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Jean-Michel Arnaud, Roger Karoutchi et Bertrand Jomier

Le Sénat fait ses propositions pour améliorer la gestion de la crise sanitaire

La mission d’information destinée à évaluer les effets des mesures prises ou envisagées en matière de confinement ou de restrictions d’activités a rendu hier son rapport concernant la situation aux Antilles et en Guyane.

Le rapporteur Roger Karoutchi s’est intéressé au volet sanitaire de la crise sanitaire que nous vivons aux Antilles et en Guyane. 30 % des décès liés au COVID en France sont des personnes qui vivaient outre-mer alors que la population d’Outre-mer ne représente que 4% de la population française ! Le tri des malades, l’intervention de renforts sanitaires de l’Hexagone, les évacuations sanitaires et un taux de couverture vaccinal ne dépassant pas les 40 % restent les traits marquant de cette pandémie dans nos territoires. Pour remédier à cette situation, le rapport sénatorial propose d’accentuer et cibler la mobilisation pour la vaccination avec une communication adaptée aux préoccupations de la population en s’appuyant sur des relais proches des gens : élus, associations, milieu professionnel, et une campagne vaccinale privilégiant les opérations de proximité.

Renforcer les infrastructures hospitalières

Pour anticiper une cinquième vague, le rapport préconise de maintenir les renforts actuels tant que la situation demeure incertaine et que les retards dans la prise en charge des non-covid ne sont pas résorbés, améliorer la coordination avec les personnels libéraux, mieux organiser et mobiliser la réserve sanitaire, renforcer l’autonomie des territoires en termes d’équipement, de matériels et de production d’oxygène. Il s’agit aussi bien sûr de renforcer les infrastructures hospitalières en engageant rapidement le plan spécifique à l’Outre-mer du Ségur de la santé et en maintenant une capacité en soins critiques supérieure à ce qu’elle était avant la crise, notamment à Saint-Martin. Il convient encore de renforcer l’attractivité de l’exercice médical dans nos contrées en prenant soin que le recours à l’intérim ne déstabilise pas nos équipes médicales hospitalières.

L’enjeu de cette mission parlementaire est d’alerter suffisamment les pouvoirs publics pour que la 5e vague attendue soit moins violente que la précédente.

FXG

Le volet économique

Le rapport sénatorial comporte un volet économique puisque, explique le rapporteur Jean-Michel Arnaud, si la première vague a entrainé un retrait de croissance de l’ordre de 3 à 6 % du PIB contre 8 pour l’Hexagone, la crise survenue en août dernier a aboutit à un risque de faillite pour 28 % des entreprises selon l’IEDOM. Si les 6 milliards d’aide de l’Etat ont permis d’éviter une catastrophe sociale, le tissu entrepreneurial fait de TPE n’a pas été suffisamment pris en compte. Ainsi, le rapport propose d’assouplir et d’élargir les critères d’éligibilité aux aides, de simplifier les modalités de demande, d’ajuster la durée du soutien. Il s’agit aussi d’améliorer le délais de paiement aux entreprises, de substituer l’obligation d’être à jour de ses charges fiscales et sociales par un engagement dans une procédure de régularisation, d’abaisser à 40 % au lieu de 60 % le seuil de perte de chiffre d’affaires rendant éligible au dispositif d’activité partielle, de retarder le remboursement des prêts garantis par l’Etat et d’augmenter l’enveloppe du plan de relance dédié à l’Outre-mer, mais pas seulement, car il s’agit aussi de co-construire ce plan avec les acteurs ultramarins.

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Trois questions à Bertrand Jomier, sénateur de Paris et président de la Mission commune d’information destinée à évaluer les effets des mesures prises ou envisagées en matière de confinement ou de restrictions d’activités.

« Le faible taux de vaccination nous expose à une 5e vague dramatique »

Comment avez-vous analysé le refus de la vaccination aux Antilles et en Guyane ?

Le taux faible de vaccination dans la population générale et plus spécifiquement la situation des personnels soignants ont été notre grand sujet de préoccupations et d’échange. Les deux îles ont eu à déplorer six cents décès l’été dernier — c’est considérable en proportion de la population. Or le faible taux de vaccination et de protection de la population expose les Antillais et les Guyanais à une 5e vague aux conséquences dramatiques. Nous avons compris l’ensemble des déterminants qui font que la population pouvait être réticente à la vaccination, que ce soit la façon dont l’information circule, dont les campagnes de communication ont été organisées, de façon trop similaire à ce qui s’est fait dans la métropole, pas assez adaptées aux populations des Antilles de la Guyane… Il y a les facteurs historiques de défiance vis-à-vis de positions de l’Etat, d’autres tenant au rapport au corps et à ce que signifie une injection sur un corps… Nous en avons parlé avec le comité citoyen qui a été mise en place par l’Etat avec des sociologues, des historiens, des sages de la société antillaise et on peut comprendre.

Que proposez-vous ?

Une fois qu’on a écouté et compris, il nous faut trouver les voies et les moyens de progresser parce qu’il y a une option qui n’en est pas une, c’est de laisser les populations de ces territoires violemment exposées à une 5e vague, ce serait un abandon et un renoncement et ça n’est pas acceptable quelles que soient les positions politiques des uns et des autres on ne peut pas jouer avec la vie de nos compatriotes sur quelque territoire que ce soit. Nous sommes une République qui doit travailler à protéger ses populations avec des actions adaptées à chaque territoire.

Que dites-vous sur la situation des soignants ?

L’obligation vaccinale est aujourd’hui largement appliquée et que l’on atteint des taux de vaccination significatifs. Chez les personnels de ville, il y a trois semaines on était déjà à des taux supérieurs à 85%. En milieu hospitalier, au CHU de Pointe-à-Pitre, nous avons passé les 85% de soignants vaccinés. Au centre hospitalier de Basse-Terre, Olivier Véran nous a indiqué que nous avons dépassé les 90%. Au CHUM, on est au-dessus de 80% des soignants qui sont entrés dans un protocole de vaccination. Nous soutenons à la fois le principe de l’obligation des soignants qui doit être appliquée dans tous les territoires de même que là légitimité des mesures d’adaptation ce qui a été fait puisque la date limite en Martinique pour l’obligation d’un schéma vaccinal complet a été reportée au 31 décembre. La perspective d’une vague violente est intimement liée au taux de vaccination de la population.

Propos recueillis par FXG

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