Ce texte de YL Monthieux répond à une analyse de Francis Carole, membre du “GRAN SANBLE” que nous avons publiée dans ANTILLA 1686 de cette semaine…

  • Dans cette analyse, assez juste, notamment dans la partie qui pointe les responsabilités de l’entourage d’AMJ qui n’a pu corriger une partie de l’ornière qui pointait, Y-L Momthieux, sous-estime, par contre, la responsabilité de ses amis du Conseil Général qui avaient la possibilité de mettre un grain de paille dans la réussite de l’opération menant à l’éviction de Claude Lise de la présidence du CG. et d’offrir ainsi au stratège Letchimy, une avenue pour dominer tout le paysage politique du Pays
  • Il est vrai que peu nombreux sont ceux qui ont suivi la manière dont Serge Letchimy procède et qui a commencé par la prise du pouvoir au sein même de son propre parti, prise de pouvoir qui est assez bien décrite dans l’importante brochure-témoignage de Renaud de Grandmaison, qui s’est poursuivie par le harcèlement incessant, lors des cessions du CG,  de ses plus fidèles compagnons durant 2 ou 3 ans (bien avant le chute de Claude Lise)…(HENRI PIED)

LE TEXTE DE Y L MONTHIEUX

J’ai lu avec intérêt l’analyse de Francis Carole qui dépeint avec réalisme ce qu’il considère comme la prise en main des deux collectivités locales par le président de la région de Martinique. Dans son article intitulé « FUSION OU PHAGOCYTAGE ? », le leader du PALIMA décrit méticuleusement ce qu’il appelle « la stratégie de mise sous tutelle du conseil général par la région ». Les arguments du patron du PALIMA démontrant les différentes étapes de cette prise en main me paraissent pertinents. Sauf que la stratégie de Serge Letchimy n’a pas commencé au lendemain de son succès aux régionales et que la mise sous tutelle du conseil général n’est pas une fin en soi.

Il s’agit de confronter les  stratégies de conquête de la CTM du président sortant et de son prédécesseur. Mais les deux camps s’empruntent mutuellement parfois les mêmes méthodes, tel la personnalisation du pouvoir et l’usage du principe clientéliste selon lequel c’est celui qui paie qui décide. A deux mois de l’élection de la CTM, donc, Francis Carole paraît exprimer le retard de son camp dans une confrontation où Machiavel règne en maître.

Dès avant les consultations de janvier 2010 et l’entêtement d’Alfred Marie-Jeanne à vouloir interroger coûte que coûte les martiniquais sur son projet de statut de l’article 74, Serge Letchimy avait sans doute compris le parti qu’il pouvait tirer de la situation. D’ailleurs, seul le patron du camp patriotique et quelques affidés pouvaient croire au succès de cette aventure. Sans faire preuve vraiment d’irrévérence à l’égard du chef dont on sait pourtant combien la susceptibilité est crainte, certains amis auraient pu le prévenir de la catastrophe politique probable.

Tous coupables, donc, dans l’entourage du chef. Coupables d’absence de courage davantage encore que de clairvoyance. A cette occasion j’avais été le seul à écrire dans la presse qu’Alfred Marie-Jeanne  avait perdu la main. En effet, venant d’un politicien aussi expérimenté que lui, son geste ressemblait à celui d’un homme décidé à en finir avec la politique. (in  Alfred Marie-Jeanne, la fin d’une époque, en librairie et en ligne sur Politiques publiques ).

Le patron du MIM allait donc incarner la défaite du 74 ! On peut penser que sa participation au OUI gagnant du 24 janvier 2010 avait contribué à atténuer l’ampleur de sa défaite à la région, 3 mois plus tard. Sans cette seconde consultation « de consolation », si l’on peut dire, la défaite aux régionales du camp patriotique se fût transformée en véritable bérézina. Mais le résultat de ce processus fut une aubaine pour Serge Letchimy et le PPM, qui n’en demandaient pas tant.

Finalement, les consultations populaires ont eu des conséquences pour les trois camps politiques en présence. La droite a continué de s’affaiblir en ne distinguant pas son vote de celui de ses adversaires, le RDMIM a perdu le pouvoir, ne réussissant qu’à limiter les dégâts, le PPM a ramassé la mise alors qu’il s’était dans un premier temps opposé à la consultation des électeurs.

Francis Carole décrit donc la période qui allait suivre, en oubliant cependant de mentionner que celle-ci allait enregistrer, loin du peuple à Paris, un accord presque parfait des gauches sur les conclusions à donner aux deux consultations populaires. Les élus décidèrent de supprimer le département et d’ériger un statut sui  generis, unique en France ; de constituer un exécutif dit monocolore, excluant les membres de l’opposition, à l’image d’un véritable gouvernement ; de sauvegarder le congrès, indiquant ainsi la volonté de s’ouvrir à de nouvelles évolutions statutaires. Ils avalisèrent enfin un mode d’élection et un « modèle » de répartition des élus qui constituent un casse-tête visible au cours des débats à la télévision, y compris pour les juristes qui les ont conçus.

Certes, quelques discussions avaient porté sur la majoration 11 sièges de la majorité, mais elles ne furent pas enflammées et leurs bruits ne parvinrent pas aux oreilles des martiniquais. Pour être bref disons, par exemple, que Fort-de-France qui comprendra 15 candidats sur chaque liste pourrait bien totaliser 4 ou 5 élus en raison du faible taux de participation attendu. Plus modestes, les élus de Guyane ont préféré la simplicité, laissant les martiniquais à leur usine à gaz sophistiquée. Comme dans les autres sections, le nombre d’élus de Cayenne sera celui prévu sur la liste. Tout simplement.

Bref, l’objectif était commun : un pouvoir exécutif tout-puissant. Interchangeables, seules ont différé les stratégies, celle du pouvoir et celle de l’opposition. En janvier prochain, Francis Carole décrira peut-être un nouveau moment – certainement pas le dernier – du phénomène auquel ses amis politiques auront puissamment contribué à mettre en place. Il y aura sans doute bien des déçus, mais c’est la règle de la confrontation électorale. Qu’elle soit du GRAN SANBLE, d’EPMN ou des deux, l’opposition de gauche sera responsable de son sort. Elle aura elle-même rédigé les dispositions qu’il lui sera appliqué en donnant les pleins pouvoirs à l’équipe gagnante qu’elle croyait être.

Pour sa part, BA PEY-I A AN CHANS, qui se veut la seule force modérée du paysage politique, promet de renoncer, du moins dans la forme, à la stricte application des règles d’une institution qui donne au vainqueur un véritable droit de vie et de mort sur l’opposition. En effet, totalement opposé au mode de fonctionnement du conseil exécutif, BA PEY-I A AN CHANS y voit, pour au moins deux raisons, l’avènement d’un véritable gouvernement.

D’abord, la motion de censure qui a été prévue s’applique d’ordinaire aux gouvernements, pas aux collectivités territoriales. De même, l’obligation de fait (admis par tous) d’exercer à plein temps le mandat exécutif met ceux qui en bénéficient dans la position de véritables ministres de gouvernement. Par ailleurs, les membres de ce mouvement estiment malhonnête la comparaison qui est faite sur les ondes entre la CTM et le statut de la Corse. Elément essentiel de différenciation, le département n’est pas supprimé en Corse. Au contraire, il y en a deux : le département de la Haute-Corse et le département de la Corse du sud.

S’il est élu président de la CTM, Yan MONPLAISIR envisage donc de faire participer aux travaux de l’exécutif, sans droit de vote, des élus de l’opposition désignés par leurs partis.

Yves-Léopold Monthieux, le 9 octobre 2015.

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