L’esclave Romain est arrêté et emprisonné pour avoir joué du tambour. Ses compagnons manifestent et il est libéré. Mais peu après, une milice esclavagiste tire sur le défilé des esclaves. Plusieurs morts. L’insurrection armée part de Saint-Pierre et se répand dans l’île. Le 23 mai, le gouverneur Rostolan décrète l’abolition en Martinique.

Le 27 mai en Guadeloupe, le gouverneur Layrle fait de même. Il craint que l’insurrection de Martinique gagne la Guadeloupe. En effet, désobéissances et marronnages augmentent. Les esclaves sont au bord de la révolte ouverte.
Quarante-six ans auparavant, les 26, 27 et 28 mai 1802, en Guadeloupe, la guerre anti- esclavagiste était déclenchée car Bonaparte y rétablit l’esclavage. Une première abolition avait été décrétée en 1794 par le gouvernement révolutionnaire de la Convention, mais l’abolition n’est appliquée qu’en Guadeloupe. La Martinique était sous occupation britannique. La guerre anti- esclavagiste dirigée par Delgrès et Ignace sera un échec. Mais elle est une victoire morale pour la postérité.

Revenons à l’abolition définitive de 1848 en France.

Elle se situe dans le sillage de la révolution de février 1848. Les ouvriers de Paris avaient surgi sur la scène politique. Le nouveau gouvernement révolutionnaire décrète l’abolition le 27 avril. Victor Schœlcher en est un des promoteurs et signataires. Le décret parvient aux Antilles en juin, donc après l’insurrection de Martinique et l’abolition locale.

À la différence des officiels, et des bien- pensants nous ne commémorons pas « l’abolition de l’esclavage » mais « les luttes des esclaves pour l’abolition », ce qui n’est pas tout à fait la même chose.

L’abolition définitive de l’esclavage fait naître la classe ouvrière antillaise directement issue de l’oppression esclavagiste. L’esclavage salarié succède à l’esclavage tout court. Les maîtres d’esclaves se transforment en capitalistes.
Le mouvement ouvrier de Martinique et Guadeloupe est né et se renforce au cours de puissantes et nombreuses luttes jusqu’à nos jours. L’insurrection du sud en septembre 1870 en Martinique en est une des plus grandes démonstrations.
Le pouvoir colonial fait payer aux travailleurs leurs luttes, par les tueries sanglantes. Les dernières en date : mai 67 en Guadeloupe, Chalvet en février 1974 en Martinique. Mais il y eut des dizaines de tueries dans l’histoire du mouvement ouvrier des Antilles francophones.
Commémorer les 22 et 27 mai 1848, et les grandes dates du mouvement ouvrier, ce n’est pas pleurer sur l’oppression.
C’est se nourrir de l’exemple de grandes luttes pour renforcer nos luttes actuelles et à venir. Mai 67 fut un massacre, mais pas que. En mai 67, des jeunes se sont armés et ont riposté contre les forces de répression. La mémoire historique doit aussi se nourrir de ce fait-là.
Aujourd’hui, la lutte contre l’esclavage moderne est une nécessité vitale pour ne pas sombrer. Car le système capitaliste nous mène aux guerres, aux crises économiques, aux catastrophes, à l’apocalypse.

Il faut changer le monde. Les générations d’opprimés ont créé toutes les richesses mais seule toujours une minorité en profite. D’autres révolutions seront nécessaires pour exproprier cette minorité de possédants et récupérer les richesses afin que tous en profitent.
Les communistes révolutionnaires que nous sommes se battent dans cette voie. Ce qui implique que toutes les luttes petites et grandes contre les exploiteurs méritent d’être menées au quotidien. Mais elles doivent l’être avec toujours plus de conscience qu’elles s’inscrivent dans une lutte plus large, plus déterminante contre le système d’oppression actuelle, le système capitaliste.
C’est la révolution sociale qui finira par enterrer ce système pour forger un autre monde débarrassé de l’exploitation de l’homme par l’homme.
Vive les 22 et 27 mai !
Vive la révolution mondiale !

À lire, relire, voir ou revoir
Extrait de Césaire sur le 22 mai 1848
« On le voit. Seule la force révolutionnaire pouvait contenir la contre force révolutionnaire. C’est à la Martinique que les forces populaires entrèrent en action. Le 22 mai, des attroupements se forment à Fort-de- France. Des émeutes éclatent dans le Sud de l’île. Dans le Nord, à Trinité, les esclaves descendent des mornes et se portent sur le bourg. D’heure en heure le flot de l’insurrection monte. Au Prêcheur, c’est déjà la bataille. À St-Pierre, l’incendie.
Une vingtaine de maisons en flammes, 30 tués, la menace d’un soulèvement général, la décision des insurgés eurent raison des résistances de la bourgeoisie. Et c’est elle- même qui supplia le gouverneur, de prendre avant même l’arrivée des instructions de
Paris, un arrêté d’abolition immédiate de l’esclavage. »
Victor Schoelcher : « Il ne s’écoule jamais dix années sans que les Noirs ne protestent par quelque violence contre l’état où on les maintient. En trente ans quatre cinq insurrections de Nègres ! ».

À lire, relire, à voir, revoir
– «L’insurrection du 22 mai 1848 à la Martinique », d’Armand Nicolas
.
Dans brochure et livre sur l’histoire de la Martinique.
– « Notre 22 mai » d’Aimé Césaire, brochure PPM (Parti progressiste martiniquais).
– Film : « 1802, l’épopée guadeloupéenne » de Christian Lara sur Youtube. Il raconte la lutte de Delgrès, Ignace et leurs compagnons, dont la mulâtresse Solidude, Marie Louise, Palerme.
– Film : «Mé 67» de Combat Ouvrier et de la réalisatrice Frédérique Menant. Témoignages de blessés par balle, de témoins directs sur la chaîne Youtube de Combat ouvrier.
Mercredi 20 mai 2020
Correspondance : redaction@combat-ouvrier.net Site internet : http://www.combat-ouvrier.net Youtube : Combat ouvrier
Tel : Martinique 0696 22 89 71
Guadeloupe : 0690 59 19 64

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