Note de la rédaction d’Antilla: Cet article sélectionné sur le site d’histoire Hérodote n’exprime que les idées de son auteur et non celles de la rédaction d’Antilla.

Dans les médias comme sur les réseaux virtuels, les cancres prétendent réécrire l’Histoire mais encore faudrait-il qu’ils aient pris la peine de l’étudier. Plutôt que de dénoncer les crimes réels ou imaginaires que les Européens ont pu commettre au cours du dernier millénaire, il vaudrait mieux qu’ils réfléchissent au fait qu’ils en ont bien moins commis que la plupart des autres groupes humains pour un résultat somme toute bien plus

En France, le plus troublant est la paralysie de la classe politique et des pouvoirs publics face à des propos à connotation raciste et des actes violents qui sapent la cohésion nationale et défient l’État. Personne ne sait ni n’ose trouver les mots qui pourraient réunir les Français.

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Le 22 mai 2020, des agitateurs ont détruit les statues de Victor Schoelcher en Guadeloupe. Trois jours après, la mort de George Floyd à Minneapolis (États-Unis) allait donner une résonance nationale à ce geste, prolongé par la destruction, deux mois plus tard, en Martinique, des statues de Joséphine de Beauharnais (!) et du navigateur Pierre Belain d’Esnambuc qui donna l’île à la France. Dans le même temps étaient souillées en métropole différentes statues dont celle de Colbert devant l’Assemblée nationale.

On attend toujours la réponse du ministère de l’Intérieur, que l’on a connu plus réactif et même brutal quand il s’est agi de réprimer des révoltes sociales, Gilets jaunes ou syndicalistes (note).

Faut-il s’étonner de cette inertie gouvernementale ? Pas vraiment. La classe politique s’applique depuis deux à trois décennies à réaliser l’utopie néolibérale et post-démocratique d’une société ouverte à tous les vent, qui ferait fi de son Histoire et de son identité. Les revendications indigénistes, si absurdes soient-elles, lui facilitent la tâche en brisant les défenses immunitaires de la communauté nationale (note). 

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Race et Histoire : est-il permis de dire n’importe quoi ?

Pour l’heure, un tsunami de bêtise et d’ignorance déferle dans les médias, en France comme dans le reste de l’Occident démocratique. Craignant pour leur vie, les historiens restent confinés dans leur bibliothèque. Sur BFM TV, une journaliste déclare comme une évidence que le général Gallieni aurait massacré 500 000 Malgaches, soit le quart de la population de la Grande Île en 1900 !

D’autres commentateurs, trop nombreux pour les nommer, expliquent le prétendu racisme d’État de la France par la colonisation. Mais savent-ils bien ce que fut la colonisation de l’Afrique ? Un projet civilisateur de la gauche républicaine qui ne différait guère de celui des actuels coopérants et « médecins sans frontières ».

Pétrie de bons sentiments, la colonisation a certes donné lieu à beaucoup de crimes et d’abus mais au total nettement moins que les régimes issus de la décolonisation et guère plus que la coopération actuelle (abus sexuels, pillages, détournements de fonds…).

Par un grossier anachronisme, on dépeint maintenant aussi Colbert et Louis XIV comme d’odieux racistes. On peut reprocher à Louis XIV beaucoup de fautes et de crimes, des « dragonnades » au sac du Palatinat mais certainement pas d’avoir encouragé l’esclavage et la traite.

Le Roi-Soleil porta sur les fonts baptismaux un prince noirvenu de Côte d’Ivoire et Colbert, parmi ses innombrables entreprises, eut à cœur de limiter les abus des planteurs dans de lointaines îles à sucre. Son code juridique plus tard appelé Code noir garantissait à tous les anciens esclaves, une fois affranchis, un statut de citoyen français à part entière. Ainsi ouvrait-il la voie à l’abolition, sans doute sans en avoir conscience… Pouvait-il faire davantage dans un monde qui, à l’exception de l’Europe occidentale, pratiquait partout l’esclavage ?

La France fut avec l’Angleterre à l’origine de l’abolition de l’esclavage et de l’émancipation féminine. En matière de racisme, osons même soutenir qu’en aucun autre pays, y compris en Afrique, les noirs ont moins à se plaindre qu’en France, aujourd’hui comme hier.

S’il s’agit de désigner les grands tyrans de l’Histoire, le champion toutes catégories est sans aucun doute le Mongol Gengis Khan dont les conquêtes auraient entraîné la mort violente d’un quart des Asiatiques. Le chef zoulou Chaka s’est montré tout aussi ravageur à l’échelle de l’Afrique australe qu’il a largement dépeuplée au début du XIXe siècle.

Reste une triste réalité : sous toutes les latitudes, la guerre est une chose sale. Abd-el-Kader ou encore El-Hadj Omar n’avaient rien à envier à leurs adversaires Bugeaud et Faidherbe en matière de brutalités. Rappelons encore que de toutes les guerres, les pires sont les guerres civiles. Aucune population n’eut sans doute plus à souffrir de l’armée française que les Vendéens. On pourrait dire la même chose des Irlandais vis-à-vis de l’armée anglaise.

En matière d’atrocités, il n’y a guère que Hitler et Mao qui puissent rivaliser avec les guerres de religion, la guerre de Trente Ans qui a déchiré l’Allemagne, la révolte des Taipingen Chine, la guerre civile de Russie ou la terreur des Khmers rouges. En matière d’esclavage, il serait également présomptueux d’établir un palmarès de l’horreur, de la traite atlantique à la traite saharienne. Rappelons qu’au Moyen-Orient, les malheureux Africains voués au travail forcé faisaient l’objet d’une castration quasi-systématique, raison pour laquelle il ne se trouve plus personne pour reprocher aux musulmans leur pratique de l’esclavage.

Autant dire que, si nous voulons honnêtement classer et hiérarchiser les horreurs de l’Histoire, nous ne verrons aucune corrélation entre leur niveau d’intensité et la couleur de peau ou la religion des victimes et des bourreaux. Et aucun motif de vitupérer la France plutôt qu’un autre pays. Alors que la France a fait figure jusqu’à la fin du XXe siècle de havre de paix pour les noirs américains, de Joséphine Baker à James Baldwin, comme pour tous les gens persécutés en raison de leur race ou leur religion, alors que les Français n’ont rien ou pas grand-chose à se reprocher en matière de tolérance et d’ouverture, nous voilà tous assimilés à d’affreux racistes pétris de mauvaises intentions. Consolons-nous en y voyant une nouvelle démonstration du « paradoxe de Tocqueville » (note).

La cancel culture et le syndrome de Monsieur Perrichon

La France n’a aucun motif de rougir de son Histoire même si celle-ci a pu être entachée de quelques horreurs (moins que toute autre région de la planète). La majorité des Français  tirent fierté d’appartenir à une grande et belle nation, y compris la majorité des ultra-marins, immigrés et enfants d’immigrés. Si, toutefois, la cancel culture étasunienne a pu investir notre pays, on peut en voir la raison dans un travers de l’âme humaine, illustré par le « syndrome de Monsieur Perrichon » (note) : personne n’apprécie d’avoir une dette de reconnaissance ! Et moins que quiconque ceux qui ne se sentent pas en situation de pouvoir rembourser cette dette !

Si les Indiens, les Vietnamiens ou encore les Chinois ne tiennent pas rigueur aux Occidentaux des méfaits qu’ils ont subi du fait de leur impérialisme au XIXe siècle, c’est qu’ils se savent en capacité de leur rendre la monnaie de leur pièce.

À l’inverse, certains Africains s’irritent de la bienveillance maladroite dont leur témoignent les Européens, que ce fusse par la colonisation ou, aujourd’hui, par la multiplication des missions humanitaires. Comme M. Perrichon, ils y voient (non sans raison) une marque de condescendance à leur égard et donc de mépris. Insupportable. Le remède existe néanmoins. C’est celui qu’ont utilisé les Japonais de l’ère Meiji et les Chinois de l’ère Deng Xiaoping : il consiste à emprunter aux Occidentaux le meilleur de leur civilisation pour en faire une arme. Mais sans doute est-ce plus difficile que de chouiner et gémir…

André Larané

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