Au-delà de ses plages et de sa grande nature, la Martinique possède une Histoire et des traditions d’une richesse insoupçonnée. Distilleries de rhum, plantations fruitières, exploitations sucrières, art du bèlè… ce corpus culturel révèle un passé douloureux qui enrichit le séjour dans cette destination caraïbe. Article paru sur www.tourmag.comRédigé par Jean-François Rust le Lundi 12 Février 2024


Photo de couverture : Martinique : le Domaine de la Pagerie est l’exemple type d’une ancienne habitation-sucrerie – Crédit JF Rust


Trois-Îlets, au sud de la baie de Fort-de-France. Cette commune, qui abrite le plus grand nombre d’hôtels balnéaires de l’île aux fleurs, est aussi l’hôte de trois sites patrimoniaux majeurs.
Trois lieux qui disent tout, ou presque, de l’histoire esclavagiste de la Martinique, dont l’île est l’héritière douloureuse. Un passé impossible à occulter si l’on veut comprendre son identité.

La Savane des Esclaves en est une parfaite illustration. Dans un vallon boisé, l’autodidacte Gilbert Larose a conçu un écomusée passionnant, rappelant l’histoire du peuplement martiniquais et la vie sous tutelle coloniale.

Des indiens Caraïbes exterminés (les kalinagos) aux villages créoles, en passant par les cases d’esclaves, la balade dans ce parc mémoriel raconte la dureté effrayante de la vie aux Antilles à partir du 17ème s.

« J’ai imaginé ce lieu pour que les gens connaissent notre histoire, la comprennent et respectent ce que nous sommes », explique Gilbert Larose. Pari tenu. Non loin de là, le Domaine de la Pagerie est l’exemple type d’une ancienne habitation-sucrerie. Modèle emblématique de l’exploitation esclavagiste en Martinique, cette « ferme » de canne à sucre exploita au milieu du 18ème s. jusqu’à 350 esclaves. A tel point qu’elle fut surnommée « la Petite Guinée »…

La Pagerie, lieu de naissance de l’impératrice Joséphine

La visite dévoile l’organisation sociale sinistre de l’habitation, où le maître, français, régnait sans partage sur les esclaves, domestiques, nourrices, artisans…

La Pagerie est aussi célèbre pour avoir vu naître Joséphine, future impératrice, femme de Bonaparte. Son parcours et celui de sa famille sont méthodiquement retracés.

La canne à sucre est toujours l’une des productions principales de l’île. 200 planteurs en récoltent chaque année 200 000 tonnes.

Aux Trois-Îlets encore, la Maison de la Canne, aménagée dans une ancienne distillerie, retrace les grandes étapes de cette aventure agricole. Elle revient aussi sur le système d’exploitation négrier, tant celui-ci, aboli définitivement en 1848, a marqué la population d’un sceau indélébile.

La Martinique : des rhums au pur jus de canne

De la canne au rhum, il n’y a qu’un pas. Celui qui permet de passer des tragédies du passé aux plaisirs actuels.

Autant le savoir : la Martinique est l’île des meilleurs rhums du monde ! La raison ? 95% de la production de la planète provient de la distillation des résidus de canne, la mélasse.

Les 5% restant sont élaborés avec du pur jus de canne et l’île en est la championne incontestée.

La majorité des stocks mondiaux de vieux rhums agricoles se trouvent en effet en Martinique. Labellisé d’une AOC depuis 1996, ce rhum est produit par huit distilleries, ouvertes au public. Et même si l’on ne goûte pas cet alcool, ne boudez pas la visite.

Les parcours de découverte en période de récolte de la canne (de février à juin) s’accompagnent en général d’un musée ou d’une boutique.

St-James, musée et bar vintage

Au sud lors d’un séjour à la Martinique, on s’immergera dans l’univers des distilleries Trois-Rivières, La Mauny ou l’Habitation Clément. On filera aussi au nord, histoire de découvrir cette partie montagneuse et verdoyante, déployée autour de la célèbre Montagne Pelée. A Macouba, la distillerie J.M. promet une visite exquise « du jardin à la bouteille ».

Neisson, au Carbet, contentera les amateurs d’excellence : ce rhum est parfois considéré par les puristes comme le best des best. Impossible aussi de passer à côté de St-James, à Sainte-Marie, et de son musée et bar vintage, aménagés dans l’ancienne maison coloniale.

Puisque l’on est au nord, on ira faire également un tour à Saint-Pierre. Une autre mémoire douloureuse y pèse, celle de l’explosion du volcan de la Montagne Pelée, en 1902. Une tragédie (28 000 morts !) relatée avec émotion au musée Franck Perret.

Relance du café martiniquais
Le nord de la Martinique est un gardien du temple de l’histoire locale. Les routes de l’intérieur sillonnent des terres à bananiers, autre production phare.

La Route de la Trace, de Fort-de-France au Morne-Rouge, plonge dans l’univers luxuriant de l’île, là où poussent goyaviers et caféiers, dont on tente de relancer la variété premium, arabica typica.

La côte atlantique rappelle une fois encore l’héritage africain. Fief du bèlè, Sainte-Marie vibre pour cet art musical issu du labeur des champs coloniaux. Mêlant chant, danse, tambour et ti-bwa, ce style est à découvrir à la Maison du Bèlè, quartier Reculée.

Restera à profiter des plages. Sur le sable fin des Anses d’Arlet ou des Trois-Îlets, au sud, sur celles de l’Atlantique ou sur le sable noir volcanique, au nord, le farniente et les activités nautiques rappelleront que la Martinique est autant une destination de détente que de découverte.

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