Interview de Madame Anne-Marie LEJEUNE, ancienne directrice de l’OVSM-IPGP, physicienne et volcanologue, membre de l’équipe scientifique de l’Observatoire volcanologique de Montserrat de 1996 à 2000, maître de conférences à l’Institut des Sciences de la Terre de Paris (ISTeP) Sorbonne Université, par Lydie Luce Véronique ( In Le Progressiste.)


La Montagne Pelée est un volcan de zone de subduction. A ce titre, comme tout volcan de zone de subduction, elle est un volcan actif, amené à entrer de nouveau en éruption dans un futur plus ou moins proche. Son activité est caractérisée par différents types de dynamisme éruptif, certains beaucoup plus violents que d’autres et pouvant alterner au cours d’un même épisode éruptif. Sa dernière activité magmatique s’est terminée en 1932. Lydie Luce Véronique BRUSSET : Le 3 décembre 2020, l’Observatoire Volcanologique et Sismologique de Martinique (OVSM)qui dépend de l’IPGP (Institut de Physique du Globe de Paris, CNRS) a envoyé une note explicative au Préfet de Martinique pour préconiser un passage au niveau d’alerte jaune volcanique pour la Montagne Pelée. Pouvez-vous nous préciser de quand datent les observations d’une reprise d’activité de la Montagne Pelée ?

Anne-Marie LEJEUNE : Dès ma prise de fonction à l’OVSM, fin juillet 2018, j’ai observé

des signaux sur une station située sur le flanc sud-ouest de la Montagne Pelée, au lieu-dit Morne Ménard (station MLM).Ces signaux de très faible énergie n’étaient cependant visibles que sur une seule station et de ce fait n’étaient jusque-là pas considérés. Etant volcanologue, leur forme particulière et leur fréquence m’interpellaient. Après plusieurs mois d’enquête et de nombreuses vérifications instrumentales, ces signaux se sont avérés bien réels et situés au niveau d’une ancienne zone d’activité hydrothermale, sans qu’il y ait toutefois de manifestations de surface. En avril 2019,le réseau de surveillance sismique de la Montagne Pelée a enregistré, cette fois-ci sur plusieurs stations, des événements sous forme d’essaim. Les signaux correspondaient à ce que l’on appelle des volcano-tectoniques (VT). Leur amplitude légèrement plus importante a permis à l’équipe de l’observatoire de les localiser au sein de l’édifice. L’occurrence de VTs est un phénomène couramment observé sur les volcans comme la Montagne Pelée. Leur nombre, leur localisation et leur fréquence constituent des indicateurs très importants de l’état du volcan. Ceux actuellement enregistrés sur la Montagne Pelée sont interprétés comme correspondant à de petites ruptures sur des fractures du système volcanique. Leurs faibles profondeurs (entre 0.1 et 2.5 km) suggèrent qu’ils résultent de l’activité du système hydrothermal à l’intérieur de l’édifice (circulations et interactions de gaz, vapeur et eau dans les roches poreuses et fracturées constituant l’édifice). D’autres essaims se sont produits au fil des mois, quelques dizaines d’événements à chaque épisode. Entre décembre 2019 et début janvier 2020, par exemple, plus de 120 évènements ont été enregistrés. Un autre épisode important de l’activité a commencé le vendredi saint 2020 et s’est poursuivi pendant tout le week-end de Pâques : plus de 75 évènements ont été identifiés et localisés sur l’édifice de la Montagne Pelée, certains sur le flanc ouest dans le secteur de la falaise Samperre. Ces évènements étaient un peu différents de ceux qui sont habituellement observés, avec un arrêt brutal après 5 jours et un relargage d’eau dans la rivière Samperre. (la suite la semaine prochaine).

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