La forêt amazonienne est coupée pour laisser la place à des plantations de soja et des élevages de bœufs.
Martin Bureau | AFP
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C’est un symbole du monde d’avant qui est en train de s’éteindre. Le Mercosur, ce traité de libre-échange entre l’Union européenne et des pays sud-américains dont les négociations ont duré plus de 20 ans, pourrait bien ne pas voir le jour pour des raisons environnementales. Un nouveau rapport remis au gouvernement estime que cet accord commercial va accélérer la déforestation en Amazonie. L’Exécutif assure que la France est en l’état opposé au projet.
C’est un des plus vastes accords de libre-échange jamais conclu avec en jeu plus de 770 millions de consommateurs et 18 000 milliards d’euros de PIB et il pourrait bien ne pas voir le jour pour des raisons environnementales. Ce traité, signé l’année dernière par l’Union européenne et le Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay), doit être ratifié par chaque État membre de l’Union européenne pour être mis en œuvre. En France, face à la levée de boucliers des écologistes, l’ancien Premier ministre Édouard Philippe avait commandé une évaluation indépendante sur les effets potentiels du traité en matière de développement durable. Et les résultats, qui viennent d’être remis au gouvernement Castex, sont sans appel.

La commission, présidée par l’économiste de l’environnement Stefan Ambec, a calculé que la hausse de 2 à 3 % de la production de viande bovine qui résulterait d’une plus grande ouverture des marchés des deux continents devrait conduire, en mobilisant des pâturages supplémentaires, à une “accélération de la déforestation annuelle de l’ordre de 5 %” pendant les six années suivant l’application de l’accord. En démultipliant les émissions de CO2, cette déforestation rend le coût environnemental de l’accord trop élevé par rapport à ses bénéfices économiques, souligne le rapport.

Emmanuel Macron contre le Mercosur “en l’état”

D’autant que ce traité pourrait faire basculer l’Amazonie dans ce que les scientifiques appellent le “point de non-retour”. Aujourd’hui, 17 % de la forêt a disparu. Et la déforestation de ce poumon de la terre ne cesse de s’accélérer avec une explosion de plus de 30 % en un an. Pour le climatologue et chercheur brésilien à l’Université de Sao Paulo Carlos Nobre si l’Amazonie perd entre 20 et 25 % de sa surface alors elle ne pourra plus se régénérer et atteindra ce point de non-retour.

En réponse, le gouvernement a réagi assurant que la France est opposée au projet en l’état. Elle “exige”, pour poursuivre les négociations, le respect de l’Accord de Paris sur le climat et l’alignement des importations sur les normes sanitaires et environnementales fixées par l’Union. “Le projet d’accord n’a aucune disposition permettant de discipliner les pratiques des pays du Mercosur en matière de lutte contre la déforestation. Ça, c’est le manque majeur de cet accord et c’est la raison principale qui fait que en l’état, les autorités françaises s’opposent au projet d’accord”, a affirmé le gouvernement à la presse.

L’accord échoue au “test de durabilité”

Le rapport Ambec n’est pas le seul à pointer des risques importants découlant de l’accord commercial. Une nouvelle étude publiée le 9 septembre dans One Earth par des chercheurs de l’Université d’Oxford et de Nature Conservancy estime que le traité “échoue au test de durabilité”. Il pointe l’absence de protection des populations autochtones mais également une “contradiction directe avec les objectifs du Green deal”, ce Pacte vert porté par l’exécutif européen qui vise à atteindre la neutralité carbone en 2050.

Face à ce nouveau rapport, la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l’homme et l’Institut Veblen ne demandent pas de revoir le contrat mais d’y mettre complètement un terme. “C’est la nature même du projet d’accord visant à promouvoir les exportations de viande du Mercosur en échange de voitures, de machine et de produits chimiques européens, sans aucune obligation environnementale qui entraînera une catastrophe pour le climat et la biodiversité”, croient-ils.

Marina Fabre, @fabre_marina avec AFP

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