Groupe bien connu dans les territoires dits d’outremer, la Caisse des Dépôts y porte en effet de multiples priorités. Mais y-a-t-il des différences entre ledit Groupe et un établissement également connu des forces vives de Martinique, à savoir la Banque des Territoires ? Et qu’impliquent, par exemple, les programmes ‘’Cœur de Ville’’ et ‘’Petites villes de demain’’ ? Autant d’interrogations, parmi d’autres, auxquelles répond ici Christophe Laurent, le directeur régional Antilles-Guyane de la Banque des Territoires.   

Christophe Laurent, le directeur régional Antilles-Guyane de la Banque des Territoires, et Roland Picot, le directeur Martinique de l’établissement

ANTILLA : Quelles sont, dans les grandes lignes, les priorités du Groupe Caisse des Dépôts ?

Christophe LAURENT : La première priorité du Groupe Caisse des Dépôts est d’accélérer la transformation écologique, vers une économie neutre pour le climat, pour préserver la biodiversité et favoriser l’économie circulaire. Notre deuxième pilier est le développement et la souveraineté économiques, en favorisant la croissance, la souveraineté énergétique, industrielle, numérique et financière. Le troisième axe fort est la cohésion territoriale et l’habitat : favoriser le développement équilibré des territoires et œuvrer pour le logement pour tous. L’habitat est d’ailleurs l’épine dorsale historique de la Caisse des Dépôts et la Banque des Territoires ; l’habitat c’est-à-dire le logement social, l’habitat des jeunes, l’habitat privé, intergénérationnel, etc. Autre raison d’être pour nous : la cohésion sociale, c’est-à-dire accélérer et moderniser la mise en œuvre des politiques sociales, notamment via nos actions dans les domaines de la santé et du grand âge. Et bien sûr, concrétiser tous ces objectifs passe par des projets réalisés sur les différents territoires. Concernant la souveraineté énergétique et la transition écologique, les projets, par exemple, de production d’énergie photovoltaïque, par de la  biomasse ou de l’éolien ne sont pas concrétisés hors-sol mais bien sur les territoires, à proximité des acteurs. C’est la raison d’être de la création de la Banque des Territoires en 2018.

Quelles en sont les différences essentielles avec la Caisse des Dépôts ?

La Banque des Territoires est l’une des directions de la Caisse des Dépôts, mais ce n’est pas une filiale. Notre Banque réunit, en une seule direction, toutes les équipes qui concourent au développement économique des territoires. Et cette proximité passe aussi par une capacité de décision locale. En tant que directeur régional Antilles-Guyane j’ai en effet la capacité d’engager pour ces 3 territoires localement, c’est-à-dire sans avoir à remonter de demandes au siège parisien. J’ai évidemment des limites en termes de décisions, mais la grande évolution avec la création de la Banque des Territoires c’est cette capacité à décider localement, et donc plus rapidement. En effet, qui connait mieux les projets que les acteurs qui vivent dans les territoires et qui sont dans les ‘’écosystèmes’’ ? Ceci sans oublier le fait que nous avons l’appui d’experts à notre siège parisien ; appui en termes de numérique, de silver économie (économie dite du vieillissement, ndlr), en commerce, en tourisme etc. Nous travaillons donc tous ensemble et sommes aligné.e.s sur les objectifs que j’ai présentés.

« Nous prêtons à partir de 25 ans, et jusqu’à 80 ans pour les prêts fonciers » 

Et quelles sont les priorités des territoires relevant de cette direction régionale ?

Les priorités émises par les pouvoirs publics locaux se situent essentiellement autour de la transition écologique et énergétique, et du tourisme. Ce sont les priorités, avec un axe plus fort sur le tourisme pour les Antilles et un axe plus fort sur les enjeux de ces transitions pour la Guyane ; ceci ne nous empêchant pas bien sûr d’être à l’écoute des problématiques du numérique, du vieillissement des populations, etc. Concernant le tourisme, notre priorité est d’accompagner la rénovation et montée en gamme de l’ensemble de l’écosystème du secteur, pas que pour les grands hôtels mais aussi pour des acteurs de plus petite taille. Cette montée en gamme ne passe pas forcément et uniquement par la recherche d’étoiles pour les hôtels, mais également par des savoirs-faires, des équilibres économiques, avec par conséquent des enjeux en termes de formation, de numérique, de mobilité entre les ports et aéroports, etc. Quand on traite un sujet c’est donc tout l’amont et l’aval qu’il faut avoir structuré. Concernant la transition énergétique et écologique, nous sommes partenaires de la PME martiniquaise SYSTEKO et sommes le deuxième actionnaire de VOLTALIA Guyane, qui a un savoir-faire sur l’ensemble des productions d’énergies renouvelables : photovoltaïque, biomasse, etc. Tout ceci est en phase avec les priorités des 3 territoires car il y a aussi les enjeux de la ‘’Programmation Pluriannuelle de l’Energie’’ (PPE) et l’ambition d’une autonomie énergétique à l’horizon 2030.

Les partenariats entre la Banque des Territoires et les collectivités des Antilles et de la Guyane sont-ils essentiellement d’ordre financier ?

Non, loin de là et cela fait notre force à la Banque des Territoires. Nous pouvons également être présents en amont, notamment en termes d’ingénierie. Concrètement nous co-finançons des études d’’ingénierie qui permettent d’orienter le choix d’une collectivité vers telle ou telle solution, avec notre capacité à l’accompagner quelle que soit la solution choisie : ainsi, nous pouvons accompagner la création d’une entreprise publique locale, en étant actionnaires d’une SEM (Société d’Economie Mixte) aux côtés d’une collectivité ; nous pouvons également dans le cas d’une ‘’Délégation de Service Public’’ (DSP) être actionnaires aux côtés d’un porteur privé, afin de répondre à divers besoins. Mais nous pouvons également prêter à la collectivité… Concernant les financements, la spécificité de la Caisse des Dépôts est que nous prêtons de 25 à 60 ans, et jusqu’à 80 ans pour les prêts fonciers. En effet certains investissements ont besoin d’être amortis sur de longues durées : concernant le numérique, le cuivre a duré quasiment un siècle et on espère que la fibre durera bien au-delà de 15 ou 20 ans, ou que les réseaux d’eau refaits vivront 40 à 50 ans. Ces réalités-là se financent par des prêts à très long terme.

« Il n’y a pas une collectivité que nous ne connaissions pas » 

Des partenariats spécifiques unissent la Banque des Territoires à des villes des Antilles et de la Guyane : de quoi s’agit-il précisément ?

Fort-de-France et le Lamentin en Martinique ; Basse-Terre, Pointe-à-Pitre et Les Abymes en Guadeloupe ; Cayenne et Saint-Laurent-du-Maroni en Guyane : ce sont les communes du programme ‘’Action cœur de ville’’, pour lequel nous avons mis en place une ingénierie renforcée afin d’aider ces communes à réfléchir à l’attractivité de leurs centres-villes, aux moyens de redonner vie aux cœurs de ville, répondre aux problématiques de ‘’dents creuses’’, d’arrêts d’activités, des problématiques de stationnement, de circulation, etc. Il s’agit d’aider à structurer toutes ces réflexions et à trouver les meilleurs acteurs pour les accompagner. Je suis d’ailleurs très fier que nos équipes aient contribué à la première ‘’Foncière de redynamisation’’ en outremer, à Saint-Laurent-du-Maroni, avec le concours de l’édilité et des bailleurs sociaux ; l’objectif étant de racheter les dents creuses, de racheter aussi des actifs dégradés, de les réhabiliter et les remettre sur le marché avec des loyers modérés, car nous sommes dans l’intérêt général. Il s’agit donc d’accompagner les territoires sur des outils structurants via les programmes ‘’Action Cœur de ville’’ et ‘’Petites villes de demain’’, ce programme comptant une vingtaine de villes réparties dans les 3 territoires.

Outre les communes qui sont membres de ces programmes, quel est le niveau d’adhésion des autres collectivités des Antilles-Guyane à la Banque des Territoires ? Cette adhésion est-elle conséquente ?

Il n’y a pas une collectivité que nous ne connaissions pas. Notre palette d’interventions va de l’ingénierie au financement, à l’accompagnement de bout en bout, etc. Et nous utilisons à chaque fois le bon outil. Comme son nom l’indique la Banque des Territoires agit en proximité : de la petite ville aux villes chefs-lieux, sans oublier les intercommunalités et les collectivités comme la CTM, la CTG (Collectivité Territoriale de Guyane) ou la Région et le Département Guadeloupe. En outre, nous sommes actionnaires et coactionnaires d’un certain nombre d’outils. Nous sommes donc présents dans l’ensemble des ‘’écosystèmes’’: le Grand Port Maritime, les services de l’Etat, les Chambres de Commerce, les acteurs privés, etc., sont des partenaires avec lesquels nous travaillons au quotidien, en appui des politiques publiques et territoriales.

Propos recueillis par Mike Irasque

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