Vu sur novethic.fr – Ne plus payer sa facture d’énergie. Un million de Britanniques ont rejoint le mouvement “Don’t pay” face à la flambée des prix de l’électricité et du gaz. Partout en Europe, la tension monte, contenue par les différents boucliers gouvernementaux. Mais c’est la “pertinence du marché de l’énergie” qui doit être remise en cause. Seule solution à suivre : la réduction de la consommation d’énergie.

C’est une première. Selon le média spécialisé Bloomberg, le prix de référence de l’électricité en Europe a dépassé les 1 000 euros le mégawattheure la semaine dernière. Or il y a un an, en France et en Allemagne, le prix de gros était d’environ 85 euros, preuve de l’impressionnante flambée des prix. Même trajectoire pour le gaz qui a récemment dépassé les 300 euros quand il atteignait 50 euros avant la crise. Face à des factures quasi inabordables, la colère monte dans certains pays. Au Royaume-Uni, où le régulateur britannique de l’énergie, l’Office of gas and electricity market (Ofgem), a annoncé un bond de 80 % des prix en octobre, le mouvement citoyen “Don’t pay” vient de se lancer.

“Des millions d’entre nous ne pourront pas payer nos factures d’énergie cet hiver. Nous ne pouvons pas laisser cela se produire”, expliquent dans un communiqué les initiateurs du mouvement. “Nous construisons nos forces en nous mobilisant pour une grève de non-paiement. Cela signifie rassembler tous ceux qui veulent défier ce système truqué”, écrivent-ils. Déjà plus d’un million de Britanniques se sont ainsi engagés à stopper leurs paiements à partir du 1er octobre.

Réforme du marché de l’énergie

Interrogé sur ce sujet par BFM, le porte-parole du gouvernement Olivier Veran assure que “ce qui se passe en Angleterre ne se passera pas en France”. “Nous allons atténuer la hausse des prix pour les Français avec très probablement un regard encore plus appuyé pour les catégories populaires et les entrées de classes moyennes comme nous l’avons fait depuis le début de cette crise de l’inflation”, explique-t-il. Mais la fronde monte. Le maire communiste de Montataire, dans l’Oise, a simulé sa facture d’électricité à venir. Il estime qu’elle sera multipliée par quatre. “On n’a pas de trésor de guerre, on doit voter un budget à l’équilibre. Comment je trouve le 1,9 million d’euros qui manque ? Quel service je ferme ? J’arrête la restauration scolaire, je ferme la mairie trois jours par semaine?”, s’insurge Jean-Pierre Bosino dans un communiqué.

En Slovaquie, certains représentants d’écoles et de municipalités craignent également de devoir fermer les établissements ou au moins une partie d’entre eux en raison de la hausse des prix de l’énergie. Partout, les gouvernements européens tentent de limiter la casse mais la situation est imprévisible. D’où l’appel du chancelier autrichien Karl Nehammer à la mise en place d’un bouclier tarifaire européen. “Nous devons arrêter cette folie qui sévit actuellement sur les marchés de l’énergie”, a-t-il déclaré, estimant qu’il n’était possible d’agir que dans un cadre européen et non uniquement national.

Pour Sandrine Ferrand, spécialiste de l’énergie et responsable ESG et climat au centre de recherche de Novethic, “nous traversons actuellement une crise systémique qui remet en cause la pertinence du marché”. Aujourd’hui, n’importe quelle entreprise peut s’improviser fournisseur d’énergie, sans même en produire ou en transporter. Il suffit, pour cette entreprise, de s’approvisionner sur les marchés.

L’ère de la sobriété

“La Commission européenne avait prédit que l’ouverture des marchés ferait baisser les prix pour les consommateurs. Mais si les crises systémiques se multiplient, et on peut penser que cela le sera dans un monde affecté par le changement climatique, il sera difficile de revenir à des niveaux de prix très bas. D’autant plus dans un contexte où l’Europe souhaite verdir son énergie, et où de nombreux investissements sont nécessaires. Est-ce qu’une réforme des règles de marché suffira à endiguer la situation ? La question se pose”, résume-t-elle.

Est-ce donc “la fin de l’abondance ” évoquée par le Président Emmanuel Macron dans son discours la semaine dernière ? La Première Ministre a en tout cas été claire à l’université d’été du Medef : “Si nous devons en arriver au rationnement, les entreprises seraient les premières touchées” a-t-elle signalé. Rappelons que d’ici deux ans, la France s’est engagée à réduire de 10 % sa consommation d’énergie par rapport à 2019. “Assimilée, souvent à tort, à la décroissance ou “un retour à la bougie”, la sobriété sera nécessaire pour diminuer nos consommations énergétiques et faire collectivement face au choc énergétique que nous sommes déjà en train de subir”, souligne le spécialiste Nicolas Goldberg dans une note de Terra Nova.

Marina Fabre Soundron

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