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En Guadeloupe, le candidat des Insoumis pour 2022 a étrillé la gestion de la crise du Covid-19 et dénoncé le “regard paternaliste” de l’exécutif sur les inquiétudes locales.

Par Jade Toussay

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CHRISTOPHE ARCHAMBAULT VIA AFP

Lors de son voyage aux Antilles, Jean-Luc Mélenchon (ici à son arrivée en Guadeloupe le 15 décembre) a surfé sur la méfiance vis à vis du chlordécone.

POLITIQUE – La visite de Jean-Luc Mélenchon aux Antilles s’achève ce dimanche 19 décembre. En Martinique et en Guadeloupe, le candidat de la France Insoumise à la présidentielle a défendu son programme, balayé (encore) la proposition d’une primaire à gauche, et étrillé le quinquennat Macron, en particulier sur la gestion de la crise sanitaire dans les territoires d’Outre-mer. 

En Guadeloupe, Jean-Luc Mélenchon a multiplié les visites de terrain, à la rencontre de syndicalistes comme Éli Domota et de professionnels de santé. À cette occasion, il a pu échanger sur la réticence de la population à se faire vacciner. Pour rappel, au 17 novembre, 43,47% des Guadeloupéens avaient reçu au moins une injection de vaccin contre le Covid-19. Et l’obligation vaccinale des soignants a déclenché une mobilisation massive, au point que le gouvernement a été contraint de la repousser de quelques mois. 

La première explication remontée du terrain tient en un mot: le chlordécone. “Je me suis demandé pourquoi vous étiez si méfiants. On me l’a expliqué très bien”, a déclaré Jean-Luc Mélenchon sur le plateau de Canal 10, dans un extrait isolé par un journaliste. “On m’a dit ‘Tu comprends, l’État nous a toujours menti. Il nous ment tout le temps, sur le chlordécone, sur ceci ou cela. Je me suis dit qu’il y avait une méfiance”, raconte Jean-Luc Mélenchon. 

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Jean-Luc Mélenchon

@JLMelenchon

En réponse à @JLMelenchon @MathildePanot  et  @PJuraver

Voici ce qu’on m’a dit. Que comme la population est contaminée au chlordécone, il y a une crainte supplémentaire vis-à-vis du Covid et du vaccin. Et aussi un doute vis-à-vis de la parole de l’État.

#MelenchonGuadeloupe

http://youtu.be/SfUwt4-VhIg

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Outre cette défiance vis-à-vis de la parole publique, le candidat à l’Élysée a également pointé du doigt l’absence d’études sur les effets du vaccin, pour des populations à 90% contaminées par ce pesticide reconnu comme cancérigène. “Tout à l’heure plusieurs médecins libéraux m’ont expliqué le rapport qu’il y avait entre la contamination au chlordécone actuel de la population et les risques que pouvaient comporter des inflammations nouvelles”, a expliqué Jean-Luc Mélenchon.

L’origine de la défiance c’est le chlordécone, le mensonge (des autorités) est dans le corps des gens. Convaincre est donc plus difficile, il ne faut pas y aller à coup de chicote.”

 

Rappelant qu’il n’a lui-même pas d’expertise scientifique, le député des Bouches-du-Rhône a imaginé un scénario où il serait au pouvoir et interrogerait des spécialistes sur cette question: “Je leur dis ‘Écoutez, cette femme m’a dit que… qu’est-ce que vous me répondez?’ Personne n’a rien à me répondre, il n’y a pas eu d’études. Comment ça se fait? On manque de moyens? Bien sûr que non”, a-t-il asséné. 

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Vincent Glad

@vincentglad

Jean-Luc Mélenchon suggèrerait-il que la vaccination contre le Covid pourrait aggraver les conséquences de la chlordécone ?

Interview mercredi sur la chaîne guadeloupéenne Canal 10.

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Sans prendre position sur les diverses théories avancées, et rappelant à plusieurs reprises que lui était vacciné, Jean-Luc Mélenchon a surtout taclé la réaction du gouvernement – au ”regard paternaliste” et “infantilisant” –  face aux inquiétudes locales. “On peut le déplorer, mais on n’administre pas les gens comme des choses”, a-t-il confié aux journalistes de l’AFP qui suivaient son déplacement. Selon lui, “l’origine de la défiance c’est le chlordécone, le mensonge (des autorités) est dans le corps des gens. Convaincre est donc plus difficile, il ne faut pas y aller à coup de chicote (fouet, NDLR).” 

Depuis le début de la campagne de vaccination, et particulièrement pendant les mobilisations massives contre l’obligation vaccinale, le chlordécone a été utilisé comme un argument pour s’opposer au vaccin. “On a eu une dérogation pour le chlordécone, c’est donc possible pour l’obligation vaccinale”, faisait valoir un pompier syndicaliste en Guadeloupe mi-novembre.

En 2017, Mélenchon avait cartonné aux Antilles

En pleine campagne présidentielle, Jean-Luc Mélenchon sait parfaitement que le sujet est sensible. Et susceptible de consolider sa popularité sur place: en 2017, il était arrivé en tête du premier tour en Martinique (27%) et avait fini deuxième en Guadeloupe (24%), derrière Emmanuel Macron. 

En Martinique, il a donc redit sa volonté de poursuivre en justice les “meurtriers” responsables de la dérogation accordée aux Antilles, alors que ce pesticide avait été interdit des années plus tôt dans l’Hexagone, en raison des risques pour la santé. “Non, nous n’acceptons pas l’impunité”, a lancé le chef de file insoumis en reprenant les termes des manifestants, sous les applaudissements. 

Ce scandale sanitaire n’est cependant pas le seul responsable du rejet du vaccin. En Martinique, l’ARS a lancé au mois de juillet 2021 une enquête en ligne pour en comprendre les raisons. Dans une analyse publiée début novembre, la sociologue et chercheuse au Certop (section des sciences humaines et sociales du CNRS) Stéphanie Mulot évoque elle de très nombreux facteurs: mauvaise communication portée par des représentants de l’État peu aimés par la population, tandis que les élus locaux se faisaient discrets, prolifération de fake news, attachement à la médecine traditionnelle locale par les plantes… une liste non exhaustive.  

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