L’Hôtel Batelière a accueilli une conférence sur la loi de finances, mettant en lumière les réformes fiscales majeures, ce jeudi 22  février. Parmi elles, l’harmonisation de la fiscalité des locations touristiques, la création du statut des Jeunes Entreprises de Croissance, et l’utilisation des réseaux sociaux pour contrôler la fraude. Face à la pression, les entreprises devront investir dans l’innovation et renforcer leur agilité pour prospérer en 2024.

L’Hôtel Batelière a récemment abrité une conférence organisée par l’Ordre des Experts-Comptables, axée sur les nouvelles dispositions de la loi de finances, ce jeudi 22 février. Il s’agit d’un rendez-vous qui a lieu tous les ans. Animée par des experts-comptables de renom, l’événement visait à informer les acteurs économiques locaux. Au menu de cette rencontre : décryptage des changements fiscaux récents, avec un accent particulier sur la fiscalité des entreprises, les crédits d’impôt, les impôts locaux, la TVA, et les contrôles fiscaux.

Fiscalité des entreprises

L’un des points cruciaux abordés lors de la conférence portait sur l’objectif d’ harmoniser les modalités d’imposition des activités de location touristique avec celles de la location meublée. Cette mesure vise à simplifier et à rendre plus cohérent le cadre fiscal pour les acteurs opérant dans le secteur de la location, créant ainsi une équité entre les différentes formes de locations. “Le Sénat a adopté un texte marquant une transformation majeure dans la fiscalité des meublés de tourisme non classiques,” détaille Celine ANGELE, Expert-Comptable. “La réduction drastique du seuil d’application du régime micro, de 77 700 euros à 15 000 euros, et la modification du taux d’abattement de 50% à 30% illustrent ce changement. Un abattement supplémentaire de 21% est introduit pour les meublés de tourisme classés, sous conditions. Ces ajustements entreront en vigueur dès l’impôt sur le revenu de 2023, redessinant le paysage fiscal pour les acteurs de la location meublée.”

Parmi d’autres mesures ayant été prises, l’article 69 de la loi de finances 2024 marque la fin de l’exonération de l’impôt sur les sociétés pour les jeunes entreprises innovantes. Dès le 1er janvier 2024, un nouveau statut émerge : les Jeunes Entreprises de Croissance (GEC). “Alors que le statut précédent exigeait des dépenses en recherche et développement représentant 15% des charges de l’entreprise, le GEC abaisse cette fourchette à 5% à 15%,” précise Sandra MARIE-Joseph, autre expert-comptable. “Ce statut offre des avantages tels que l’exonération de cotisations sociales et la réduction d’impôts locaux. Notons que la suppression de l’exonération d’impôts sur le bénéfice n’affecte pas les avantages en matière d’impôts locaux, notamment la cotisation foncière des entreprises.” Les exonérations, prévues par des textes conséquents, demeurent en vigueur. En outre, l’article 69 maintient l’exonération des cotisations sociales pour les bénéficiaires des réunions sans aucune modification.

Concernant les impôts locaux, la loi de finances de 2024 revoit la suppression de la CVAE, initialement prévue en 2024, désormais étalée sur quatre ans jusqu’en 2027. Une recommandation est émise pour provisionner cette évolution d’ici la fin de l’année. La CET voit également des ajustements avec la suppression de la cotisation minimale de soixante-trois euros, tandis que les exonérations locales restent inchangées. Le plafonnement de la CFE évoluera progressivement de 1,53% en 2022 à 1,25% à partir de 2027, ajusté suite à la suppression progressive de la CVAE. L’actualisation des valeurs locatives, prévue pour 2023, est reportée à 2026, exigeant une adaptation proactive des entreprises locales.

Réformes TVA

En matière de TVA, la facturation électronique, initialement prévue pour juillet 2024, voit son échéance repoussée à septembre 2026, avec une mise en œuvre progressive selon la taille des entreprises. Cette évolution vise à faciliter la transition vers ce nouveau mode de facturation. Quant au seuil de franchise en base de TVA, il est ajusté à la baisse, passant à 85 000 euros pour les ventes de marchandises en 2024 et à 93 500 euros en 2025. Les prestations de services voient également leurs seuils révisés. Le dispositif expérimental pour les départements d’outre-mer est supprimé, alignant les seuils sur la norme nationale.

En parallèle, de nouvelles obligations déclaratives sont instaurées pour les cessions de sociétés à prépondérance immobilière réalisées à l’étranger. Ces cessions doivent être constatées dans un délai de deux mois par un acte notarié, offrant à l’administration les éléments nécessaires à la détermination du régime fiscal applicable. Ces ajustements soulignent l’importance d’une compréhension rapide et précise des nouvelles obligations fiscales pour les entreprises.

Les réseaux sociaux pour lutter contre la fraude

Dans la liste des mesures ayant été étudiées lors de ce débat, l’une d’elle a eu le mérite de faire sourire un bon nombre de personnes dans le public : l’utilisation des réseaux sociaux pour lutter contre la fraude. “La loi de finances confère aux agents des filières publiques la possibilité d’effectuer des enquêtes sur les réseaux sociaux,” explique Céline Angèle. “Ils sont désormais autorisés à accéder à des informations publiquement disponibles, même nécessitant la création d’un compte.” Ces enquêtes renforcées sur les réseaux sociaux ciblent des infractions telles que des activités occultes, constructions non autorisées, déclarations insuffisantes liées à des actes juridiques, défauts de déclaration de comptes ou d’assurance vie à l’étranger, et mouvements financiers liés à des activités illicites.

“Cette loi marque un tournant majeur dans les procédures de contrôle,” reprend-t-elle. “Désormais, les vérifications ne se limitent plus aux locaux de l’entreprise, mais peuvent être étendues à d’autres lieux, sous réserve d’accord. En l’absence d’accord, ces contrôles se dérouleront dans les locaux de l’administration. Cette évolution concerne les vérifications de comptabilité et les contrôles des organisations sans but lucratif à partir du 1er janvier 2024. Parallèlement, l’article 122 de la loi de finance 2024 renforce le droit de visite et d’immobilisation des agents des finances publiques.”

Bilan économique des entreprises

La conférence s’est conclue sur un bilan économique des entreprises en Martinique. “Avec 44,000 entreprises, majoritairement des TPE, le secteur tertiaire prédomine à 87%. Malgré un dynamisme entrepreneurial, la fragilité du tissu économique se manifeste par une faible création d’emplois,” détaille Jessica Dupot, directrice de l’accompagnement des entreprises.  “L’âge moyen des dirigeants est de 50 ans, avec 40% ayant plus de 55 ans. Les défis incluent les procédures collectives en hausse (89%), la transmission d’entreprise, la transition numérique, la transition environnementale, et la gestion des ressources humaines, notamment le recrutement et l’engagement des collaborateurs.”

Pendant son discours, Jessica Dupont s’est interrogée sur les défis auxquels font face les petites entreprises en matière de recrutement et d’engagement. En tant que TPE, elle a souligné la difficulté de recruter sans disposer d’une marque employeur robuste. Elle a également abordé la préoccupation majeure liée à l’engagement des collaborateurs, cherchant des solutions pour attirer et retenir les talents dans son entreprise. Elle a conclu en déclarant que ces enjeux constitueront incontestablement des points cruciaux pour les entreprises en 2024.

Pour cette année, c’est face à la pression accrue sur la transmission d’entreprise, aux défis de la transition numérique et environnementale, ainsi qu’à la complexité de la gestion des ressources humaines, que les entreprises devront affirmer leur résilience et leur adaptabilité. Pour prospérer dans ce contexte en évolution, les entreprises devront investir dans l’innovation, renforcer leur agilité face aux changements, et mettre en place des stratégie favorisant l’adaptation continue.

Thibaut Charles

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