Plus que quelques jours pour découvrir la grande exposition du plasticien-performer Habdaphaï à la galerie André Arsenec de l’Atrium,« Dialogue avec le temps Confiné, Déconfiné, Reconfiné », est la restitution d’un univers pictural intense qui échappe à l’enfermement par une déflagration créative. Certainement, l’une des  périodes les plus fortes de l’artiste. On y découvre aussi son dernier livre, une autobiographie très émouvante, sous forme d’entretiens,  livrés à la plume de Lydie Lorssery.

Le confinement, la contrainte et la privation de liberté de ce temps aberrant que nous avons traversé,  ont véritablement exacerbé sa créativité et c’est ce que l’on découvre dans cette exposition-explosition, comme un chemin, une promenade qui livrerait toutes les expressions de cet artiste prolifique et transdisciplinaire : dessins, peintures, installations, vidéos, performances, textes amis et questionnement politique…Toujours en quête de sa Martinicanité, Habdaphaï va encore plus loin, en compagnie de ses personnages fils d’Ariane, « L’Etre des lunes multiples » et ‘L’Homme à la tête de Cocolobe »dans son concept de synchrétisme pictural. Plus que jamais, il nous livre son sens de la relation à la vie, à la perpétuelle vivance et son extraordinaire capacité à dépasser toutes les frontières.  Il dit «  C’est ma relation avec le trop plein, aidé par de la mine de plomb, des pastels secs et gras, des traces d’eau et aussi des gouttes de sueur, qui va mettre en place la concentration nécessaire, créer ce « vide habité » qui précède la création ». D’ailleurs, il faut commencer la visite par l’installation des dessins, intitulée,  « Le confinement, un exhausteur de créativité », dont le commissaire a été confié à Catherine Blanchard, car c’est un prélude à l’exposition.

Et c’est le verbe sensible et poétique de l’auteure Dominique Daeschler qui introduit et guide le mieux le voyageur-regardeur, dans ce voyage multidimensionnel : « …L’homme se jette à l’eau, arraisonné par tous ces noms lourds de sens, porteurs d’espérance, de désespoir, livrés aux interprétations, aux dénis, aux défis. Il n’est pas cargaison. Il ne peut être arrimé. Alors il reconstruit, fabrique son propre bateau. S’il fouille l’antan, il se nourrit des embruns, de l’instant et de son temps sans usure. Allégé, son esprit navigue, prend la barre et défie l’horizon. C’est lui le mât, « le poteau du ciel, le pilier cosmique »Son imaginaire est hissé en grand-voile, refusant le repli, éloignant les absolus, fier de la conquête de soi assumant ses prises de risques artistiques… »

Son nouveau livre, MARTINICA NITE/Nèg, est raconté comme une auto-biographie de l’artiste, entrecoupée et rythmée par des séries picturales et des citations littéraires. Une amitié complice lie l’artiste et l’auteur qui le fait parler à la première personne et livre son intime, son enfance, ses déclics, ses cheminements magiques. Ce livre est sans doute précieux pour comprendre l’œuvre d’Habdaphaï et son berceau, la Martinique. Il a lui aussi jaillit de l’enfermement…

Tous ces événements habdaphaïens, qui ont ponctué la vie culturelle martiniquaise de ces derniers mois ne manqueront pas d’interpeller l’observateur, dans les temps bouleversés que nous traversons qui incitent au  replis et à la peur, eux, au contraire, s’inscrivent dans un foisonnement vif et fertile.

Nathalie Laulé

 

 

 

 

 

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