, à partir du moment où elles servent les territoiresLa Martinique y travaille, ses propositions seront écoutées par le président de la République (…). »Question : l’appréciation des « services » possiblement rendusà notre « territoire », sera-t-elle sensiblement la même en Martinique et à Paris ? Interrogé médiatiquement à la suite de son discours, le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer se fit plus précis sur certains points.

« Il faut aussi un projet qui plaise aux martiniquais, pas simplement aux élu.e.s »


« Pour réussir une réforme institution
nelle (…) il faut des élu.e.s engagé.e.s, qui essaient de dégager non pas une unanimité mais un consensus dans leur territoire », débuta Gérald Darmanin quant aux conditions et exigences majeures à ces fins de réussite. Puis d’ajouter : « Et nous voyons que le Congrès de Martinique a réussi à produire des propositions, plusieurs scénarios que nous regardons avec sérieux et avec écoute. » A suivre. « Ici en Martinique il y a de magnifiques atouts ; il y a aussi quelques difficultés : une déprise démographique, des difficultés économiques et une autonomie, notamment alimentaire, à augmenter », détailla alors le ministre, « c’est bien ce projet qui doit être réalisé, et donc si des réformes institutionnelles permettent de réaliser beaucoup plus vite ce projet, le Gouvernement de la République dit oui et sera favorable à ces changementsinstitutionnels. » Des affirmations qui, selon l’expression consacrée, ne tombèrent certainement pas dans l’oreille d’un sourd… Et Gérald Darmanin de poursuivre, évoquant une possible réunion du Congrès dit de Versailles : « Il faut aussi que le Congrès, c’est-à-dire les députés et les sénateurs hexagonaux, adoptent cette réforme constitutionnelle. (…) je rappelle que le Gouvernement a une majorité relative à l’Assemblée nationale et que le Sénat lui est hostile, donc il faut faire un travail de persuasion collectif. » Un « travail »qui, a priori, ne sera pas la moindre des étapes de ce possible processus réformiste. Puis le ministre de glisser ces rappels opportuns : « Il faut aussi un projet qui plaise aux martiniquais, pas simplement aux élu.e.s (…) et on a vu, jadis, des réformes qui étaient refusées par les citoyens après avoir été proposées et acceptées par les élu.e.s. » Le ‘’spectre’’ des refus martiniquais, lors des consultations populaires de 2003 et 2010, sembla alors flotter dans la pièce. Puis le ministre de ‘’boucler la boucle’’ en somme : « Il faut donc qu’on sache(…) que les martiniquais seront directement consultés sur une réforme institutionnelle. Désormais la phase de réflexion est terminée ou quasiment terminée ; nous rentrons dans la phase active de discussions et je crois que le président de la République aura l’occasion d’en parler directement avec le président Letchimy. (…) Les martiniquais vont choisir leur statut, si jamais il devait leur être proposé un statut, mais il ne s’agit pas de faire en catimini ce statut. » Parmi les prochaines étapes possiblement signifiantes du processus annoncé, la remise du rapport des deux experts missionnés par Emmanuel Macron sur ces questions d’évolution institutionnelle et/ou statutaire, puis ledit rendez-vous entre le chef de l’Etat et tout ou partie des exécutifs signataires de l’Appel de Fort-de-France.
                                                                                                                                             Mike Irasque

Crédit photos : Roland Dorival.

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