Vu sur novethic.fr – La COP27 de Charm el-Cheikh s’est achevée tard dans la nuit de samedi à dimanche 20 novembre. Les 196 pays présents se sont mis d’accord pour créer un nouveau fonds dédié aux pertes et dommages. Une décision historique. En revanche, les longues tractations de la fin n’ont pas permis d’évoluer sur la sortie des énergies fossiles. Explications.

Comme prévu, c’est principalement sur la question du financement des pertes et dommages que les discussions ont porté à la COP27. Consacré par l’accord de Paris de 2015, ce terme désigne les dégâts irréversibles causés par le dérèglement climatique. Pour l’heure, les financements climatiques existants ne sont consacrés qu’aux efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre (“atténuation”) ou aux mesures d’adaptation pour se protéger contre les impacts du réchauffement. Mais depuis trente ans, les pays les plus vulnérables, les plus touchés par les pertes et dommages, réclament à cor et à cri la création d’un nouveau mécanisme dédié, financé par les plus grands émetteurs.

C’est donc chose faite. La décision finale acte la création d’un “fonds de réponse aux pertes et dommages”. Le fonds devrait bénéficier à tous les pays en développement mais être orienté d’abord vers les pays les plus vulnérables. Ses modalités de mise en place devront être élaborées par un comité spécial pour adoption à la prochaine COP28. Il sera chargé d’identifier les sources de financement, de façon “large”, dans le but que le plus grand nombre de pays puisse y contribuer. “Au début de ces pourparlers, les pertes et dommages n’étaient même pas à l’ordre du jour. Et maintenant nous entrons dans l’histoire”, s’est réjoui Mohamed Adow, directeur de l’ONG Power Shift Africa.

Qui paye et qui reçoit ? L’UE a amorcé le débat

Pendant la semaine, l’Union européenne avait permis de faire bouger les lignes en infléchissant sa position. Jusqu’à présent opposée à la création de tout nouveau mécanisme de financement dédié aux pertes aux dommages, Frans Timmermans, le vice-président de la Commission européenne, a créé la surprise dans la nuit de jeudi à vendredi. Il a proposé de créer un nouveau fonds dès cette année, mais à plusieurs conditions. D’abord, que celui-ci soit uniquement destiné aux pays les plus vulnérables, et non pas à tous les pays en développement, excluant par exemple le Pakistan, qui a subi cet été d’importantes inondations. Du côté des donateurs, qu’il soit abondé par d’autres contributeurs que les pays développés, une allusion à la Chine, mais aussi à l’Arabie Saoudite et au Qatar. Enfin, que ces financements s’accompagnent d’engagements climatiques renforcés.

Cela a eu pour conséquence de porter le débat sur qui paye et qui reçoit et de remettre en question la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), signée en 1992. Elle distingue les pays riches (annexe 1), qui abondent les fonds, du reste du monde (annexe 2), qui perçoit le financement. L’argument consiste à dire que depuis 1992, les choses ont évolué et que la liste des pays riches devrait être revue. “Ce sont deux lignes de failles de nature très géopolitique qui traversent le G77+Chine (historiquement le groupe des pays en développement). Ce sont des discussions qui auraient eu lieu quoiqu’il en soit mais qui font tomber un tabou sur l’enjeu de qui est éligible à ces fonds”, commente Lola Vallejo, la directrice du programme climat de l’Iddri. Le débat, amorcé à cette COP27, aura bien lieu d’ici l’an prochain.

Pas de sortie des énergies fossiles

Parmi les autres éléments à retenir de la décision finale, les observateurs s’accordent sur le fait que rien n’a évolué par rapport au Pacte de Glasgow, adopté à la COP26 de 2021. L’objectif 1,5°C a été sauvé in extremis. Une rehausse des engagements d’ici à 2028 est aussi demandée aux pays qui ne l’ont pas encore fait. Mais la sortie des énergies fossiles n’est quant à elle toujours pas actée, et on continue de parler d’une sortie progressive du charbon. Pas de mention du pétrole et du gaz, malgré une proposition de l’Inde en ce sens, fustigée l’an dernier pour avoir affaibli le texte sur ce sujet justement.

“La présidence égyptienne a produit un texte qui protège clairement les États pétroliers et gaziers et les industries des combustibles fossiles. Cette tendance ne peut pas se poursuivre aux Émirats arabes unis l’année prochaine”, a déclaré Laurence Tubiana, la présidente de la Fondation européenne pour le climat. La COP28 se tiendra en effet aux Emirats arabes unis, et promet d’être tout aussi houleuse que celle qui s’achève sur la question des énergies fossiles. Pour la COP29 de 2024, la Bulgarie et la République tchèque se sont portées candidates, tandis que le Brésil et l’Australie souhaitent respectivement accueillir les COP suivantes.

Concepcion Alvarez @conce1

Photo @MOHAMMED ABED / AFP

Partager.

Laissez votre commentaireAnnuler la réponse.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Exit mobile version