Après Catherine Conconne, favorable à la loi autorisant le mariage entre personnes du même sexe, la parole est à l’opposition, en la personne du secrétaire départemental de l’UMP Martinique, Fred-Michel Tirault. 

 

 

 

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« Egalité des droits entre tous les citoyens, hétéros et homos », tel fut en substance le mantra des partisans du texte de loi. Fred-Michel Tirault y voit pour sa part, une stratégie de la part de certains. « Pendant très longtemps, les associations homosexuelles se positionnaient sur le droit à la différence », débute-t-il, « mais le droit à la différence ce n’est pas porteur. Ces associations ont donc basé leurs revendications sur la notion d’égalité. Nous sommes passés du droit à la différence, au droit à l’égalité avec le mariage pour tous. » Et d’ajouter dans le même souffle : « Pourquoi on n’accepte pas le mariage polygame ? A Mayotte ce type de mariage était autorisé jusqu’à récemment. Et quand ils ont voulu devenir département français, on leur a dit ‘vous entrez dans la République française, donc vous entrez dans ses valeurs.’ Ils ont objecté qu’ils avaient toujours vécu comme cela, qu’ils avaient obligation de traiter leurs femmes de façon égalitaire ; on leur a répondu que c’est comme ça et pas autrement. Car le mariage c’est une question de valeurs. Les associations homosexuelles savaient que les valeurs d’égalité et de tolérance allaient parler aux Français ; ça a été un biais afin d’arriver à leur objectif. Donc cette notion d’égalité, c’est à la fois de l’habillage et de la com.’ » « Le mariage, tel qu’il est conçu, c’est un contrat et une institution », poursuit Fred-Michel Tirault, « un contrat entre un homme et une femme, pour fonder un foyer – car c’est aussi l’objectif. Bien-sûr le Droit peut évoluer, mais le Droit est au service des volontés et des conceptions. Ce mariage, ce ne sont pas mes conceptions et valeurs ; la polygamie non plus. D’ailleurs elle est beaucoup plus répandue que le mariage homosexuel ; beaucoup plus de pays reconnaissent le mariage polygame que le mariage homosexuel. Donc c’est une question de valeurs, et après ces valeurs se traduisent en droit. » Selon notre interlocuteur, le législateur français a inclus et assigné des objectifs au mariage. « Le mariage entre deux personnes de sexes différents a une portée générale », assure Fred-Michel Tirault, « le législateur a estimé que le mariage était le meilleur cadre pour élever des enfants, et quand on lit les articles du Code civil tels qu’ils sont encore rédigés aujourd’hui, on voit bien que c’est pour ça. La question c’est ‘veut-on changer de cadre et de société ?’. « Les concepteurs du mariage homosexuel disent qu’il ne change pas grand-chose ; ce n’est pas vrai. On passe d’une conception altruiste du mariage, à une conception individualiste. C’est l’individu qui prime : ‘je suis un homme, j’aime cet homme, je me marie avec lui.’ Idem pour deux femmes. » Une conception « altruiste » du mariage ? « C’est un contrat entre deux personnes, mais c’est surtout une institution faite pour être le 1er noyau d’une société », répond Fred-Michel Tirault. Donc pour créer un foyer ? « Oui, mais aussi car on a estimé que pour que des enfants se développent correctement, il fallait qu’ils aient une valeur paternelle et maternelle. » Des « préconisations » inscrites dans le Code civil ? « Absolument, et c’est pour ça qu’il faut le lire », souligne-t-il aussitôt, « c’est ça la conception. On a laissé penser que le mariage c’étaient deux personnes qui s’aiment ; ça c’est la conception religieuse, l’obligation pour le mari de chérir sa femme et inversement. Mais dans le mariage en France, l’objectif 1er est de fonder un foyer. Les obligations du ‘mariage français’ sont de vivre ensemble, la fidélité, le secours etc., et l’obligation de s’occuper des enfants. On a estimé qu’un couple, un homme et une femme – on est obligés de préciser car ils sont en train de dévoyer la notion de couple –, était le meilleur moyen d’élever des enfants. Et ce n’est pas seulement la France qui a pris cette conception ; c’est aussi la conception de la ‘Convention des droits de l’enfant’, signée par plus de 180 pays dont la France, qui dit que l’état doit tout mettre en œuvre pour que l’enfant soit élevé par un père et une mère. Cette loi est contraire à cette convention. » Dans ce cas pourquoi la France est-elle le 14ème pays au monde (et le 9ème en Europe) à avoir instauré le mariage entre personnes homosexuelles ? « Ce n’est pas la 1ère fois que le Conseil constitutionnel et la France valident des lois contraires aux conventions internationales », objecte Fred-Michel Tirault, « et les autres pays n’ont pas les mêmes conceptions du mariage que la France, même pour le mariage homosexuel. » Il poursuit : « Les associations homosexuelles ont voulu le mariage afin d’avoir une clé pour aller vers l’adoption. Parce que l’adoption était refusée aux couples (tiens ? un lapsus ?, ndr) homosexuel(le)s. » Le terme « valeurs » revient très souvent dans le propos de notre interlocuteur : quels mots met-il derrière ? « Ce sont des principes qui fondent une société. Et la nôtre est fondée sur la monogamie. Ce sont nos valeurs et nos conceptions qui doivent nous guider. Après on les traduit en lois. » Dans leur argumentaire, deux figures du PPM – Serge Letchimy et Catherine Conconne – ont semblé faire de la négation de l’égalité des droits subie par nos ancêtres, l’une des raisons de leur adhésion au texte de loi. Mais pour Fred-Michel Tirault, l’ « agenda » du président du PPM est tout autre. « Letchimy surfe évidemment sur la corde sensible, et je suis persuadé qu’il n’est pas convaincu lui-même de ce qu’il a dit », lance t-il en effet, « la preuve, il a attendu le dernier moment pour faire connaître son vote. Ca donne plutôt l’impression qu’il a voulu flatter Mme Taubira, voulu montrer qu’il est pro-socialiste, comme ça il y aura le retour d’ascenseur. C’est tout. Ca ressemble à de la politique politicienne, et c’est de la com’. » La robe noire (en civil) tient alors à prouver qu’en France, le mariage est basé sur la procréation. « En 2006, le Code civil – article 144 – a fixé l’âge du mariage à 18 ans pour l’homme et pour la femme. Mais avant 2006 ? Toujours 18 ans pour l’homme, mais 15 ans pour la ‘femme’. Et personne n’a jamais crié à la discrimination. » Et pourquoi cette distinction d’âge ? « Quand on a rédigé cet article, en 1803, 15 ans était l’âge où l’on pouvait faire des enfants. C’est la preuve que le mariage français est basé sur la procréation. Et quand on lit les 100 et quelques articles sur le mariage, on voit bien cette conception basée sur la procréation, le foyer, la famille. » « C’est normal que les religions aient pris leur part dans ce débat », poursuit Fred-Michel Tirault (qui nous dit être chrétien, catholique), « par contre il ne faut pas faire l’amalgame entre mariage religieux et mariage civil. Certains l’ont fait et cela a peut-être nui aux ‘anti mariage pour tous’, car on les a catalogués dans les cathos réactionnaires, intégristes, etc. Si les politiques, les sociologues, les assistantes sociales qui sont contre cette loi étaient montés au créneau, ils auraient expliqué les raisons profondes pour lesquelles ce projet est dangereux. Parce que ça change complètement la conception du mariage. Et on avait oublié cette conception. Un législateur fait une loi car il a un intérêt, un objectif. Et dans tous les domaines : économie, urbanisme, etc. Le mariage est une institution créée dans l’intérêt du plus grand nombre. C’est la conception civile du mariage. » Les Martiniquais sont-ils majoritairement homophobes Fred-Michel Tirault ? « En Martinique il y a des homophobes, comme partout », nuance l’intéressé, « mais on peut être contre ce mariage – et il y a des homosexuels qui sont contre – sans être homophobe. Quand on dit qu’on est contre, certaines personnes vo

us traitent d’homophobes. C’est de l’intolérance ; elles ne veulent même pas discuter. Je suis contre, ça ne veut pas dire que je suis homophobe. » Mais les valeurs dont parle Fred-Michel Tirault à propos du mariage entre homosexuel(le)s, sont-elles de droite ou de gauche ? « En tout cas elles sont partagées par la grande majorité des Martiniquais », souligne-t-il, « la famille est souvent défendue par la droite, un peu moins par la gauche. La gauche est plus individualiste ; elle n’emploiera pas ce mot mais parlera d’épanouissement personnel, de respect de la personne humaine. Sur le mariage homosexuel, la droite a dit que ça dépassait l’individu mais que ça concernait la société. C’est une ligne de démarcation entre droite et gauche. » Et notre interlocuteur d’ajouter, dans un sourire : « Sur ce débat la Martinique s’est découverte de droite ; 90 % des députés de droite ont voté contre le texte, 95% des députés de gauche ont voté pour. » Les voies (les voix ?) de l’électorat martiniquais sont décidément impénétrables. Mike Irasque. n

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