DÉLINQUANTS DÉCONFINÉS

Atlantico : Dans votre nouvel ouvrage, « La France des caïds » publié aux éditions Max Milo, vous revenez sur votre parcours en tant qu’avocat et sur certaines affaires et cas emblématiques. Vous dévoilez notamment les 1001 visages du banditisme. Vous décrivez notamment la porosité du grand banditisme avec certains autres secteurs de la société comme la classe politique ou certains fonctionnaires. Quels sont les principaux secteurs concernés ? Comment lutter contre cette emprise ?

Gérald Pandelon : Les principaux secteurs concernés sont ceux en relation avec les missions de sécurité et, par ailleurs, selon les informations qui m’ont été fournies, les marchés publics. Des affaires d’ailleurs très importantes vont être jugées prochainement mêlant le monde politique et celui de la commande publique. A mon sens, il sera particulièrement difficile, pour ne pas dire impossible, de lutter contre ce type de clientélisme, très enraciné, et quasiment impossible à établir puisque effectué en sonnantes et trébuchantes. De plus, des deux côtés, voyous et politiques, tout le monde y trouve son compte.

La mission d’avocat a-t-elle évolué ces dernières années ? La mutation du grand banditisme a-t-elle eu un impact sur vos missions essentielles et pour la défense de vos clients ?

La mission de l’avocat a, en général, évolué à l’heure de l’ubérisation du droit et des “légal tech”, et, en particulier, au pénal, où l’avocat suit les mutations induites par la transformation du banditisme en conseillant davantage de ce qu’il plaide. La sophistication accrue de l’acte délinquantiel sonne le crépuscule de l’activité plaidante. On discute aujourd’hui de plus en plus de montages juridiques sophistiqués “off shore”, que de stratégie de défense devant une cour d’assises statuant sur un vol à main armée, infraction qui n’intéresse plus personne.

La crise économique tant redoutée pour la rentrée prochaine va-t-elle affecter l’économie parallèle et le banditisme ? Quelles pourraient être les conséquences pour la société française au regard de ce qu’il s’est passé durant le confinement et depuis la levée du confinement ?

Si la perspective de la crise est confirmée, ce dont on peut toujours douter car la science économique n’est elle-même pas réellement scientifique si l’on admet qu’elle est rarement prédictive, le risque est réel de voir une recrudescence de la délinquance de droit commun, c’est dite une hausse des vols notamment, c’est dire surtout des infractions instantanées car, précisément, il faudra engranger des sommes d’argent rapidement.

Le banditisme et la « France des caïds » sont-ils également concernés ?

Les caïds évoqués dans mon ouvrage sont des individus plus réfléchis que les jeunes délinquants d’aujourd’hui, par conséquent moins violents spontanément. Dans mon livre, j’évoque davantage le profil de “décideurs” que celui de “sauvageons” écervelés qui n’auraient aucune conscience donc aucune notion du risque encouru. Les gros voyous, en revanche, ont déjà intégré les risques inhérents d’une crise sanitaire, ils ont des réserves…

Je crois très sincèrement que l’arrivée de ces deux ministres ne changera rien. D’abord, parce que l’agenda politique ne le permet pas. Les réformes évoquées par M. Dupond-Moretti ne seront réalisables que dans trois années à supposer que notre Garde des Sceaux s’y emploie immédiatement ; or, dans 22 mois une nouvelle élection présidentielle aura lieu qui verra sans doute un nouveau président accéder à l’Élysée. Ensuite, parce qu’il s’agit davantage d’un coup de pub, donc de communication, que d’une réelle volonté du President de voir changer les choses. Si telle avait été sa volonté, je considère qu’il l’aurait fait d’entrée de jeu. Enfin, la lutte contre le trafic de stupéfiants puis son blanchiment constitue un échec si l’on admet que ce sont 624 milliards d’euros qui sont réalisés en chiffres d’affaires dans le monde pour les stupéfiants et, en France, 3,6 milliards d’euros, soit à peu près celui du blanchiment (3,2 milliards d’euros). Autrement dit, nos gouvernants n’ont en réalité aucune solution et, pire encore, s’ils en avaient ils ne les mettraient pas en œuvre car elles sont impopulaires. Autrement dit, l’efficacité est impopulaire et l’inefficacité très populaire puisqu’invariablement les mêmes individus-électeurs déçus continuent à voter pour les mêmes personnes.

Gérald Pandelon publie “La France des caïds” aux éditions Max Milo

Retrouvez quatre extraits publiés ces dernières semaines sur Atlantico :
– Retour de l’Etat de droit : la difficile et délicate mission de la lutte contre le narcobanditisme
 La France des caïds : l’inquiétante porosité du grand banditisme
– La France des caïds : le bandit qui murmurait à l’oreille du RSI
– La France des caïds : voyage au pays des narcobandits

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