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Epandage de pesticides dans un champs
© Christophe Magdelaine / www.notre-planete.info – Licence : Tous droits réservés

Des décennies après, les champs convertis en agriculture biologique continuent de porter les stigmates des pesticides utilisés en agriculture conventionnelle avant eux, confirmant la persistance des pesticides dans l’environnement pendant des décennies.

Contrairement à ce que l’on pourrait croire et entendre, l’usage des pesticides augmente dans le monde, y compris en France. Même si, en même temps, l’agriculture biologique qui en utilise peu voire pas du tout, gagne du terrain.

Ces dernières années, de nombreuses terres ont été converties, passant de l’agriculture conventionnelle, grande consommatrice de pesticides, vers l’agriculture biologique. Cependant, des chercheurs européens (majoritairement Suisses) ont montré que des pesticides épandus il y a des décennies continuent de souiller durablement les terres.
Ce constat a été effectué dans une centaine d’exploitations agricoles en Suisse dont l’abondance en micro-organismes a largement diminué à cause de la persistance des pesticides, malgré la conversion en culture biologique.

En effet, les pesticides sont des Polluants Organiques Persistants (POP) qui perdurent dans l’environnement, s’accumulent dans les graisses et sont, d’une manière générale, dangereux pour la santé : cancers, altération du système immunitaire, problèmes de reproduction…

Certaines fermes en agriculture biologique sont installées sur des terres traitées avec des pesticides dans le passé. Mais on ne sait pas vraiment quelle est la persistance des pesticides dans les champs gérés de manière biologique et quelles sont leurs répercussions sur la vie du sol, en particulier les microbes et les champignons bénéfiques du sol (comme les mycorhizes), des années après leur application.
C’est pourquoi, Judith Riedo, Thomas Bucheli, Florian Walder, Marcel van der Heijden et leurs collègues ont examiné les niveaux de pesticides et leur impact sur la santé des sols dans les fermes gérées avec des pratiques conventionnelles par rapport aux pratiques biologiques, ainsi que dans les fermes converties aux méthodes biologiques.

Les chercheurs ont mesuré les caractéristiques des sols en surface et les concentrations de 46 pesticides régulièrement utilisés ainsi que leurs produits de dégradation dans 100 champs qu’ils soient exploités selon des pratiques conventionnelles ou biologiques.

Sans surprise, les chercheurs ont trouvé des résidus de pesticides sur tous les sites, y compris les fermes biologiques converties depuis plus de 20 ans.

En France, pour qu’une culture soit certifiée « bio », une période de conversion doit être respectée : 2 ans avant l’ensemencement pour les cultures annuelles ; 2 ans avant l’utilisation en alimentation animale pour l’herbe ; 3 ans avant la récolte pour les pérennes. La période peut être plus courte ou plus longue selon les antécédents (Produire BIO).

Ce qui confirme l’omniprésence et la persistance des pesticides. Des molécules de DDT (un insecticide interdit en Europe depuis 1972) ont été découvertes à plus de 3 000 mètres de profondeur au large de la Californie, précisait en novembre 2020, Wilfried Sanchez, directeur scientifique adjoint en charge de la thématique « contaminants et effets sur le milieu marin » à l’Ifremer.

Malgré le passage en agriculture biologique, plusieurs herbicides et un fongicide sont restés dans le sol. Cependant, le nombre total de produits chimiques synthétiques et leurs concentrations diminuent de manière significative au fil du temps en gestion biologique.

Les voies de contamination pourraient également provenir des des pesticides qui se dispersent dans l’air Selon les chercheurs, certains des pesticides auraient pu contaminer les champs organiques en voyageant dans l’air, l’eau ou le sol à partir des champs conventionnels voisins. Même l’eau de pluie et le brouillard peuvent contenir respectivement de 0,1 µg/l jusqu’à 14 µg/l de pesticides d’après des relevés effectués par l’INRA. Une étude d’AirParif de 2007 a même retrouvé une vingtaine de pesticides différents dans l’air de Paris !

Enfin, l’équipe a constaté une plus faible abondance en microbes bénéfiques pour les sols lorsque les champs étaient davantage traités avec des pesticides, ce qui suggère que la présence de ces substances peut diminuer la santé du sol.


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