Quand un peu d’unité nous ferait du bien…
23 AVRIL 2020
Rédigé par Emmanuel de Reynal et publié depuis Overblog

L’être humain n’est pas fait pour vivre confiné. Très vite, ça lui porte sur le système. Au début, il trouve ça sympa. Il dort un peu plus, se balade sur Facebook, regarde la télé, bouquine et attend l’heure de l’apéro. Il fait du sport, il écoute de la musique, il peint.

Mais au bout de quelques jours, il n’en peut plus. Facebook le grignote, Facebook occupe son temps. Tout son temps. Facebook prend le contrôle de son cerveau. De la partie qui stimule ses émotions. Celle que la raison évite. L’algorithme le renforce dans ses premières certitudes, célèbre son nombril, gonfle son égo.

En quelques jours, l’être humain ne doute plus. Il sait. Il devient un activiste de canapé. Il se nourrit de l’infernale boucle algorithmique qui stimule chaque heure un peu plus ses pulsions partisanes. Il dérive dans les excès de la pensée, la peur panique, le complotisme et la paranoïa. Se prenant pour un résistant, l’être humain confiné résiste… à l’intelligence. C’est un procureur impitoyable qui trouve dans chaque actualité, fausse ou vraie, les raisons évidentes de condamner et d’allumer les buchers.

Il s’indigne contre le monde, heureux de son pouvoir de division : pour ou contre la chloroquine ? Où sont les masques de protection ? Pourquoi tarde-t-on à généraliser les tests de dépistage ? Doit-on géolocaliser les malades ? Macron est-il à la hauteur ? Pourquoi n’a-t-il rien anticipé ? Pourquoi prive-t-il les médecins de leur pouvoir de prescription ? Quelles forces obscures se cachent derrière le virus ? Est-il une création volontaire des chinois ? Chacune de ces questions déclenche des avalanches de procès… Les réseaux sociaux ne sont plus qu’un vaste tribunal à charge.

Ils masquent l’autre réalité, celle qui se passe dans les hôpitaux où là il n’y a pas de coupable. Là où il n’y a que des personnes engagées dans le combat, mobilisées, organisées. Des médecins, des internes, des étudiants, des professeurs, des infirmiers, des brancardiers, de réceptionnistes, des hommes et des femmes qui mettent tout leur cœur dans la bataille.

Alors que dehors, les confinés se déchirent, ici on travaille, on s’entraide, on protège. Ici on accueille l’amour qui vient de l’extérieur, les dessins d’enfants qui arrivent par la Poste, les viennoiseries chaudes que le boulanger du coin apporte chaque matin, les bons petits plats concoctés par les voisins, les pizzas chaudes, les boites de chocolat, les cookies, les jus de fruits qui sont là sans qu’on sache comment… Ici on remercie les entreprises solidaires, celles qui livrent des bidons de gel hydro-alcoolique, des cartons de masques, des blouses jetables, des gants… les propriétaires qui prêtent leur maison aux soignants pour qu’ils se reposent, les dirigeants qui se bâtent pour obtenir plus de matériels et qui poussent les industriels à produire encore. Ici on salue les acteurs publics qui se défoncent comme ils peuvent pour faire tenir le système, malgré le trop-plein de bureaucratie. Malgré… Ici on comprend qu’aucune décision n’est parfaite, qu’aucune solution n’est simple, que ce qui était vrai hier sera faux demain, que ce qui vaut ici ne vaut plus là. Ici on avance en doutant, en se méfiant des certitudes. Ici on sait les difficultés immenses qui submergent les équipes, mais on est fier de tenir son rôle. Ici on aimerait puiser dehors un peu plus d’optimisme, un peu plus d’élan collectif, un peu plus d’amour. Un peu moins d’angoisse.

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