C’est notamment au « Karibéa Sainte-Luce Hôtel » qu’a été récemment lancée l’édition 2023 de l’opération de labellisation « Accueil Qualité Commerces Services et Marchés », dite AQCSM. Il s’agissait là de l’étape sudiste du lancement de cette démarche d’excellence initiée par la Chambre de Commerce et d’Industrie de la Martinique (CCIM), démarche qui cette année concerne 85 chef.fe.s d’entreprise candidats et leurs structures respectives, installées au Centre, Sud et Nord du territoire. Quels sont les enjeux et objectifs inhérents à ce processus de labellisation ? Les précisions successives de Philippe Jock, le président de la CCIM et de Maryse Jean-Marie, vice-présidente de l’Espace Sud en charge du développement économique. Reportage Mike Irasque


Philippe Jock :

Nous serions très heureux que 70 à 75% des inscrits soient labellisés »

Antilla : Cette année ce dispositif AQCS a été étendu à nos marchés communaux : d’autres extensions sont-elles « dans les tuyaux » ?

Philippe Jock : Ce label est national et nous avons travaillé avec d’autres CCI d’outremer pour que les marchés soient en effet pris en compte. Nous sommes très heureux que cela soit fait, mais il n’y a pas aujourd’hui d’autres extensions envisagées. Et concernant cette démarche de labellisation qui débute, nous serions très heureux que 70 à 75% des inscrits soient labellisés.

Cela vous semble objectivement réalisable ?

Oui. Avec une promotion de 85 entreprises candidates réparties sur le territoire, je pense objectivement qu’on peut arriver à faire en sorte qu’il y ait un nombre satisfaisant de labellisés.

Dans votre discours vous avez notamment fait état d’un « diagnostic » relatif à chaque marché communal de Martinique : par qui ce diagnostic est-il établi ?

Ce diagnostic est établi par les équipes de la CCIM sur la base d’une charte nationale, que nous avons adaptée à l’outremer.

C’est-à-dire plus précisément ?

Quand nous avons dit que nous allions faire une labellisation des marchés, certains nous ont regardés avec de grands yeux, en disant que dans ces marchés il y avait beaucoup d’économie informelle. Nous avons répondu que c’était en effet un problème, nous avons dit aux représentants de l’Etat que c’était une difficulté, parce que les financements européens, notamment ceux du fonds React-UE*, supposent que les entreprises qui en bénéficient soient dans les règles. Nous avons donc présenté cette opération comme une promotion vers la régularisation de certains commerçants, et je pense vraiment que l’après-Covid est le bon moment pour ramener beaucoup d’acteurs de cette économie informelle vers une économie régulière.

Quelle est la part de cette économie informelle dans les marchés de nos communes ?

Cette part est majoritaire dans certains marchés. C’est donc ce travail de diagnostic que nous faisons, et à partir de ce diagnostic on avance avec les communes et avec d’autres structures pouvant permettre à ces acteurs économiques de revenir à la régularité – je pense singulièrement à l’ADIE* -, notre travail d’identification permettra donc de mettre ces personnes en lien avec ceux qui peuvent les ramener vers une situation normale et régulière.

Concernant la part Fonds Social Européen (FSE) de ce fonds « React UE », la CCIM a obtenu 100% de subventions : était-ce lié aux conséquences de la « crise Covid » ?

Absolument. C’est très exceptionnel et lié à des sommes qui ont été abondées par l’Europe afin d’accompagner la sortie de crise. Nous n’avions jamais eu un tel niveau de subventions, et je pense que nous ne l’aurons plus (sourire) ; l’idée était vraiment de répondre à l’appel à projets qui avait été lancé par la DEETS*, de démontrer l’intérêt pour le petit commerce et le territoire, et nous avons donc été retenus pour cet appel à projet.

Vous avez donc reçu avec satisfaction les mots du sous-préfet du Marin, Sébastien Lanoye, présent ce soir et qui a félicité la CCIM pour son positionnement sur nombre d’appels à projet(s) ?

Oui parce que c’est la règle que nous nous sommes fixés. Nous observons tous les appels à projet, locaux et nationaux, et nous sommes d’ailleurs dans une réflexion avec CCI France – qui est la ‘’structure-chapeau’’ de toutes les CCI – afin qu’il y ait une veille à Bruxelles, pour les appels à projets qui pourraient nous concerner et pour lesquels nous essaierions de répondre conjointement avec les CCI de Guadeloupe et de Guyane. Quand les appels à projet sont sur des montants significatifs nous allons donc nous regrouper pour essayer d’y répondre. Et éventuellement avoir des réponses communes pour l’ensemble des départements et régions d’outremer.


Maryse Jean-Marie :

C’est sur cette fierté là que nous devons compter… » 

Antilla : Quels mots vous inspire, spontanément, cette démarche de labellisation ?

Maryse Jean-Marie : Je serais tentée de dire que c’est l’attractivité du territoire, que c’est la professionnalisation des métiers pour les commerçants, et que c’est surtout le pouvoir d’achat d’un territoire. Vous savez, on ne peut pas faire les uns sans les autres. L’Espace Sud n’a pas d’autorité en termes de labellisation – cela revient notamment à la CCIM – et on fait toujours mieux quand on est ensemble. En 2023 nous ne pouvons plus travailler chacun de son côté ou dans son ‘’clan’’ : il faut mutualiser les efforts pour obtenir des résultats. Il est donc important d’acter cette démarche dans le cadre de mutualisation(s), et surtout de montrer aux publics concernés, les chef.fe.s d’entreprise, que les institutions savent travailler ensemble. Et c’est important de lutter contre cet apriori.

Quel sera précisément l’accompagnement de l’Espace Sud à l’endroit des commerçants candidats ?

L’Espace Sud et la CCIM ont établi ce partenariat parce qu’il s’agit là de proximité. Le développement économique est la première compétence obligatoire d’un EPCI ; nous avons donc les outils, la logistique, la connaissance du territoire et nous mettons en œuvre des actions telles que, par exemple, le système de management environnemental, la revitalisation des centre-bourgs, sujet très important qui revient aux EPCI. Les équipes techniques et les agents du développement économique de l’Espace Sud seront en accompagnement avec la CCIM, pour mieux encadrer et approcher les commerçants du sud ; nous serons là en renfort et en facilitateurs auprès de ces commerçants. Nous avons donc un travail de proximité, d’approche, de démarche(s) et de réception, car l’une de nos missions à l’Espace Sud est de recevoir les porteurs de projet(s), notamment pour les orienter correctement vers les différentes institutions qui pourraient fortifier leurs projets.

Sur les 85 entreprises candidates à cette labellisation, 32 sont des entreprises installées dans le sud : ce pourcentage vous satisfait-il ?

Cela ne peut pas me satisfaire vu le nombre d’entreprises qu’il y a dans le sud. Toutefois, nous sommes un territoire de TPE (Très Petite Entreprise) largement familiales, et les gérants arrivent à un âge où ils n’ont pas forcément de successeurs. Par conséquent beaucoup d’entreprises ferment. De plus, les chef.fe.s d’entreprise qui ont une soixantaine d’années aujourd’hui, estiment qu’ils et elles n’ont plus l’âge d’aller vers cette démarche de label AQCS. Et c’est fort dommage parce que ce label leur permettrait peut-être de trouver des successeurs, qui ne seraient pas forcément des membres de leurs familles. Pour la dernière édition, 46 entreprises ont été labellisées : je suis persuadée qu’il y en aura beaucoup plus cette année parce que les crises Covid et ukrainienne que nous venons de vivre, favorisent l’émergence des volontés et l’envie, la ‘’soif’’ de sortir la tête de l’eau. D’ailleurs le fait que quasiment toutes les 32 entreprises candidates du sud soient représentées ici ce soir, montre vraiment l’émergence d’une forte volonté des commerçants de s’en sortir.

Malgré les conséquences de ces crises et la concurrence des centres commerciaux, il y a donc une sorte de résilience chez ces commerçant.e.s ?

Plus qu’une résilience, il y a une fierté. La fierté de dire ‘’j’ai résisté ; malgré tout ce qu’il s’est passé, je suis toujours là.’’ C’est sur cette fierté là que nous devons compter, et sur laquelle nous devons nous appuyer.

Propos recueillis par Mike Irasque

Crédit photos : Kaza Com. *React-UE : Fonds financier né suite aux conséquences de la crise Covid.  ADIE : Association pour le Droit à l’Initiative Economique.  DEETS : Direction de l’Economie, de l’Emploi, du Travail et des Solidarités.

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